L'HEGP, la Salpêtrière, l'hôpital Louis-Mourier et la pharmacie centrale de l'AP-HP menacés

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Publié le 17/03/2016
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Crédit photo : AP HP

La crue du siècle, si elle a lieu, menacera sérieusement le bon fonctionnement de l'assistance publique-hôpitaux de Paris (AP-HP). Cette menace, l'établissement public de santé tente de l'anticiper, en participant à l'exercice sur table organisé dans le cadre de l'exercice européen « EU Sequana 2016 » par la préfecture de police de Paris.

La crue de 1910, restée dans les mémoires des parisiens, correspond au 3e niveau de crue sur les 4 prévus dans le scénario mis au point par la Direction régionale et interdépartementale de l'environnement et de l'énergie (DRIEE) dans le cadre de Sequana. Il s'agit du niveau R1, soit une montée des eaux de plus de 8 m mesurée au niveau du pont d'Austerlitz, qui atteindrait alors l'hôpital européen Georges Pompidou et la Salpêtrière à Paris, ainsi que l'hôpital Louis-Mourier (Colombe, Hauts-de-Seine) et la pharmacie centrale de l'AP-HP située à Nanterre. Lors de l'exercice du vendredi 11 mars, ces deux derniers établissements ont été questionnés par le centre opérationnel Victoria mis en place par la zone de défense et de sécurité de paris.

Virtuellement, le transfert de deux tiers des patients ne posait pas de gros problème de logistique, même si des problématiques plus précises ont émergé en ce qui concerne le transfert des patients hopistalisés d'office et des patients bariatriques qui nécessite l'aide de la police pour les premiers et des transports adaptés pour les seconds.

 

Quatre jours pour organiser l'évacuation

 

« À partir du moment où les services de la préfecture nous préviennent, nous disposons de 4 à 5 jours avant que l'eau n'atteigne les bâtiments », précise Pierre Joubert responsable de la cellule de crise de l'AP-HP. L'évacuation est organisée sous forme de convois sanitaires d'ambulances renforcés par les associatifs et éventuellement des flottes des départements limitrophes, voire d'autres pays européens. Le tout étant organisé sous l'égide des médecins du SAMU chargés de médicaliser les colonnes de véhicules.

Pour le cas plus particulier de la pharmacie centrale, plusieurs scénarios sont prévus en fonction de la gravité de la situation. Il est par exemple possible de poursuivre une activité dégradée sur le site de Nanterre, privé d'électricité et donc d'automates de gestion des stocks. L'ARS envisage également un transfert d'activité vers deux sites situés au nord et au sud de Paris. « Pour les patients qui doivent se rendre à la pharmacie centrale pour obtenir des médicaments rétrocedables, nous étudions aussi la possibilité d'un accueil à l'Hôtel-Dieu », complète Pierre Joubert.

 

Une préparation établissement par établissement

 

Il n'existe pas de plan d'ensemble de préparation à la crue centennale, mais un accompagnement de chaque établissement à l'adaptation des lieux pour maintenir un niveau maximum d'activité. Depuis 2002, les établissements les plus exposés ont ainsi déployé des groupes électrogènes dans les étages, ainsi que des protections physiques contre les crues.

Les transferts de patients et de personnels se verraient-ils compliqués par une augmentation de la fréquentation des urgences ? « Ce n'est pas totalement avéré, répond Pierre Joubert, car le territoire serait en grande partie vidé de ses habitants. »

Il reste cependant une part d'inconnue que ne sauraient résoudre tous les plans blancs du monde. Comparé à la situation de 1910, le sol de Paris a été considérablement bétonné, et donc imperméabilisé, tandis que la surface du réseau souterrain s'est démultipliée. Les hôpitaux franciliens sont en outre bien plus dépendants de l'électricité qu'ils ne l'étaient il y a un siècle.

Par ailleurs, la décrue, qui avait duré environ 35 jours en 1910, pourrait se traduire par une augmentation du risque d'épidémie ou de pathologies liées à la pollution des eaux de consommation. Or « les retours d'expérience de l'ouragan Katrina ont montré que la reprise d'activité peut prendre plusieurs mois, note Pierre Joubert, il est donc difficile de prévoir comment gérer cette phase de décrue ». L'exercice va se poursuivre jusqu'à 18 mars, la dernière partie est justement consacrée à la gestion de la décrue et au retour à l'activité.

D. C.

Source : Le Quotidien du médecin: 9480