Rémunérations, 35 heures : syndicats et collectifs circonspects face au nouveau plan pour l'hôpital, nouvelle journée d'action le 16 juin

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Publié le 18/05/2020

Crédit photo : AFP

L'épidémie de Covid-19 n'a pas encore dit son dernier mot que l'heure est déjà aux grandes manœuvres à l'hôpital. Depuis plusieurs jours, l'exécutif multiplie les apparitions et ouvre une nouvelle séquence politique dans la gestion de la crise : la préparation d'une grande réforme de l'hôpital public.

Vendredi, Emmanuel Macron s'est rendu en visite surprise à l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière (AP-HP) à la rencontre des professionnels mobilisés en première ligne face au coronavirus. La veille, il s'était entretenu deux heures de rang avec des médecins auteurs début mai d'une tribune pour rénover l'hôpital public. Deux sorties médiatiques lors desquelles le chef de l'État a reconnu une « erreur » dans la stratégie Ma Santé 2022 et posé les jalons du nouveau « plan massif d'investissement » promis au cœur de l'épidémie.

« Nous entrons dans une dynamique de réforme de notre hôpital public, avec un volet rémunération et carrière, un volet investissement, un volet gouvernance et réforme », a-t-il énuméré annonçant également sa volonté d'organiser un « Ségur de notre système de santé ».

Assouplissement des 35 heures

Hier, c'est Olivier Véran qui est monté au front. Dans une longue interview accordée au « Journal du Dimanche », le ministre de la Santé a donné le détail de certaines mesures et quelques éléments de calendrier. Un plan sera présenté « cet été, pour traduire tout ce qui peut l'être dans le prochain budget de la Sécurité sociale », a-t-il annoncé.

Au menu notamment, une augmentation de salaire pour les personnels hospitaliers, « au-delà des primes » déjà accordées pour récompenser leurs efforts face à l'épidémie. Le locataire de Ségur veut atteindre « rapidement » un « niveau de rémunération correspondant au moins à la moyenne européenne ».

À ce titre, il reconnaît qu'il faudra « de l'argent nouveau ». « C'est nécessaire, il n'y a pas d'argent magique, il faudra donc faire des choix », a-t-il déclaré au JDD. À propos des infirmières, le neurologue affirme que « la nation va devoir faire un effort important pour reconnaître leur rôle ».

Un assouplissement des 35 heures est aussi à l'ordre du jour. « La question n'est pas de déréglementer le temps de travail », prévient le ministre. « Il ne s'agit pas d'obliger des gens à travailler davantage, mais de créer un cadre beaucoup plus souple pour permettre à ceux qui le souhaitent de le faire, ou d'organiser leur temps de travail différemment », détaille-t-il avec prudence. Le ministre de la Santé s'engage également à « sortir du dogme de la fermeture de lits ». « Médecin hospitalier, j'ai connu les brancards dans les couloirs, ce n'est plus acceptable. »

Le 25 mai, le « Ségur de la santé » sera l'occasion d'une « grande réunion multilatérale des partenaires sociaux au ministère », a également précisé Olivier Véran.

Une journée d'action le 16 juin

Mais la circonspection domine toujours au sein des organisations hospitalières. Ce lundi 18 mai lors d'une visioconférence de presse commune, dix structures − syndicats de praticiens et d'internes (AMUF, APH, ISNI), collectifs (CIH, inter-urgences, inter-blocs, Printemps de la psychiatrie), centrales syndicales (CGT, SUD, UNSA) et Coordination nationale des comités de défense des hôpitaux et maternités de proximité − ont exprimé leur méfiance quant aux annonces du gouvernement.

Sur la forme, les organisations « déplorent » n'avoir pas été concertées et regrettent d'avoir été mis au courant par voie de presse. Sur le fond, le travail sur les rémunérations va « dans le sens qu'on espère, note Jacques Trévidic, président de l'intersyndicale Action praticiens hôpital (APH), mais on n'a aucune donnée concrète à ce stade ». Pour le Dr Emmanuelle Seris de l'Association des médecins urgentistes de France (AMUF), « l'attractivité ne couvre pas que le salaire mais aussi des plans d'embauche dans les hôpitaux », point sur lequel l'exécutif est pour l'instant resté muet. « Arrêtons les annonces ! », exhorte quant à lui le Dr Olivier Milleron du collectif inter-hôpitaux (CIH). Le cardiologue demande un « geste rapide sur les salaires et un moratoire sur les fermetures d'établissements ».

L'organisation d'un « Ségur de la santé » n'a pas non plus fait sauter au plafond les professionnels. Après plus d'un an de lutte, Hugo Huon le président du collectif inter-urgences (CIU) émet des réserves. Il se souvient du pacte de refondation des urgences dévoilé au mois de septembre par l'ex-ministre Agnès Buzyn après plusieurs mois de concertations. « Avec trente acteurs autour de la table, la discussion est vite rendue impossible », s'agace l'infirmier qui craint de revoir le 25 mai « les mêmes traîne-savates des couloirs du ministère et les technocrates de l'ombre qui imposent leur plan ».

Pour toutes ces raisons, syndicats et collectifs entendent « maintenir la pression » sur le gouvernement. Une « journée d'action » est prévue le 16 juin. « On verra de quelle manière nous pourrons nous emparer de cette date » compte tenu du contexte épidémique, a expliqué Mireille Stivala, secrétaire générale de la Fédération de la santé et de l'action sociale CGT. « Nous sommes dans l'expectative. Nous avons le sentiment que le gouvernement n'a pas tiré toutes les leçons de la crise », résume la syndicaliste.


Source : lequotidiendumedecin.fr