Isolement et contention : les nouvelles modalités détaillées dans le décret paru au « J.O. »

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Publié le 04/05/2021
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Crédit photo : S. Toubon

Ce 2 mai est paru au « Journal officiel » le décret d'application redessinant les modalités des mesures d'isolement et de contention en psychiatrie, en vertu de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2021, et de son article 84, votée le 14 décembre dernier. 

Quand le médecin doit-il informer d'une mesure de contention ou d'isolement

Le texte précise notamment les obligations d'information qui incombent au médecin. Selon la loi, ce dernier doit obligatoirement informer « sans délai » le juge des libertés et de la détention (JLD) dès qu'il renouvelle une mesure de contention ou d'isolement au-delà des durées totales prévues initialement : respectivement 24 et 48 heures, et toujours respectivement par tranche de 6 et 12 heures renouvelables. Le médecin doit aussi informer le patient et toute une série de personnes (titulaires de l'autorité parentale, tuteur, responsable d'une mesure de protection juridique, conjoint, concubin, auteur de la demande de soin, procureur de la République).

Le décret précise que le médecin informe ces personnes et instances « par tout moyen permettant de dater sa réception, dès que la durée cumulée de mesures prises consécutivement d'isolement ou de contention atteint la durée totale définie et qu'une décision de renouvellement à titre exceptionnel de ces mesures est prise ». Le médecin a la même obligation d'information dans deux autres situations : lorsque les mesures sont prises de façon non consécutive et atteignent les durées limites fixées par la loi en moins de 48 heures et qu'elles sont encore renouvelées ; ou que la durée cumulée de plusieurs mesures d'isolement et de contention atteint les durées limites en 15 jours.

Dix heures accordées au directeur pour transmettre les documents

Le décret détaille aussi la procédure devant le JLD. Quand la requête à des fins de mainlevée provient du patient, elle doit être déposée au secrétariat de l'établissement d'accueil ou recueillie verbalement par le directeur d'établissement, qui établit un procès-verbal. Il a 10 heures pour transmettre la requête ou le procès-verbal au greffe du tribunal. Il doit aussi informer le patient de la possibilité d'être assisté ou représenté par un avocat, de demander à être entendu par le JLD (sauf avis médical contraire) et d'accepter ou de refuser une audition par des moyens de télécommunication. La requête peut aussi ne pas émaner du patient : c'est alors le greffe qui informe ce dernier de ses droits. Le directeur de l'établissement a, là encore, 10 heures pour transmettre toutes les pièces nécessaires à la procédure.

Enfin, le JLD peut s'autosaisir d'une procédure et demander des observations aux parties prenantes, dont le patient et le médecin. Il peut même solliciter l'avis d'un psychiatre tiers et se rendre sur place.

Le JLD a 24 heures pour rendre son ordonnance, à compter de l'enregistrement de la requête au greffe. S'il n'a pas statué, la mesure de contention ou d'isolement prend fin à l'issue de ce délai. L'ordonnance est susceptible d'appel devant la cour d'appel dans un délai de 24 heures.

Une instruction à venir pour les modalités concrètes

Selon les informations de « Hospimedia », une instruction émanant de la Direction générale de l'offre de soins devrait prochainement être publiée, précisant l'accompagnement des hôpitaux dans la mise en place de ces mesures. Ce document devrait éclaircir des points très concrets : par exemple, comment renouveler une mesure en pleine nuit ? La téléconsultation est alors envisageable, répond la DGOS. Peut-on attendre le matin pour informer le JLD ou les proches lorsqu'une mesure d'isolement ou de contention a été prolongée exceptionnellement au-delà des durées limites de 48 ou de 24 heures la nuit ? La réponse serait oui. Ou encore : quelles personnes proches du patient doivent être informées du droit de saisir le JLD ? Elles pourraient être identifiées au préalable via l'élaboration d'un plan de prévention partagé (sorte de directives anticipées en psychiatrie).

Enfin, l'instruction encourage la mise en place de binôme médecin/infirmier référents chargés de favoriser les techniques de désescalade des situations de crise et de promouvoir ainsi des alternatives à l'isolement et à la contention. Leur recrutement, ainsi que celui des professionnels nécessaires à la nouvelle organisation, pourra être financé sur l'enveloppe de 15 millions d'euros promise dès le départ pour accompagner la réforme − mais sans cesse critiquée pour son insuffisance par les acteurs de la psychiatrie.


Source : lequotidiendumedecin.fr