Révélée par La Charente Libre, la nouvelle, localement, a fait l’effet d’une bombe. Un médecin urgentiste de l’hôpital de Confolens (Charente) a déposé plainte contre la direction de l'hôpital pour « mise en danger d'autrui » et « harcèlement moral », le 31 août dernier. En cause : la création en mars d'une unité de soins continus (USC) qui ne disposerait pas du personnel dûment qualifié. Selon le plaignant, le Dr Michel Chauley, le personnel médical et paramédical de cette unité spécialisée n'aurait pas été formé à la médecine d'urgence, contrairement à ce que stipulent les textes réglementaires.
Joint par « Le Quotidien », le Dr Chauley persiste et signe. « Vous avez du personnel non formé, non dédié, qui devra prendre en charge des patients qui doivent être surveillés comme le lait sur le feu, 24h/24, via la télémétrie centralisée ou la biologie qui est souvent faite plusieurs fois par jour, et nécessite des résultats dans un délai de 30 à 40 minutes. » À en croire ce médecin, l’établissement ne disposerait pas du personnel qualifié pour assumer ces soins continus, s’alarme le Dr Chauley. « Les patients ne pourront bénéficier ni des compétences médicales et paramédicales, ni de la biologie, ni de la surveillance qu’ils sont en droit d’attendre. Il y aura un risque de mort. »
Le bon diplôme ?
L’affaire a démarré en mars dernier, lorsque le Dr Chauley, ex-chef de pôle de la médecine urgence de Confolens, abandonne sa chefferie. Le Dr Christophe Carraut lui succède et réactive une USC lors d’une CME, le 31 mars. Il demande alors aux praticiens du service d'urgences de s’occuper des trois lits de soins critiques. Mais, en dehors du Dr Chauley, aucun d’entre eux n’aurait les compétences et les diplômes requis, accuse l’urgentiste qui a porté plainte. « Tous les autres médecins du service sont des généralistes et n’ont aucune expérience en réanimation ».
Or, seuls les réanimateurs médicaux, les anesthésistes-réanimateurs, les spécialistes en médecine d’urgence (titulaires du DES ou des ex-DESC) peuvent assumer des soins critiques, selon les textes, martèle Dr Chauley ajoutant que le personnel paramédical n’a pas fait non plus l’objet d’une formation dédiée en réa ou en soins critiques.
Sécurité
Autant d'arguments réfutés par le nouveau chef de pôle. Contacté lui aussi par « Le Quotidien », le Dr Carraut assure que les paramédicaux bénéficient précisément de formations à la médecine d’urgence. Par ailleurs, « l’ensemble des praticiens qui s’occupent des patients en soins continus sont des urgentistes. Ils sont détenteurs de la CAMU (capacité d’aide médicale urgente). Nous sommes strictement dans le respect de la réglementation », affirme-t-il. Une défense qui fait sortir le Dr Chauley de ses gonds. « Les textes sont clairs : il n’y a que le DESC ou le DESMU qui permettent de faire des soins critiques, pas la capacité. Et il faut prouver que l’on a fait des stages en réanimation, ce qui n’est pas le cas des médecins du service. »
Le nouveau chef de pôle réaffirme être dans son bon droit. La réactivation de l’USC lors d'une CME visait justement à mieux sécuriser les patients avec du personne qualifié, plaide-t-il. « Auparavant, explique le Dr Carraut , les responsabilités des surveillances continues étaient assez floues. Il était possible que des médecins non urgentistes s’en occupent durant les astreintes. Désormais, ce seront uniquement les urgentistes qui s’occuperont des surveillances continues, y compris pendant les astreintes. » L’USC, ajoute-t-il, est bien dans les clous des autorisations de l'agence régionale de santé (ARS). L'unité avait fait l’objet d’une convention en 2015 à l’origine de la mise en place d’un protocole qui est « strictement le même aujourd’hui ».
Le chef de pôle reproche à son confrère d’avoir dit publiquement que l’hôpital mettait les patients en danger de mort. « Vous imaginez les dégâts que cela peut faire dans une ville comme Confolens, qui compte 4 000 habitants ? C’est honteux de prendre en otage une population pour des raisons personnelles. » La justice devra trancher.
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