Révélée au congrès de l’ASCO, l’étude de phase 3 ADAURA (1) vient bouleverser la prise en charge des cancers bronchiques non à petites cellules (CBNPC) localisés.
L’Osimertinib en adjuvant
ADAURA évaluait le bénéfice d’un traitement adjuvant de trois ans par Osimertinib (inhibiteur de tyrosine kinase anti-EGFR) chez des patients opérés d’un CBNPC de stade IB à IIIA porteur d’une mutation EGFR (del Exon 19 ou L858R), après éventuelle chimiothérapie adjuvante. L’objectif principal de l’étude (courbe ci-jointe), la survie sans récidive (SSR) des patients stade II/IIIA, était atteint avec un taux de SSR à trois ans de 80 % dans le bras Osimertinib versus 28 % pour le placebo (HR = 0,17 ; IC 95 %, 0,12 à 0,23). Reste à savoir si ce bénéfice majeur en SSR se traduira par une amélioration de la survie globale (SG), critère probablement plus pertinent en adjuvant. Ce serait alors la première indication validée d’une thérapie ciblée dans le CBNPC localisé.
Pas de bénéfice à la radiothérapie postopératoire chez les N2
L’essai de phase 3 LUNG ART (2), rapporté au congrès de l’ESMO, évaluait le bénéfice d’une radiothérapie postopératoire à la dose de 54 Gy après chimiothérapie chez des patients opérés d’un CBNPC avec une atteinte N2 histologiquement prouvée. Plus de 50 % des patients avaient une atteinte N2 multiple. La radiothérapie postopératoire n’a pas réussi à démontrer de bénéfice statistiquement significatif sur la SSR médiane (critère principal) : 30,5 mois versus 22,8 mois pour le bras contrôle (HR = 0,85 ; IC 95 %, 0,67 à 1,07). La toxicité, notamment cardiopulmonaire, de la radiothérapie peut être une explication. Si cette étude permet enfin de clore le débat en démontrant l’absence de bénéfice de la radiothérapie chez les N2 opérés, elle relance celui de la place de la chirurgie dans cette situation, vu les données de survies supérieures à celles attendues (66,5 % et 68,5 % de survivants à trois ans).
Une double immunothérapie en métastatique
À l’ASCO, l’étude CheckMate 9LA (3) évaluait, chez des patients atteints d’un CBNPC métastatique, l’association d’une double immunothérapie (Ipilimumab 1 mg/kg toutes les six semaines et Nivolumab 360 mg toutes les trois semaines) couplée à deux cycles de chimiothérapie, comparée à un doublet de chimiothérapie à base de sels de platine. La population était représentée majoritairement par des patients fumeurs (86 %), porteurs d’adénocarcinome (69 %), dont 40 % avaient une immunohistochimie (IHC) PD-L1 négative et environ 20 % des métastases hépatiques. L’étude a rempli son objectif principal, avec une médiane de SG de 15,6 mois pour le bras expérimental contre 10,9 mois pour le bras contrôle (HR = 0,66 ; IC 95 %, 0,55 à 0,80). Ce bénéfice était retrouvé dans les deux sous-groupes histologiques et quel que soit le statut PD-L1. Reste à déterminer maintenant la place de cette combinaison par rapport au standard actuel qu’est l’association chimiothérapie et immunothérapie.
La voie des anticorps conjugués
L’année 2020 a été l’occasion également de découvrir les anticorps conjugués, nouvelle arme thérapeutique associant la spécificité d’un anticorps monoclonal couplé à la toxicité d’une chimiothérapie. L’étude de phase 2 DESTINY-Lung01 (4) évaluait le Trastuzumab-Deruxtecan (TD), un anticorps anti-HER2 couplé à un inhibiteur de la toposiomérase de type 1 chez des patients atteints d’un CBNPC métastatique muté HER2 (cohorte 2). Sur 42 patients prétraités, le taux de réponse du TD était de 61,9 % et la médiane de SSP de 14 mois. Le profil de tolérance se rapproche de celui d’une chimiothérapie (fatigue, vomissement, cytopénie) mais majoritairement de grade ≤ 2. Les résultats de la cohorte 1 (hyperpression d’HER2 en IHC) sont attendus l’année prochaine. Le TD ouvre ainsi la voie des anticorps conjugués dont plusieurs sont en cours d’évaluation dans le CBNPC.
Gustave Roussy (Villejuif)
(1) Herbst RS. et al. Vol. 38, Journal of Clinical Oncology. 2020. p. LBA5‑LBA5.
(2) Le Pechoux C. et al. ESMO 2020, Abstr LBA3_PR. Ann Oncol. 1 sept 2020;31:S1178
(3) Reck M. et al. J Clin Oncol. 20 mai 2020;38(15_suppl):9501‑9501
(4) Smit EF. et al. J Clin Oncol. 20 mai 2020;38(15_suppl):9504‑9504
(5) Peters S. et al. ESMO 2020, Abstr. LBA84. Ann Oncol. 1 sept 2020;31:S1211.
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