En grève illimitée dans trois quarts des centres du territoire depuis le 3 juillet pour réclamer des revalorisations salariales et des embauches, les assistants de régulation médicale (ARM) sont toujours dans l’attente d’un « geste fort » du ministre de la Santé. En pratique, les ARM grévistes sont généralement assignés par l'administration et donc à leur poste, sans perte de salaire, ce qui n'enlève rien à leur détermination.
Ils « méritent d’obtenir immédiatement la prise en compte de la pénibilité de leur mission comme des responsabilités qui sont les leurs », cadre le Dr Jean-François Cibien, vice-président de Samu-Urgences de France (SUdF) et coordonnateur du groupe de travail interpro ARM, dans un courrier envoyé au ministre le 16 août.
Décidé à corriger cette « injustice », l’urgentiste propose « d’appliquer la mise en œuvre de l’indemnité forfaitaire de risque instituée par le décret n° 92-6 du 2 janvier 1992 au sein des structures de médecine d’urgence au personnel des Samu ». Contrairement aux Smur et aux services d'accueil des urgences (SAU), les Samu n’entrent pas dans le champ d’application de cette indemnité « du fait de l’existence d’un régime indemnitaire propre aux professionnels de la régulation médicale et d’une exposition aux risques jugée différente de celle à laquelle sont confrontés les personnels des SAU-Smur », précise l’urgentiste du CH d'Agen-Nérac.
Cette demande serait d’autant plus légitime que les ARM, désormais reconnus comme professionnels de santé, sont confrontés à « une explosion de leur activité », signale le Dr Cibien.
Hausse d'activité de 30 à 40 %
L'affaire ne date pas d'hier. En août 2022 déjà, SUdF constatait un bond de 21 % de l'activité du Samu-Centre 15 (sur un an) avec des pics à plus de 50 % dans certains départements (Ardèche, Dordogne, Tarn-et-Garonne, Yonne). Un surcroît d’activité déjà en partie lié à la mise en place de la régulation préalable des urgences par le Samu-Centre 15.
Un an plus tard, l’activité a « augmenté entre 30 et 40 % depuis le début de l’été », observe le vice-président du SUdF, qui dénonce la « pénibilité accrue » du métier d’ARM. Selon lui, certains agents ont même travaillé « quatre week-ends d’affilée » en raison du manque de personnel. Or, le travail de nuit et le travail de week-end des ARM « ne sont pas assez valorisés », déplore l’urgentiste. Il appelle de ses vœux, à moyen terme, une refonte de la grille salariale des assistants de régulation médicale, qui « sont aujourd’hui dans la même grille que les secrétaires médicaux ».
Autre problème de taille : alors que le ministère a lancé une campagne de recrutement pour embaucher 2 000 à 3 000 ARM, « les formateurs ne sont toujours pas rémunérés à la hauteur de leurs responsabilités », dénonce le Dr Cibien. Il exige « la reconnaissance de leur formation sous la forme d'un diplôme d'État », qu’il s’agisse des ARM formateurs, des superviseurs ou des coordinateurs de salle.
« Des responsabilités pas reconnues »
Les ARM « assument des responsabilités qui ne sont pas reconnues à l’heure actuelle », confirme Yann Rouet, coprésident de l’Association française des assistants de régulation médicale (Afarm). Joint par « Le Quotidien », il déplore le « faible nombre de candidatures car le métier n’est pas attractif ».
Lui aussi réclame « un calendrier établi pour revoir la grille indiciaire des ARM », le versement de l’indemnité forfaitaire de risque et une augmentation de l'effectif national des ARM. Autres revendications : une refonte de la formation des ARM pour « obtenir le niveau V de certification et sa reconnaissance en tant que diplôme d’État en adéquation avec notre statut de professionnel de santé ».
Devant le ministère le 7 septembre
Dans l'attente de mesures salariales dignes de ce nom, « il y a une vraie crispation chez les ARM », confirme ce mardi le Dr Marc Noizet, président de Samu-Urgences de France. Selon lui, « cela fait cinq mois que l’on discute avec le ministère de l’évolution de leur grille salariale ».
François Braun avait pourtant fait des propositions aux ARM avant l'été. « Il avait acté cette revalorisation, restait à se mettre d’accord sur le niveau. C’est une question d’attractivité pour faire revenir les soignants, mais c’est aussi une question de fidélisation pour que les soignants restent à l’hôpital », souligne le Dr Noizet. Or, alerte le président de SUdF, « sans ARM, les projets interministériels portés autour du SAS [service d'accès aux soins] et de la régulation, que cela soit pour la médecine d’urgence ou pour les soins non programmés, vont s’effondrer ».
Les ARM se montrent décidés à se faire entendre. Ils manifesteront à Paris devant le ministère de la Santé, le 7 septembre. Des rassemblements sont prévus en région le même jour, devant les agences régionales de santé (ARS).
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