Les négociations conventionnelles qui vont s'ouvrir à compter du 16 septembre s'annoncent âpres. Lors de l'université d'été de la CSMF, organisée le week-end dernier à Antibes Juan-les-Pins (Alpes-Maritimes), le ministre de la Santé et le nouveau directeur général de l'Assurance maladie, Thomas Fatome, n'ont en effet pas retouché d'un iota leur feuille de route. Tous deux ont rappelé leur souhait d'aboutir à un accord conventionnel qui renforcerait la coordination des soins avec le déploiement de communautés professionnelles territoriales de santé (ce point fera l'objet d'une négociation interprofessionnelle). Ils souhaitent que la profession s'engage à répondre à toutes les demandes de soins non programmés, veulent accélérer la télémédecine et ont évoqué un coup de pouce tarifaire à quelques spécialités cliniques en difficulté (psychiatres, pédiatres et gynécologues médicaux).
Des syndicats remontés !
Mais la revalorisation des consultations réclamée à cor et à cri par les médecins libéraux ne figure clairement pas – sans surprise – parmi leurs priorités. Le ministre de la Santé a tout bonnement éludé la question, samedi dernier, pendant son échange d'une heure via Skype avec les médecins de la CSMF. Après un Ségur de la santé qui a apporté des revalorisations massives à l'hopital, le Dr Jean-Paul Ortiz a pourtant prévenu : en l'absence d'avancées tarifaires possibles dans le prochain avenant conventionnel, il ne pourra pas y avoir d'accord. « Rien n'a été fait à ce jour pour la médecine libérale, a asséné le président de la confédération. On ne comprendrait pas que les uns [à l'hôpital, NDLR] aient eu des dizaines de milliards d'euros et que les autres n'aient que trois cacahuètes. » Il est fort probable pourtant que les médecins aient peu à se mettre sous la dent. Déçu du caractère dogmatique des orientations proposées par le ministère de la Santé, le SML regrette que les pouvoirs publics souhaitent financer les structures (CPTS, MSP, ESP…) plutôt que les actes médicaux. «Écarter d'emblée la rémunération directe est une erreur », affirme le syndicat présidé par le Dr Philippe Vermesch, qui refuse de voir « glisser la médecine libérale dans un système étatique et de capitation. »
À la FMF, la revalorisation des actes est aussi une priorité « pour se rapprocher des tarifs européens de consultation ». « On ne peut pas continuer à bloquer nos tarifs alors que le coût de fonctionnement des cabinets augmente », affirme sa présidente, le Dr Corinne Le Sauder, furieuse que le ministère ait évoqué la notion d'une rémunération « au service rendu », terme « choquant » qui évoque selon elle une « industrialisation de la médecine ». À MG France, on attend de connaître le montant de l'enveloppe globale allouée aux négociations. « S'il s'agit de quelques dizaines ou centaines de millions d'euros, cela ne suffira pas », met en garde son président, le Dr Jacques Battistoni. Le syndicat veut que la majoration de déplacement soit revue à la hausse et espère que « l'heure de la revalorisation de la visite est venue ». « Les généralistes ne font que 300 000 VL sur 20 millions de visites par an », observe malicieusement le Dr Battistoni.
Un directeur très avenant
Contrairement au ministre de la Santé, qui n'en avait pas touché mot, le DG de la Cnam a dit avoir pris note de la proposition de la CSMF d'une nouvelle grille tarifaire à 4 niveaux pour tous les médecins (dont les montants restent à préciser). « Ce sont des choses sur lesquelles on peut travailler, a-t-il simplement avancé, mais cela relève plus d'une convention que d'un avenant conventionnel. » Une manière de renvoyer le sujet aux calendes grecques, la future convention devant être renégociée après l'élection présidentielle du printemps 2022.
Taxé de ne privilégier que l'hôpital, Olivier Véran a rappelé que la médecine de ville n'avait pas été abandonnée au plus fort de la crise sanitaire. Il a ainsi cité la compensation des pertes de revenus de la profession liées à la baisse d'activité et la prise en charge à 100 % de la téléconsultation par l'Assurance maladie. Il a par ailleurs assuré ne pas être fermé à la reprise du remboursement de la téléconsultation téléphonique (qui a pris fin le 11 juillet dernier).
Le ministre de la Santé a assuré qu'il serait très attentif au bon déroulement des négociations et étudierait « toutes les bonnes idées » qui lui seraient remontées. Cela sera-t-il suffisant pour inciter les syndicats de médecins libéraux à s'engager dans un accord, à quelques mois des élections professionnelles ?
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