Suspicion d’agression sexuelle ou de maltraitance

L’examen clinique est souvent peu contributif

Par
Publié le 12/06/2017
Article réservé aux abonnés
maltraitance

maltraitance
Crédit photo : Phanie

« La réalisation d’un examen médical dans le cadre d’une suspicion d’agression sexuelle demande une expertise particulière », a rappelé la Dr Mathilde Hauet-Wiedemann lors de la présentation d’une étude menée au sein de l’unité médico-judicaire du centre hospitalier régional universitaire de Nancy. 

L’examen physique est souvent normal chez ces enfants qui, en l’absence de verbalisation, présentent plutôt des troubles somatiques ou du comportement. Ce travail monocentrique, rétrospectif, observationnel a inclus 404 enfants et adolescents de moins de 18 ans adressés en consultation pour une suspicion d’agression sexuelle sur mineur. Un examen vulvaire a été fait dans 291 cas, qui a permis de constater des lésions possiblement en lien avec les faits allégués dans 6,2 % des cas (l’hymen était sans particularité dans 73 % des cas et avec des variations physiologiques dans 16 % des cas). Un examen anal a été pratiqué dans 362 cas, avec un taux de 1,7 % de lésions possiblement en lien avec les faits allégués.

« Au total, seuls 7,9 % des examens ont été contributifs, ce qui rejoint des données antérieures. L’examen est rarement fait en urgence (en moyenne 8,7 mois après les faits allégués) et une consultation auprès d’un médecin expérimenté doit être absolument privilégiée, a insisté la Dr Hauet-Wiedemann. L’affirmation de la véracité ou non des faits est souvent impossible, et il faut s’aider, dans le cadre d’une prise en charge pluridisciplinaire, des recommandations de repérage ».

Dans les cas de maltraitance du nourrisson, les lésions intra-abdominales représentent la deuxième cause de décès après les lésions cérébrales. Leur diagnostic est difficile, et dans le cadre du protocole « Enfant en danger » 2011, à l’APHM une échographie abdominopelvienne est réalisée systématiquement chez tous les enfants de moins de 2 ans suspects de maltraitance. « Une stratégie dont la pertinence est remise en question par les résultats d’une étude rétrospective menée de 2006 à 2015 à l’APHM », a indiqué la Dr Anaïs Caujolle qui a présenté ce travail. Les données portent sur 151 nourrissons de moins de 2 ans, qui ont tous eu une échographie abdominale, qui était normale dans 90,7 % des cas. Chez les 14 enfants chez lesquels une anomalie a été rapportée, une lésion d’origine traumatique a été observée dans la moitié des cas, d’origine non accidentelle dans seulement 3 cas, soit 2 % de l’ensemble de la population étudiée. Ces 3 enfants présentaient des signes cliniques évocateurs (vomissements) et une cytolyse, toutefois modérée (inférieure au seuil de 80 UI/l retenu dans la littérature) dans 2 cas. Ce travail souligne donc l’absence de bénéfice de la réalisation systématique d’une échographie abdominopelvienne, examen qui est une source de stress pour l’enfant. « Peut-être faudrait-il la réserver aux patients avec des signes cliniques et/ou biologiques évocateurs », a interrogé la Dr Caujolle, avant d’indiquer qu’une étude à plus large échelle serait intéressante pour confirmer ces résultats.

D’après les communications des Drs Mathilde Hauet-Wiedemann (Nancy), et Anaïs Caujolle (Marseille).

Dr Isabelle Hoppenot

Source : Le Quotidien du médecin: 9588