Le Covid ? Je ne comptais pas en parler et un jour, je l’ai dit quand même dans un journal régional. À la suite de çà, des gens m’ont parlé et ont pris de mes nouvelles. Je pense que cette maladie a été l’occasion de prendre soin des autres. Et puis, cette façon d’égrener tous les jours le nombre de morts, cela fait réfléchir. C’est d’abord ce qui m’a frappé, moi qui m’intéresse beaucoup à la fragilité de la vie dans mes films : Human que j’ai mis à disposition du public sur You tube et Woman, foutu en l’air par la crise du Covid, mais qui est en train de ressortir.
J’ai été contaminé le 13 mars, nous étions une trentaine autour de la table et on n’a pas fait trop attention ce jour-là. Quatre d’entre nous ont été contaminés. J’ai eu la chance de ne faire qu’un Covid assez léger : gros coup de fièvre, je n’ai pas mangé pendant huit jours, j’ai perdu huit kilos. J’étais aussi couvert de boutons, peut-être dus à la fièvre, car le dermato m’a dit que ce n’était pas lié au Covid. Au cours de cet épisode, j’ai dormi énormément, mais je ne peux pas dire que j’ai souffert. Et j’ai fait un test récemment : aujourd’hui je suis bardé d’anticorps !
J’ai bénéficié d’un confinement de luxe, à la campagne, avec mes enfants et mes petites enfants dans la maison du bas : à 74 ans, j’ai appris le plaisir de leur préparer à manger tous les jours. C’est incroyable ! Il m’a fallu 40 ans pour découvrir ce bonheur-là ! Pendant cette période, j’ai regardé des films et beaucoup lu. Je recommande « Bergère des collines », cela raconte le quotidien d’une fille qui garde les moutons dans les Corbières ; c’est une histoire simple et très bien écrite. J’en ai profité aussi pour me promener beaucoup dans la forêt, près de Rambouillet. Il faisait très beau temps, c’en était presque anormal pour la saison. Il n’y avait pas encore de feuilles aux arbres, j’étais pénétré par cette beauté. Le monde est vraiment une œuvre d’art qu’on ne regarde plus. Pendant ces trois mois, je me suis rendu compte que finalement les plus beaux endroits du monde se trouvaient tout près de chez moi.
Le monde est une oeuvre d'art
Au cours de ces quelques semaines, je me suis manifesté auprès d’Emmaüs pour donner un coup de main. Mais j’étais trop vieux pour être retenu ! J’ai donné des photos pour des ventes aux enchères organisées pour venir en aide aux soignants, à New York notamment. J’ai eu peu de contacts avec les médecins pendant cette période. Mais ceux que j’ai eus étaient extrêmement sympathiques. Alors que je ne savais pas trop quoi faire, ils m’ont tous répondu, notamment un ami, médecin du SAMU.
J’idéalise peut-être un peu les médecins, mais je pense que c’est un des plus beaux métiers du monde. Sauver les gens… Ce doit être une sorte de vocation. Beaucoup sont sympas. J’ai trouvé que certains spécialistes que consultaient ma femme l’étaient moins : il est vrai qu’on manque vraiment d’effectifs dans certaines disciplines. Mais la neurologue qui la suit aujourd’hui est géniale. Ça ne doit pas être très agréable de recevoir un SMS le dimanche. Et pourtant, à chaque fois, elle rappelle. Ça ne me semble d’ailleurs pas une exception. Les médecins de famille que l’ai eus se sont toujours montrés aussi disponibles.
Maintenant, le monde d’avant va revenir. C’est inévitable du fait de la crise ; la crise a été tellement forte, il faut remettre les gens au travail. Et l’écologie risque d’en pâtir. Mais il y a au moins un combat qu’il faut absolument mener à terme contre les marchés d’animaux sauvages, et particulièrement en Chine qui est entièrement fautive sur ce dossier.
Au-delà, je tire de cette épidémie une leçon : il n’y a rien de plus précieux que la vie. Un jour, une femme malgache interviewée dans un de mes films sur son plus grand rêve, m’a fait cette réponse extraordinaire : « mourir avec le sourire… ». On va tous mourir un jour et je crois qu’il faut l’accepter. L’autre grande question est la suivante : « Qu’est-ce que j’ai fait de ma vie ? » Il faut donner du sens à son existence et c’est très important pour pouvoir mourir avec le sourire… Greta Thunberg a tout compris !
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