LE QUOTIDIEN – Le CHU-centrisme a-t-il la vie dure ?
ALAIN HÉRIAUD – Plutôt. Mais, de mon point de vue, la réforme du médecin traitant a changé la donne. Il est devenu impératif que nous améliorions le lien avec ce praticien dans le cadre du parcours de soins, car celui-ci part du médecin traitant et revient au médecin traitant, c’est une boucle !
S’achemine-t-on, via cette « révolution », vers une nouvelle ère des relations médecins de ville-CHU ?
Ça commence. Dans mon CHU [Bordeaux, NDLR] par exemple, nous prenons une initiative déjà expérimentée à Lille : l’instauration d’un tour de garde de l’hôpital où deux ou trois médecins ont un numéro réservé à la médecine de ville. Pour mettre ceci en œuvre, nous avons créé, en amont, un groupe de travail avec l’URML [union régionale des médecins libéraux, remplacée depuis par l’URPS]. Nous démarrons les tests sur le secteur gériatrique. Les médecins libéraux vont avoir un contact possible à tout moment avec un gériatre du CHU.
Quel est le point de rencontre entre les mondes ambulatoire et hospitalier ?
La conférence régionale de santé (CRS) pourrait en être un. Sur ce sujet, on est un peu dans la même approche qu’avec la télémédecine. On n’est pas dans une volonté hégémonique, on ne veut pas empêcher de fonctionner les liens qui existent déjà entre les médecins de ville et les établissements privés. On n’a pas du tout ni l’ambition – ni même les moyens – de couper ce lien ! Simplement, on a envie de dire, notamment en CHU : nous avons une expertise, une vraie valeur ajoutée. Jusqu’à présent, la plupart du temps, notre porte d’entrée pour les médecins de ville, ce sont les EPU [enseignements post-universitaires]. Cela ne suffit pas. Peuvent également créer du lien les réseaux (souvent ville-hôpital), la télémédecine bien évidemment
…
Pour les CHU, l’enjeu de la qualité de la relation qu’ils entretiennent avec la ville n’est-il pas, aussi, économique ?
La question se pose d’abord en termes de santé publique. Économique, elle l’est aussi mais accessoirement. Ce qui est important, c’est de savoir comment on se situe dans le système. Le CHU a été trop longtemps perçu comme un monstre impénétrable. Faciliter les relations avec les médecins de ville, nous y avons vraiment tous intérêts. Il faut que ces médecins aient des contacts plus simples et plus directs avec nos médecins hospitalo-universitaires. Créer des liens, c’est aussi faciliter le retour à domicile des patients… Et puis, c’est vrai, n’ayons pas peur de le dire : nous devons avoir un positionnement sur le marché, capter une part de clientèle. Si ce lien n’est pas suffisant, elle nous échappera. Mais, je le répète, l’intérêt est pour le malade et pour son médecin d’abord.
Une des demandes de certains médecins traitants est de pouvoir participer aux décisions importantes concernant leurs patients pris en charge au CHU. Est-ce envisageable ?
Il y a quelques années, la pratique a existé de « la blouse blanche à l’hôpital ». Elle permettait au médecin de ville qui le souhaitait de participer à un staff. À quoi nous sommes-nous vite heurtés : money ! Car quand les médecins libéraux viennent travailler à l’hôpital, qui les paye ?
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