Doit-on s'attendre à une paralysie, voire une fermeture des blocs opératoires cet été ? C'est ce qu'affirment Le BLOC (qui regroupe chirurgiens, anesthésistes-réanimateurs et obstétriciens) et l'Union des chirurgiens de France (UCDF). Les deux syndicats alertent ce jeudi 25 avril sur les « graves perturbations qui menacent les blocs opératoires à partir du 1er juillet 2019 ».
En cause, l'entrée en vigueur du décret sur les infirmières de bloc opératoire (IBODE) dont l'application est prévue à cette date. Ce texte, paru en 2015 puis reporté à deux reprises, prévoit notamment de faire de trois actes (l'aide à l'exposition, l'aspiration et l'hémostase) des « compétences exclusives » aux IBODE alors qu'ils sont aujourd'hui pratiqués en majorité par des infirmières diplômées d'État (IDE).
« Au 1er juillet, nous ne pourrons plus opérer », assène le Dr Philippe Cuq, président de l'UCDF et coprésident du BLOC. Car à cette date, les quelque 10 000 IDE qui réalisent chaque jour les trois actes bientôt réservés aux infirmières spécialisées ne pourront plus exercer. « Personne ne prendra le risque d'opérer dans ces conditions », poursuit le chirurgien. Depuis l'annonce du décret, rien n'a été prévu pour pallier le manque d'IBODE qui menace, affirme-t-il. « Le volume de formation n'est pas à la hauteur », poursuit celui qui demandait déjà en janvier « un dispositif permettant de former et de qualifier en masse ».
La pénurie devrait toucher plus fortement les établissements privés bien moins fournis en IBODE que leurs collègues du public. Les deux syndicats estiment à 2 000 le nombre d'IBODE qui exercent en établissement privé contre 7 000 dans le public.
« Cela fait pourtant quatre ans que nous alertons, je suis effrayé par l'irresponsabilité de l'État ! », tance le Dr Cuq. Inquiètes elles aussi, les quatre grandes fédérations hospitalières (FHF, FHP, FEHAP et UNICANCER) avaient envoyé en février un courrier dans ce sens à la ministre de la Santé, expliquant qu'« à ce stade, les établissements de santé ne sont pas en capacité d'appliquer stricto sensu cette évolution réglementaire sans réduire leur offre opératoire ». Quelques jours auparavant, c'est le député du Nord Christian Hutin (Parti socialiste) qui avait adressé une question restée sans réponse à Agnès Buzyn.
Mesures transitoires
Devant ce risque de pénurie, une réunion organisée par la Direction générale de l'offre de soins (DGOS) avec les représentants de la profession prévoit des « mesures transitoires » pour éviter la paralysie des blocs opératoires. En l'état, elles devraient permettre aux IDE de valider en urgence les trois compétences exclusives qui posent problème. Une prochaine réunion devrait fixer les conditions précises de cette validation d'acquis.
Ce n'est pas suffisant pour le Dr Cuq qui regrette un « découpage » des compétences néfaste pour les métiers. « Il faut des mesures transitoires qui soient diplômantes et non simplement une validation sur trois compétences très précises », demande le chirurgien.
Les syndicats font ainsi trois propositions pour éviter la crise. Ils demandent des mesures transitoires « simples et pragmatiques » pour « massivement valider les actes exclusifs pour les IDE ». En parallèle, ils appellent de leurs vœux la mise en place d'une formation d'IBODE en alternance « étalée sur quatre ou cinq ans » en lieu et place de la formation actuelle de deux ans jugée décourageante pour les infirmières. Enfin, ils réclament un « plan de financement » pour revaloriser le métier d'IBODE. « On ne peut pas demander de la qualité sans financement pour ce métier », affirme le patron du BLOC.
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