Depuis mars 2019, l'hôpital public français est traversé par un mouvement de contestation sans précédent. La colère de ses personnels trouve racines dans une organisation des soins jugée technocratique et une gestion basée sur la rentabilité. Dans un recueil de témoignages* baptisé « Déclarons notre amour à l'hôpital public », le collectif inter-hôpitaux (CIH) revient sur seize mois d'une mobilisation entamée aux urgences et percutée par l'irruption du Covid-19.
Le titre de cet ouvrage est une reprise de l'appel à manifester du 14 février 2020. Le CIH accompagné du collectif inter-urgences (CIU) et de plusieurs centrales syndicales organisait alors une troisième grande journée de mobilisation dans toute la France pour la « Saint-Valentin de l'hôpital ». C'est aujourd'hui noir sur blanc qu'il a décidé de compiler les déclarations d'amour reçues tout au long du mouvement.
En 164 pages, le CIH donne à lire les témoignages d'attachement à l'hôpital public de nombreux citoyens français. « Hôpital public je t'aime car ton service pédiatrique de Pau a sauvé mon fils de 3 ans d'une monstrueuse pneumopathie », raconte une mère de famille. « Il n'est pas normal que l'hôpital public devienne un hôpital de troisième zone », exhorte une infirmière parisienne. « Je tiens à toi mon hôpital car il n'y a qu'avec toi que je peux travailler comme je l'ai appris à Limoges et à Paris », écrit encore une pédiatre urgentiste. Plusieurs élus locaux à commencer par la maire de Paris ont également envoyé leur soutien aux soignants. « Vous qui êtes l'hôpital public, notre bien commun, le patrimoine de ceux qui n'en ont pas », signe Anne Hidalgo.
Quitte ou double
Malgré les fragilités dénoncées depuis plus d'un an et le bouleversement lié au Covid-19, « l'hôpital a tenu » et « les soignants ne se sont pas effondrés », écrit toutefois le CIH. Mais l'organisation née en octobre 2019 met en garde les pouvoirs publics : « ceux qui ont vécu le Covid-19 ne supporteront pas le retour en arrière ».
« L'occasion est unique de construire l'hôpital de demain », encouragent les auteurs du recueil. Dans sa préface, le Dr François Salachas, connu pour avoir tenu tête à Emmanuel Macron lors d'une visite fin février à la Pitié-Salpêtrière (AP-HP), évoque l'ambivalence des sentiments ressentis par les soignants maintenant que le plus dur de la crise est passé. « Si la crise a permis aux soignants de renaître à des conditions d'exercice en accord avec leurs valeurs, si à cette occasion, les usagers ont pu signifier leur attachement et, n'ayons pas peur des mots, leur amour pour l'hôpital public, écrit le neurologue, on perçoit sur le terrain une impression de quitte ou double ».
*« Déclarons notre amour à l'hôpital public. 2020, défense et illustration d'un service public », Collectif inter-hôpitaux. Hémisphères éditions, 164 pages, 10 euros.
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