ON DIT que l’histoire se répète. Celle de la sécurité routière donne parfois l’impression de radoter. Quelques exemples : la première proposition de limiter la vitesse (à 60 sur route !) remonte à… 1913, « l’Automobile homicide », du Pr Camille Simonin, paraît en 1931, le premier crash-test date de 1937 (Audi), le célèbre « Boire ou conduire, il faut choisir » sort en… 1953, etc. L’intérêt du livre très documenté de Denis Durand de Bousingen, correspondant du « Quotidien » à Strasbourg et historien, est de souligner combien la route sera longue pour infléchir la courbe sans cesse croissante des morts et des blessés de la circulation.
Les accidents apparaissent en même temps que les premières automobiles. L’état des routes et l’absence de toute réglementation n’y sont pas étrangers. Mais ils restent longtemps minoritaires. C’est la croissance, dans la seconde moitié du XIXe siècle, des accidents de travail dans les usines et les mines et des accidents de transports essentiellement dus aux chemins de fer, tramways et attelages, qui va entraîner un début d’organisation, avec dans les villes, à partir de 1880, un poste de secours munis de brancards. Des associations de secouristes bénévoles apparaissent.
Les premières études sur les accidents de circulation remontent au début du siècle dernier. En France, la première enquête date de 1903, elle porte sur 3 130 sinistres, dont 285 impliquent des automobiles. On compte alors 13 000 automobiles et 2,7 millions de voitures attelées. C’est au congrès de Vienne sur les accidents en 1913 que l’on se penche pour la première fois sur les accidents automobiles. Réalisée à la demande du gouvernement allemand, l’étude recense en 1906-1907, sur un an, 4 867 accidents ayant fait 2 419 blessés et 145 morts, dont 87 piétons (35 enfants). À comparer avec les accidents de cheval et de véhicules attelés, qui font 10 000 blessés et un millier de morts. L’accident d’automobile n’est pas encore un problème de santé publique. Mais il renforce l’hostilité de l’opinion publique à l’égard de la voiture, réservée aux classes aisées.
Les morts de la route augmentent toujours. En France, de 1 626 en 1924, on passe à 4 737 en 1934. Les médecins énumèrent les blessures et constatent l’environnement hostile de l’habitacle. Un premier congrès sur la sécurité de la route se tient en1933.
Les médecins dès 1888.
Parallèlement, les médecins ont compris tout l’avantage de l’automobile pour les secours. La première ambulance automobile est installée à Paris en 1888. Et pour leurs déplacements professionnels. Les journaux médicaux présentent les voitures les plus adaptés aux besoins du médecin. Et c’est un médecin installé à Monaco qui propose vers 1900 de goudronner les routes. Le succès sera tel qu’il y gagnera le sobriquet de Dr Goudron. L’Automobile Club médical naît en 1931 suite à la décision jugée scandaleuse par les médecins en visite de limiter le stationnement en ville à 20 minutes… C’est l’ancêtre de l’ACMF, née en 1953, qui organisera les premières assises sur les accidents de la route en 1959. Premier congrès d’une longue série.
C’est alors l’envolée de la courbe des accidents de la route dans toute l’Europe qui rattrape ainsi les États-Unis et le premier million de morts atteint en 1951. Seule l’Angleterre échappe au carnage. En France, la reprise après la guerre est rapide : 3 800 morts en 1949, 5 300 en 1951, 6 200 en 1952, 8 283 en 1956 et 180 614 blessés dont 54 255 graves. Assez ! C’est le cri du cœur des médecins. Ils sont aux premières loges, eux qui voient passer pendant les gardes du week-end, des centaines de blessés de la circulation, dont beaucoup mourront pendant la semaine. Ils ont été ramassés sans précaution par d’autres automobilistes. Les médecins réclament l’organisation des secours routiers, une limitation de la vitesse, une prévention de l’alcoolisme au volant.
Il leur faudra attendre 1965 pour voir naître les SMUR, précurseur des SAMU, et 1973 pour une limitation de la vitesse à 100 km/h (qui remontera à 140 quelques mois plus tard avant de se stabiliser aux limites actuelles en 1974). L’auteur s’attache à rendre hommage aux médecins qui ont fait progresser les secours : Paul Bourret, Maurice Cara, Louis Serre, Louis Lareng, Pierre Jolis, etc., ainsi qu’à Claude Tarrière et Claude Got, dont les travaux en accidentologie auront notamment pour effet l’obligation du port de la ceinture en 1979.
Ce n’est qu’en 1972 que sera nommé un M. Sécurité Routière. Le nombre de victimes a dépassé les 15 000 pour la première fois en 1970 pour cumuler à 16 600 en 1972. Dès lors, on est sur la bonne voie mais les progrès sont lents. En 2002, le président Chirac en fait une priorité (il y a encore 8000 morts) et prend les grands moyens : permis à point, installation de radars, et... Il s’ensuit une baisse pendant 7 ans avec une remontée en 2009 à 4 400 morts. Preuve, sans doute, que ce sentiment de puissance au volant identifié par les psychiatres dès les années 1930, est toujours source de danger.
*Préface de Jacques Chirac, Édition Heures de France (www. heuresdefrance.com), 18 euros.
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