« Le nouveau zonage est une catastrophe », s’étrangle le Dr Xavier Lambertyn. Depuis la parution de la nouvelle carte en décembre, de nombreuses zones de l'Oise (passée de la région Picardie aux Hauts-de-France, ndlr) ont perdu leur qualification de zone d’intervention prioritaire (ZIP) ou de zone d’action complémentaire (ZAC).
En théorie, la diminution du nombre de ces zones dans l'Oise pourrait laisser croire à une amélioration de la démographie médicale dans le département. En effet, ces zones déficitaires en médecins sont déterminées par les agences régionales de santé (ARS) grâce à l'indicateur d'accessibilité potentielle localisée (APL). Celui-ci prend en compte le temps d'accès au praticien, le nombre de consultations de chaque médecin ou encore la demande de soins par rapport à l'âge des habitants.
Pourtant, il n'en est rien, à en croire le Dr Lambertyn, président de l'Association départementale pour l'organisation de la permanence des soins (Adops) de l'Oise. Au contraire, la situation se serait même dégradée depuis le dernier zonage. « L'Oise est très fragile », estime-t-il. Le généraliste assure ainsi devoir refuser cinq à dix patients chaque jour à son cabinet de Lachapelle-aux-Pots, ainsi que deux à trois demandes de suivi en tant que médecin traitant.
Une grève si pas de nouvelles rencontres avec l'ARS
Dans son bulletin de décembre, l’URPS-ML des Hauts-de-France s’était déjà plainte de ce nouveau zonage, soulignant que celui-ci était loin des standards nationaux. Alors que les ZIP couvrent en moyenne 18 % de la population régionale, elles n’en englobent que 8,3 % dans les Hauts-de-France. De même, les ZAC couvrent 38.4 % (dont les 8.3 % ZIP) de la région contre une moyenne de 56 % dans l’Hexagone.
À la suite de la parution du nouveau zonage, plusieurs « réunions houleuses » avec les médecins et l’ARS se sont tenues, raconte le Dr Lambertyn. « Ils nous ont dit qu’ils ne comprenaient pas non plus mais qu’ils ne pouvaient rien faire, que c'est la faute du ministère, explique-t-il. Je m'en fiche ! L'ARS n’a qu’à faire remonter au niveau national. » « Même les politiques du département sont montés au créneau en disant qu'ils ne comprenaient rien au zonage », ajoute le Dr Lambertyn.
« Comme personne ne bouge, nous avons envoyé un courrier à l’ARS pour la rencontrer à nouveau au sujet du zonage », confie-t-il au Généraliste. Les maisons médicales de gardes de l'Oise menacent de faire grève à partir du 15 juin « tant qu’il n’y aura pas eu un nouvel état des lieux sérieux de l’offre de soins sur l’Oise ».
Les gardes ne sont plus défiscalisées
Car la perte du statut de ZAC ou de ZIP pourrait avoir de lourdes conséquences sur le volontariat (l'Oise compte actuellement 240 volontaires, ndlr) dans certains secteurs de garde puisque les effecteurs ne bénéficient plus de la défiscalisation des majorations et de leur forfait d'astreinte. Le Dr Lambertyn plaide d'ailleurs en faveur d'une défiscalisation de toutes les gardes en France, une proposition formulée lors des premières assises de la PDS, auxquelles il a participé.
Les zones étant devenues « blanches » ne peuvent également plus accueillir les signataires d'un CESP (contrat d'engagement de service public). Une étudiante en 6e année de médecine ayant paraphé l’un de ces contrats incitatifs souhaitant faire un stage chez le Dr Lambertyn et qui envisageait de s’associer avec lui au sortir de son internat ne pourra ainsi finalement plus le faire avec ce nouveau zonage. « Les jeunes ne vont plus être intéressés par une installation chez nous alors qu'on croule sous le travail », regrette-t-il.
Jusqu’à quatre fois plus d’antibiotiques prescrits quand le patient est demandeur
Face au casse-tête des déplacements, les médecins franciliens s’adaptent
« Des endroits où on n’intervient plus » : l’alerte de SOS Médecins à la veille de la mobilisation contre les violences
Renoncement aux soins : une femme sur deux sacrifie son suivi gynécologique