Le cancer au-delà de la médecine de pointe
En France, trois millions de Français vivent avec un cancer ou un antécédent de cancer. Que les patients soient stabilisés, en rémission voire guéris, la maladie bouleverse encore leur quotidien plusieurs années après le diagnostic et la phase de traitement actif, comme en témoignent différentes enquêtes présentées lors d’une table ronde co-organisée avec l'INCa.
Un retentissement au long cours
Selon l’enquête Vican 5, cinq ans après le diagnostic, 63,5 % des patients souffrent encore de séquelles dues à la maladie ou au traitement, à type notamment de fatigue (48,7 %), douleur (73 %), troubles cognitifs, etc.
L’impact est aussi psychologique, près d’un tiers (32,5 %) des personnes interrogées rapportant une dégradation persistante de leur qualité de vie mentale. En parallèle, leur vie professionnelle et leur situation financière sont durablement modifiées : plus d’un quart ont vu leurs revenus baisser, 24 % des salariés ont repris à temps partiel thérapeutique, tandis que 20 % ne travaillent plus.
Le 7e observatoire sociétal des cancers, conduit par la ligue contre le cancer, dresse un constat proche, tout en soulignant que pour beaucoup de patients, cette période de l’après-traitement peut être plus difficile à vivre que la phase active de leur maladie.
Dans cette étape de transition, « le médecin généraliste et plus largement les soignants de proximité (infirmiers, pharmaciens, aidants, etc.) sont importants pour maintenir le lien avec le patient », souligne le Dr Marie-Hélène Certain (Les Mureaux, secrétaire générale du Collège de médecine générale).
Pour une approche bio-psycho-sociale
Mais comment accompagner au mieux les patients ? « A travers ces enquêtes, on voit bien que le cancer n’est pas seulement une affaire de médecine de pointe, mais nécessite une approche globale qui va bien au-delà », poursuit le Dr Certain. « Le cancer n’est pas que le cancer ! »
Suivi d’éventuels traitements au long cours (type hormonothérapie ou immunothérapie), prise en charge des séquelles, mais aussi prévention tertiaire et quaternaire face au risque de second cancer : les enjeux médicaux restent de taille pendant cette période.
Mais d’autres problématiques peuvent rapidement venir se greffer, qu’elles soient de nature psychologique (risque de dépression “post-maladie” par exemple) ou d’ordre familial (projet de parentalité), professionnel (reprise progressive du travail à temps partiel, invalidité, etc.) ou social (accroissement des difficultés financières, besoin d’aide présentielle, etc.).
D’où l’importance « d’une approche bio-psycho-sociale centrée sur les besoins du patient, avec une bonne définition des rôles de chacun », résume le Dr Certain.
Encore faut-il optimiser l’articulation entre les soins de 2e et 3e lignes et le premier recours. Alors que plusieurs études montrent une meilleure efficacité des suivis partagés, « nous pouvons encore vraiment progresser sur la coordination et la fluidité des parcours, estime le Dr Certain, à condition d’être mieux organisés en ambulatoire et plus visibles. Tous seuls, chacun dans notre coin, nous n’y arriverons pas ! »
Encore faut-il aussi que les patients consultent. Selon Vican 5, un tiers d’entre eux n’ont pas de suivi spécifique de leur cancer en médecine générale.
La vie 5 ans après un diagnostic de cancer : comment mieux accompagner nos patients ?, Vendredi 5 Avril
Dépistage, entre trop et trop peu
Alors qu’autorités sanitaires et Collège de la médecine générale appellent depuis plusieurs années à lever le pied sur le dépistage du cancer de la prostate, la primo-prescription de PSA n’a que peu diminué, selon une étude présentée lors du congrès. Parmi les hommes de 50 à 52 ans, 15,7 % ont eu un premier dosage en 2011, contre 12,4 % en 2017, soit une diminution « limitée mais significative ». 95 % des primo-prescripteurs étaient des généralistes. La problématique est autre pour le dépistage du cancer colorectal, qui peine à s’imposer. Pour booster la participation, la notification nominative aux généralistes de leurs patients non participants pourraient être bénéfique, selon une autre étude. Quant au cancer du col de l’utérus, un dernier travail suggère que l’amélioration pourrait passer par une meilleure prise en compte des représentations des femmes (peur de la maladie, rapport au corps réducteur, etc.) et de leur passé qui peuvent freiner la participation au dépistage.
Dépistage des cancers, Vendredi 5 Avril
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