Le Dr Laurent Alexandre maintient que l’espérance connaîtra une forte croissance au XXIe siècle grâce aux technologies NBIC (nanotechnologies, biotechnologies, informatique et cognitique) et dénonce une étude « absurde » et « anti-transhumaniste ».
« L’étude de l’IRMES est scientifiquement pertinente, note d’abord l’auteur de « La mort de la mort ». Aussi pertinente que l’était celle qui pronostiquait en 1830 que la vitesse de mobilité sur terre ne pourrait jamais excéder 70 km/h, celle d’un cheval au galop. Dans les deux cas, ces travaux font l’impasse sur les évolutions technologiques, ce qui les rend absurdes. La réalité des murs qui bloquent l’espérance vie n’en est pas moins avérée. Au Moyen-Âge, on est resté bloqué pendant mille ans devant la barrière des 35 ans. Le plafond actuel, à 120 ans, est repéré depuis longtemps et il fait l’objet d’un consensus international. La question est donc de savoir si les technologies NBIC vont permettre de franchir ou non ce nouveau mur. »
Pour le Dr Alexandre, « les scientifiques, aujourd’hui comme hier, n’anticipent pas bien la vitesse des révolutions technologiques : « En 1990, ils prévoyaient le séquençage de l’ADN pas avant 2100 et moins de trente ans plus tard, nous voyons que nous allons tous être séquencés, ce qui va créer un tsunami scientifique, avec la médecine personnalisée, la révolution électronique médicale et l’ingénierie du vivant, les nanotechnologies. On va pouvoir intervenir sur l’ADN, régénérer les tissus, et fabriquer des organes, guérir les cellules par des nano-moteurs. L’analyse et le décryptage du vivant par l’intelligence artificielle va multiplier d’une manière encore inimaginable toutes ces avancées. Nier que de tels tsunamis technologiques puissent impacter l’espérance de vie et professer que l’humanité va rester comme au Moyen-Âge au pied du mur et qu’elle y restera jusqu’à la fin des temps, est un point de vue que je respecte, mais que je ne saurais partager. »
Bio-progressistes contre bio-conservateurs
« Nous sommes engagés aujourd’hui dans un débat entre bio-progressistes et bio-conservateurs, estime encore le fondateur de Doctissimo, patron aujourd’hui une entreprise de séquençage de l’ADN, qui dénonce l’idéologie sous-jacente de ces derniers : « Les conclusions de l’étude de l’IRMES prétendent intégrer des données climatiques et environnementales qui semblent menaçantes et prégnantes. En réalité, sous ces prétextes écologistes, je décèle une vision religieuse de nature intégriste : l’anti-transhumanisme prêche que l’homme n’aurait pas le droit de franchir les murs et de s’affranchir de ses limites actuelles, notamment en termes d’espérance vie. Passer les limites physiologiques actuelles serait mal. Vivre plus longtemps serait donc pour ces décroissantistes un péché ! »
Les médecins devraient-ils se positionner dans ce débat, alors que d’aucuns tirent la sonnette d’alarme ? « À part quelques exceptions notables, tels le Pr Guy Valencien, ils sont malheureusement happés par leurs activités quotidiennes, notamment bureaucratiques, qui les empêchent de se positionner dans une perspective long-termiste, déplore le Dr Alexandre. C’est dramatique car ils laissent le champ libre aux GAFA, les géants du Web et à leur système de vassalisation des professionnels de santé. Le mandarinat âgé qui contrôle la formation initiale fait obstacle à une prise de conscience urgente du corps médical. »
Dernier ouvrage paru : « La guerre des intelligences » (J-Cl. Lattès, 20,90 euros)
Article précédent
Une réfutation non scientifique, selon le Pr Jean-François Toussaint
Les secrets d'Ikaria, l'île grecque où l'on vieillit bien
Une réfutation non scientifique, selon le Pr Jean-François Toussaint
Une étude « absurde », selon le Dr Laurent Alexandre
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature