« Depuis le début de l’épidémie de Covid-19, maladie totalement nouvelle, nous avons beaucoup appris et nos modalités de prise en charge ont évolué », a rappelé le Pr Olivier Hanon, cardiologue et gériatre à l'hôpital Broca (AP-HP). Très vite, dès les premières études publiées par des équipes chinoises, l’âge est apparu comme un des facteurs de risque majeurs de forme sévère et de décès.
Chez le sujet âgé, le Covid-19 se présente plus volontiers de façon atypique, comme l’avait confirmé en juin dernier une première étude gériatrique française. Comparativement aux sujets de moins de 80 ans, les plus âgés ont plus souvent des troubles neurocognitifs, des atteintes cardiologiques, une altération de l’état général et des chutes. Ceci a été retrouvé dans la cohorte de patients hospitalisés pour Covid-19 à l’hôpital Broca, avec 35 % de présentations atypiques (confusion, chutes, signes digestifs) qui doivent donc faire évoquer le diagnostic et indiquer un test PCR.
« L’expérience nous a aussi appris à élargir notre bilan biologique de routine préconisé chez les sujets hospitalisés et à rajouter le dosage de la magnésémie, parfois très abaissée et source de troubles du rythme, des D-dimères, du fibrinogène, de la troponine et du NT-proBNP », a précisé le Pr Hanon. Autant de marqueurs de l’inflammation ou de lésions myocardiques sous-jacentes.
Une mortalité de 33 %
Chez le sujet âgé, le Covid-19 est une maladie grave, qui, dans l’étude menée à l’hôpital Broca, s’est accompagnée d’une mortalité de 33 %. La perte d’autonomie et la présence de marqueurs de l’inflammation étaient associées à une évolution péjorative. Au-delà de ses conséquences négatives immédiates, l’infection est une source de complications secondaires chez les patients sortis de l’hôpital.
C'est aussi un facteur de perte de chance pour les patients non infectés par le SARS-Cov-2 mais souffrant de pathologies chroniques, qui ont décompensé par peur de venir à l’hôpital. Sans compter les effets secondaires du déconfinement, à type de dépression, de dénutrition et de sarcopénie. On a ainsi assisté à une baisse très nette des hospitalisations pour accident vasculaire cérébral ou infarctus du myocarde durant la période du confinement, et à un pic de décès à domicile en mars et avril 2020. « Les patients ne sont pas venus à l’hôpital et il faut absolument corriger ce problème avant la deuxième vague », a insisté le Pr Hanon.
HBPM et dexaméthasone
« Nous avons aussi appris à mieux prendre en charge nos patients, en particulier les patients sévères chez lesquels les héparines de bas poids moléculaire (HBPM) et la dexaméthasone sauvent des vies », a précisé le spécialiste parisien. Un traitement anticoagulant doit être instauré dès l’hospitalisation, à une posologie préventive le plus souvent standard chez le sujet âgé dont l’indice de masse corporelle (IMC) est généralement de moins de 30 kg/m2. La posologie doit être augmentée en cas d’obésité, voire administrée à dose curative en cas de risque thrombotique majeur. Les recommandations sont claires aujourd'hui. Chez les patients âgés de plus de 70 ans et non hospitalisés mais alités, une HBPM doit aussi être prescrite en préventif.
De nombreux traitements à visée anti-inflammatoire ont été évalués et à l’heure actuelle, un seul a fait la preuve de son efficacité : la dexaméthasone, qui dans l’étude RECOVERY, a permis de réduire la mortalité de 17 %. « Un bénéfice qui ne s’observe que chez les patients recevant une oxygénothérapie », a souligné le Pr Hanon.
Les inhibiteurs du SRAA
Enfin, l’impact des inhibiteurs du système rénine angiotensine (SRAA) a fait l’objet de plusieurs études, qui ont démontré l’absence d’effet délétère et pour certaines ont souligné un possible effet positif. Notamment, dans l’étude sur la cohorte de patients hospitalisés à Broca a montré que chez ces sujets très âgés hospitalisés, un traitement antérieur par inhibiteur de l'enzyme de conversion (IEC) ou antagoniste des récepteurs de l'angiotensione 2 (ARA 2) était associé à une réduction significative de 50 % de la mortalité. Un constat partagé ailleurs qui a conduit à mettre en place d’autres essais : PRAETORIAN-COVID aux États-Unis, qui évalue le valsartan chez des patients hospitalisés, et, en France une approche de thérapie ciblée par telmisartan ou darolutamide chez des patients résidents en EHPAD.
D’après la communication du Pr Olivier Hanon, Paris.
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