L’épidémie de diabète de type 2 n’épargne pas les personnes âgées, bien au contraire, en raison de l’amélioration de la qualité des soins, qui a permis une majoration de l’espérance de vie. La prise en charge de ces malades nécessite d’adapter les objectifs et le mode de traitement à l’état de santé des personnes. Parmi les paramètres à prendre en compte, l’état nutritionnel devrait être systématiquement évalué, y compris chez les personnes obèses.
Un dépistage codifié
La dénutrition, qui est souvent associée à une sarcopénie, est fréquemment méconnue ou sous-estimée. Pourtant, la Haute autorité de santé (HAS) fournit des critères précis pour le dépistage et l’évaluation du degré de dénutrition, incluant une échelle d’évaluation, le MNA (mini nutritionnal assessment), la perte de poids, l’IMC et l’albuminémie (lire encadré). Cependant, la présence d’œdèmes peut gêner l’interprétation du poids et doit être prise en considération. Le dosage de l’albuminémie constitue le marqueur biologique le plus utilisé ; un taux inférieur à 35 g/L s’accompagne d’une majoration de la morbimortalité. Comme sa demi-vie est de 20 jours, la répétition à court terme du dosage est inutile. En revanche, celle de la préalbumine ou transthyrétine n’est que de 2 jours, si bien que ce dosage permet un suivi de l’effet des mesures diététiques mises en œuvre.
Chercher la cause
De multiples facteurs peuvent être à l’origine d’un état de dénutrition. Parmi ceux-ci, les modifications de l’appétit en rapport avec un isolement social, un état dépressif ou des troubles cognitifs doivent être recherchées. L’hypothèse d’une pathologie associée, notamment d’une affection maligne, nécessite d’être évoquée. Enfin, une perte de poids inexpliquée et un déséquilibre glycémique sont en relation avec une insulinopénie, imposant l’initiation rapide d’une insulinothérapie.
Des besoins conservés
Contrairement à une idée répandue, les besoins énergétiques diminuent peu chez les sujets âgés à activité comparable, alors que les apports alimentaires décroissent avec les années, notamment en raison d’une diminution de l’appétit. Aussi, les apports alimentaires doivent rester à un niveau identique à celui des sujets plus jeunes et être augmentés en cas d’activité physique ou d’agression métabolique. Les besoins nutritionnels sont estimés à 36 kcal/kg/jour et à 1 g/kg/jour de protéine, majoré à 1,2 à 1,5 g/kg/jour en cas de dénutrition (lire encadré).
Prévention et prise en charge
La lutte contre la malnutrition passe par une chasse aux interdits, aux idées reçues et à la monotonie alimentaire, qui sont trop souvent ancrés dans l’imaginaire et les habitudes. La lutte contre la sarcopénie doit associer un apport énergétique et protéique suffisant au maintien d’une activité physique régulière et adaptée. C’est ainsi que les régimes restrictifs doivent être prohibés au profit d’une alimentation équilibrée, et enrichie en cas de dénutrition.
Le maintien d’un apport nutritionnel satisfaisant, grâce aux proches avec l’aide d’une diététicienne, est le gage de la réussite du vieillissement tandis que « le plaisir de manger » doit être absolument préservé.
Traitement du diabète
L’équilibre glycémique optimal doit se conformer aux objectifs déterminés par la situation clinique et de l’état nutritionnel de la personne. La metformine reste le traitement de première ligne, avec une vigilance accrue sur sa tolérance digestive. Lorsque l’objectif glycémique n’est pas atteint, le choix se porte vers l’ajout d’un inhibiteur de la DPP4, en raison de son excellente tolérance, contrairement aux sulfamides ou aux glinides qui peuvent induire des hypoglycémies.
Lorsque cette bithérapie n’est pas suffisante, l’instauration d’une insuline basale est la solution à privilégier, tout particulièrement chez les personnes dénutries (1).
Après 75 ans, l’utilisation des agonistes des récepteurs du GLP1 (arGLP1) et des inhibiteurs du SGLT2 doit être réservée à une minorité de patients. Les dernières études montrent une efficacité équivalente en termes de protection cardiaque et rénale mais les effets secondaires sont souvent plus importants chez les seniors. En particulier, la perte de poids, qui accompagne généralement la prise de ces produits et les troubles digestifs induits par les arGLP1 peuvent aggraver un état de dénutrition (2).
Exergue : les régimes restrictifs doivent être prohibés au profit d’une alimentation équilibrée, et enrichie en cas de dénutrition
* Service d’endocrinologie, Hôpital d’Instruction des Armées Bégin ** Service de médecine interne polyvalente, Hôpital Saint-Julien, CHU de RouenLes auteurs ne déclarent aucun lien d’intérêt avec la teneur de cet article (1) Bauduceau B, Bordier L, Doucet J. L’insulinothérapie chez les personnes âgées diabétiques de type 2 : l’éclairage de l’étude Gérodiab. Bull Acad Natl Med 2022;206:59-64 (2) Darmon P, Bauduceau B, Bordier L et al. Prise de position de la Société Francophone du Diabète (SFD) sur les stratégies d’utilisation des traitements anti-hyperglycémiants dans le diabète de type 2 – 2021. Med Mal Metab 2021;15:781-801
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