« Tu connais un bon endroit où se faire soigner ? » C’est cette question, maintes fois entendue, qui a conduit le journaliste Jérôme Vincent, en 1995, à se lancer dans un palmarès des hôpitaux. « Le public ne savait rien sur la qualité des structures, les praticiens eux-mêmes n’avaient aucune idée de ce qui se passait dans la clinique d’à côté », se souvient-il.
Le journaliste met 15 mois à mettre la main sur les bons documents, des annexes de rapports commis par l’échelon régional de l’assurance-maladie, inutilisés. Il exhume et compare les taux de césariennes, le nombre d’actes chirurgicaux, et titre volontairement provocateur : « 77 maternités à fermer, 225 services de chirurgie à fermer...». Avec son compère François Malye, le journaliste a depuis augmenté sa force de frappe. En 2000, ils sortent les premiers palmarès des maternités et des cliniques, puis évaluent pour « Le Point » jusqu’à 64 disciplines (contre quatre à l’origine) et multiplient les indicateurs, à partir des données du PMSI et de questionnaires.
Droits de réponse, procès, plaintes... Jérôme Vincent sait que sa démarche agace mais il défend l’effet vertueux des classements sur la qualité des hôpitaux et des services : « début 2000, on titrait : "le scandale des AVC", alors que seules cinq unités neurovasculaires existaient en France. Aujourd’hui, on en compte au moins 120 ». Et ces numéros spéciaux dopent les ventes des magazines, preuve de l’intérêt du public.
Le ressenti complexe
La directrice générale du CHU de Nîmes, Martine Ladoucette, déplore des « méthodes qui recherchent le sensationnalisme ». Plus modéré, le député socialiste Jean-Louis Touraine invite à « évaluer ces évaluations » et en particulier l’effet que ces classements peuvent avoir sur les décisions des patients.
Martine Ladoucette ne sous-estime pas l’importance de renforcer la culture de la qualité à l’hôpital et juge le bilan « en demi-teinte ». Déjà, la multiplication des indicateurs, portés par la Haute autorité de santé (HAS) et le ministère de la santé, ont permis d’objectiver et d’améliorer la qualité des pratiques. « La troisième campagne de certification, ce n’est plus une émission de Jacques Martin où tout le monde gagne ! Il y aura des non-certifications, et elles seront publiques sur les sites des hôpitaux », explique-t-elle.
La directrice du CHU précise que l’évaluation des résultats – et non plus seulement des méthodes – doit se généraliser pour contrebalancer les palmarès des journaux. « Il n’y a pas eu assez de progrès sur l’évaluation de la qualité ressentie par les patients, nous n’avons pas les bons instruments », cite-t-elle en bémol.
Des usagers acteurs
Le rôle plus actif des patients, à la fois usagers de santé et consommateurs avisés de soins, n’est pas pour rien dans le développement de la culture de la qualité. « Dans un champ concurrentiel, celui qui choisit in fine, c’est le patient, et il choisira l’établissement où il se reconnaîtra », assure Jean-Michel Meyer, président de la délégation Alsace du Collectif interassociatif sur la santé (CISS). Et de plaider pour une participation accrue des usagers au sein de l’hôpital du futur : « Ni médecins, ni gestionnaires, nous apportons dans le dialogue la préoccupation des patients sur la qualité » estime le représentant de usagers.
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