Ils ont noirci le boulevard Raspail avant de se déverser place Vauban, selon les organisateurs du mouvement « Sciences en Marche », les 8 000 chercheurs qui ont défilé aujourd’hui constituent la plus importante manifestation de ce type depuis le mouvement « Sauvons la recherche » de 2004. La journée avait commencé par le défilé de 150 cyclistes en blouse blanche entre Gif-sur-Yvette et la Porte d’Orléans dont le but est d’attirer l’attention du public et des politiques sur un triste constat : la recherche scientifique française est menacée par une chute dramatique de ses financements.
Montpellier, épicentre de la contestation
L’histoire de « Sciences en marche » débute le 3 juin 2014, quand Patrick Lemaire, chef de l’équipe Contrôle transcriptionnel de la morphogenèse des chordés au centre au centre de recherche de biochimie macromoléculaire (CRBM) de Montpellier, décide avec quelques autres de lancer une grande marche pour la défense de l’enseignement supérieur et de la recherche. L’initiative reçoit rapidement le soutien des conseils d’administrations de 18 universités, de 27 sociétés savantes, ainsi que de plusieurs conseils scientifiques dont la commission de spécialistes en neurosciences de l’INSERM, sans oublier quelques personnalités comme le Pr Jules Hoffmann, prix Nobel de médecine en 2011.
30 000 postes sur 10 ans
Première revendication du mouvement : la reprise du recrutement statutaire. « La situation est dramatique », explique le Pr Anne-Hélène Monsoro-Burq de l’institut Curie, le nombre de postes ouverts au CNRS a été divisé par deux en quatre ans. Nous demandons donc un plan pluriannuel de recrutement pour que ceux qui s’engagent dans la recherche puissent avoir une visibilité sur les possibilités d’emploi. »
Plus précisément, le collectif demande la création d’au moins 3 000 postes par an sur dix ans, en plus des départs à la retraite, dont un tiers de postes de chercheurs et deux tiers de postes d’accompagnement de la recherche (ITA).
Un « problème » dans l’emploi scientifique
Questionnée sur les problèmes de recrutements lors d’une séance de questions d’actualité à l’Assemblée nationale, la secrétaire d’Etat à la recherche Geneviève Fioraso a reconnu mercredi l’existence d’un « problème », arguant que la baisse des départs à la retraite « réduit mécaniquement les possibilités d’embauche » à budget constant. « L’emploi dans les organismes a augmenté de 1 437 personnels de recherche entre 2009 et 2013 et 5 402 postes ont été créés entre 2003 et 2013 à l’université », a-t-elle rappelé, tout en soulignant que le budget de la recherche et de l’enseignement supérieur avait été « sanctuarisé ».
Le budget 2014 consacré à la recherche au sein de la Mission interministérielle recherche et enseignement supérieur (MIRES) s’établit à 7,771 milliards d’euros en 2014, soit une diminution de 82 millions par rapport à 2013.
Le budget de l’ANR sous pression
Pour les organisateurs de « Science en marche », ce n’est pas tant le budget qui est en cause, mais son utilisation. Selon Antoine Chaillet, maître de conférence à l’université Paris Sud 11 et coordinateur du mouvement, « nous avons conscience de la situation économique de la France. Nous ne demandons pas une allocation de nouveaux moyens, mais une réorganisation budgétaire. »
La solution préconisée une économie de deux milliards chaque année sur le crédit impôt recherche (CIR), afin de financer les recrutements et la reprise des crédits récurrents aux laboratoires et aux universités. « Les crédits récurrents ont baissé de façon spectaculaire, même dans les laboratoires les mieux évalués, » note Antoine Chaillet. « Cela va de paire avec l’augmentation du financement de la recherche par projet mais ces derniers se réduisent également. »
En 2013, seuls 8,5 % des projets soumis aux appels d’offres de l’Agence nationale de la recherche (ANR) ont été reçus, tandis que le budget de l’agence baissait de 80 millions de son budget. En 2014, les ressources de l’ANR se réduisent encore, s’établissant à 575 millions d’euros contre 656 millions d’euros en 2013.
Un crédit impôt recherche très critiqué
Le CIR est au cœur des critiques des chercheurs. « Certains grands groupes licencient leurs chercheurs mais continuent à en bénéficier. Cette mesure est aussi fréquemment détournée à des fins d’optimisation fiscale, s’insurge Anne-Hélène Monsoro-Burq, l’objectif de 3 % du PIB investi dans la recherche n’est pas atteint, mais les responsables politiques n’ont que l’augmentation du CIR comme unique réponse. » La Cour des comptes elle-même a émis des doutes sur le bien-fondé des sommes allouées, ou plutôt non perçues par l’État.
Dans un rapport publié de juillet 2013, l’institution constatait que le ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche ne dispose pas d’un budget suffisant pour mener à bien ses missions de contrôle des entreprises bénéficiaires. Dans la nuit de jeudi à vendredi, un amendement présenté par Marie-George Buffet (PCF) et deux députés « Nouvelle Donne » visant à plafonner le CIR et à empêcher son cumul avec le crédit d’impôt compétitivité emploi (CICE) a été retoqué par l’Assemblée nationale.
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