Incroyable mais vrai ! À Bari, le chef-lieu de la région des Pouilles situé dans le sud du pays, le Dr Vito Procacci, chef du service des urgences du CHU a reçu une lettre de l’agence régionale de l’inspection du travail lui enjoignant de payer une amende de 27 100 euros. Selon l’inspection du travail, ce praticien n’aurait pas respecté le temps de repos quotidien prescrit par la loi pendant la pandémie et plus particulièrement en 2021.
Le contrat de travail des médecins urgentistes prévoit la possibilité d’effectuer 250 heures supplémentaires par an en cas de situation extrême. Or le Dr Procacci aurait largement dépassé ce plafond en effectuant 1 000 heures supplémentaires en 2021. Deux autres médecins du CHU de Bari ont également été mis à l’amende à hauteur de 10 000 euros pour la même raison. Selon les calculs de l’inspection du travail, les sommes réclamées correspondraient au montant devant être payé pour les 1 000 heures supplémentaires effectuées par le Dr Procacci.
8 000 vies sauvées
Saisie par une association syndicale autonome qui a dénoncé le dépassement du plafond des heures supplémentaires autorisées et le non-respect du temps de repos quotidien, l’inspection du travail de Bari a décidé d’enquêter. Mais sans tenir compte du contexte sanitaire et de la pénurie de médecins particulièrement sévère durant la pandémie en raison du nombre de soignants contaminés. Une absurdité pour les médecins impliqués et les syndicats de soignants qui sont immédiatement montés au créneau.
« Nous avons sauvé plus de 8 000 vies et notamment celles de 1 600 patients sous ventilation. On nous appelait les héros et maintenant, on porte plainte contre nous pour avoir trop travaillé, j’ai honte de mon pays », s’est agacé le Dr Procacci dans une lettre adressée au chef de l’État Sergio Mattarella.
Il a aussi ajouté que durant cette deuxième phase de la pandémie, les effectifs étaient passés de 40 praticiens à 26, ce qui justifie au-delà du contexte sanitaire, le fait que l’équipe rattachée aux urgences mais aussi les soignants des autres services comme la réanimation ont dû effectuer des dépassements d’horaires.
« C’est inouï, nous avons été mis à l’amende pour avoir refusé de compter nos heures supplémentaires afin de sauver des vies durant la pandémie ! Heures qui n’ont pas été payées car nous avons reçu une seule prime de 2 500 euros et cerise sur le gâteau : on nous réclame maintenant des sommes folles », a tonné le Dr Procacci.
Une cagnotte pour aider les médecins pénalisés
Dans un premier temps, la direction hospitalière du CHU de Bari a annoncé qu’elle lancera une cagnotte au niveau national pour aider les médecins impliqués dans cette affaire absurde à payer l’amende. En parallèle, le Dr Procacci a sollicité l’intervention du chef de l’État italien qui a immédiatement saisi la ministre du Travail Marina Calderone. Résultat : l’inspection du travail a d’abord suspendu les amendes avant d’annoncer leur annulation dans la foulée de la requête du chef de l’État.
Reste toutefois l’amertume profonde des soignants et le problème de fond, à savoir les conditions de travail des urgentistes et le paiement des heures supplémentaires effectuées durant toute la pandémie. Deux dossiers importants que le Dr Filippo Anelli, président de la Fédération nationale de l’Ordre des médecins (Fnomceo) et le Dr Mario Balzanelli, président de SIS118, la société italienne du système 118 (urgences), ont déposé sur les tables des ministres du Travail et de la Santé.
« Il faut réfléchir rapidement aux nombreux départs des médecins qui jettent l’éponge par épuisement, un problème qui génère un appauvrissement progressif du système de santé en Italie », a conclu le Dr Balzanelli.
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