LE QUOTIDIEN : Alors que l'épidémie de Covid-19 connaît une nette reprise, quelles leçons tirez-vous de la première vague ?
VINCENT PRÉVOTEAU : Lors de la première vague, on a appris en marchant et on s'est adapté très vite à la situation. Elle nous a montré qu'il fallait que tous les acteurs soient mobilisés. Nous retenons d'abord qu'il est impératif de faire respecter les précautions et les gestes barrières pour éviter une flambée du virus. Mais le vrai enseignement, c'est la fluidité. Chez moi à Rodez, nous avons très rapidement mis en place une plateforme d'appui composée d'infectiologues, de gériatres, de médecins hygiénistes destinée à accompagner toutes les structures et en particulier le secteur médico-social pendant la crise. Au niveau de la prise en charge des patients, la fluidité consiste, suivant l'état clinique, à permettre un accueil dans des structures dédiées afin d'éviter l'embolisation et pouvoir continuer à prendre en charge les malades hors Covid. À l'heure de la deuxième vague, un certain nombre d'incertitudes ont disparu. En mars, nous avons déstructuré l'hôpital et déprogrammé massivement. Aujourd'hui, on veut éviter cela au maximum. On est préparés, on est mobilisés, on a l'expérience.
Les accords du Ségur ont été signés en juillet. Sont-ils à même de calmer la grogne sociale à l'hôpital ?
Nous avons salué les accords du Ségur de la santé. On avait déjà appelé à ces revalorisations de carrières. C'est un point extrêmement important. Le recrutement aussi est essentiel pour asseoir une stabilité des équipes. Nous nous félicitons aussi du desserrement de l'étau budgétaire. Nous laisser des marges de manœuvre permet d'assouplir le fonctionnement d'un hôpital. Le desserrement de l'ONDAM [dépenses de santé annuelles, NDLR] et le soutien à l'investissement sont des moteurs pour redynamiser l'hôpital. Maintenant nous attendons la mise en œuvre concrète de ces mesures. Un autre point crucial repose sur la gouvernance de proximité, proposée notamment par le rapport Claris et à laquelle nous souscrivons totalement. L'ADH y est très attachée. Il est fondamental d'avoir une gouvernance équilibrée et au plus près du terrain.
Etes-vous prêt à accompagner une plus grande médicalisation de la gouvernance ?
Aujourd'hui, cette médicalisation est réelle. Derrière tous les projets que l'on porte, il y a des enjeux de santé publique. Quand un cardiologue ou un médecin nucléaire demande une nouvelle caméra ou un scanner, on est dans une décision qui relève du médical. Il faut retrouver une capacité de choix au plus près du terrain.
Il peut y avoir des incompréhensions avec les médecins. Car nous avons une réalité qui est la contrainte budgétaire. Mais avec le desserrement de l'ONDAM, on va pouvoir irriguer le terrain. On va aller voir les chefs de pôles pour leur demander quels projets ils souhaitent mettre en place. La délégation au niveau des pôles, notamment d'enveloppes, nécessite du temps mais elle est justifiée. Au quotidien, c'est quelque chose qui existe déjà. À Rodez, le projet médical est un mélange, une synergie entre les projets de pôles et un projet institutionnel. L'ADH est complètement en phase avec cette notion de coconstruction. Tous les acteurs de l'hôpital sont pleinement engagés. Il faut aussi que les soignants aient leur mot à dire. L'hôpital doit être réenchanté.
Le déploiement des groupements hospitaliers de territoire (GHT) faisait partie de vos priorités lors de votre élection à la tête de l'ADH. Où en êtes-vous ?
C'est à géométrie variable. Il y a peut-être des GHT qui nécessitent une révision de leur périmètre. Certains retours que nous recevons font état d'un éloignement trop grand entre établissements ou des problèmes de frontières entre GHT. Il faut des logiques de territoire et une bonne appréciation des réalités locales. Mais nous restons convaincus que lorsque le périmètre est le bon et que les projets sont identifiés, les GHT méritent d'être renforcés. La majorité des GHT apportent une meilleure intégration qu'il faut encourager.
Revalorisation des astreintes : les praticiens hospitaliers maintiennent la pression
Praticiens diplômés hors UE
Les Padhue à nouveau dans la rue
Investissement en santé : malgré l’urgence, pourquoi ça coince encore
Suicides de soignants à l’hôpital : Vautrin, Borne et Neuder visés par une plainte, ainsi que l’AP-HP