Les actions de réduction des risques et des dommages (RdRD), en particulier liés à l'usage de substances psychoactives, peinent à franchir les portes des prisons.
En janvier 2016 pourtant, la loi de modernisation de notre système de santé reconnaît que la politique de réduction des risques s’applique également aux personnes détenues « selon des modalités adaptées au milieu carcéral ». De fait, le principe d'équivalence de 1994 entre dedans et dehors est plutôt respecté pour les traitements de substitution aux opiacés (buprénorphine et méthadone), la prévention des risques d'overdose par la naloxone, les substituts nicotiniques, ou encore l'accès aux antirétroviraux et traitements de l'hépatite C, selon le Dr Laurent Michel, membre de la Fédération addiction, directeur du CSAPA Pierre Nicole, ancien chef de service du SMPR à Bois d’Arcy, dans les Yvelines.
Mais le décret relatif à l’échange de seringue n’est jamais paru. Le texte proposé en janvier 2017 restreignait l’utilisation de tous les outils de la réduction des risques aux unités sanitaires. « Cela revenait à faire des salles de consommation à moindre risque dans les prisons, sans assurer aucune confidentialité aux détenus contraints », explique le Dr Laurent Michel. Le décret marquait également une régression à l’égard des autres outils de réduction des risques, en restreignant leur usage aux infirmeries.
À front renversé, les syndicats pénitentiaires se sont opposés au décret par peur que les seringues deviennent des armes, ainsi que l’administration pénitentiaire qui semble vivre comme une démission le fait de fournir des outils d’usage de drogue, à des détenus souvent tombés pour drogue, analyse le Dr Michel.
Une aberration en termes de santé publique, à ses yeux. « Quand on regarde les spécificités de la population de détenu, qui cumule les facteurs de risque, on devrait avoir davantage de RdRD. Or c’est l’inverse », constate-t-il. Il y voit même un problème éthique : quid d'une tutelle responsable d'une personne qui ne met pas à sa disposition les mesures clefs préconisées par l'OMS et l'office des nations unies contre la drogue et le crime (UNODC), s'interroge-t-il.
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