Face à la « prise en charge catastrophique » des patients en santé mentale, un rapport parlementaire dévoilé mercredi appelle à « sortir enfin la psychiatrie de l'hôpital » en « redéployant 80 % » du personnel de cette filière « au bord de l'implosion » vers la ville « à l'horizon 2030 ».
« Retard au diagnostic beaucoup trop important », « sur-occupation des lits » de psychiatrie représentant un « fléau pour les patients comme pour les soignants », recours croissant « à l'hospitalisation sans consentement »… L'organisation territoriale de la psychiatrie est « tout à la fois inefficiente et inefficace », estiment les deux auteures du rapport : Martine Wonner (LREM), députée du Bas-Rhin et psychiatre et Caroline Fiat (LFI), députée de Meurthe-et-Moselle et aide-soignante.
Le nombre de lits d'hospitalisation en psychiatrie par habitant a diminué de moitié depuis les années 1990, rappelle le rapport. Mais les structures qui se sont développées parallèlement en ville « ne permettent pas de répondre à la demande croissante » de soins, les centres médicopsychologiques (CMP) étant « partout saturés » tandis que « le premier rendez-vous avec un psychiatre peut atteindre trois mois, et parfois bien plus ». Conséquence, « les patients n'ont d'autre solution que les urgences, puis d'être hospitalisés, alors que la crise aurait pu être évitée ».
20 à 30 % des consultations chez le généraliste
Les rapporteures de la mission parlementaire insistent également sur le rôle du médecin généraliste dans la prise en charge des troubles psychiques. Ce motif de consultation concernerait 20 à 30 % des consultations de médecine générale selon les députés. « Les médecins généralistes, qui sont souvent le premier recours dans la prise en charge des troubles psychiques, sont bien peu armés pour les repérer et les prendre en charge et orienter leurs patients dans le labyrinthe de la psychiatrie », constatent Martine Wonner et Carolie Fiat.
Une meilleure formation des médecins généralistes est donc nécessaire selon les députés, notamment pour développer la prise en charge de premier recours dans les territoires. « Il convient de mieux accompagner les médecins généralistes dans des dispositifs de soins partagés avec les soignants, les psychologues, d'autres professionnels qui sont sur le territoire de santé mentale, a estimé Martine Wonner lors de la présentation du rapport aux professionnels de santé. On n'a pas besoin d'avoir des psychiatres à côté de chaque patient. D'autres professionnels de santé peuvent intervenir en première ligne et dans un vrai travail de collaboration. »
Des moyens nécessaires sur les structures extra-hospitalières
Les réponses aux dysfonctionnements de la psychiatrie en France se trouvent donc en ville et pas à l'hôpital selon les deux auteures même « si les revendications des personnels hospitaliers en faveur de plus de lits sont parfaitement compréhensibles », jugent-elles. « Il est urgent de déployer des moyens importants sur les structures extra-hospitalières, qu'elles soient sanitaires, sociales ou médico-sociales », font-elles valoir, plaidant pour « le développement massif d'équipes mobiles sur l'ensemble du territoire mais aussi de structures d'amont et d'aval ».
Les députées proposent en outre la création d'une agence nationale en charge des politiques de santé mentale sur le modèle de l'Institut national du cancer. En réponse à la crise du secteur, la ministre de la Santé Agnès Buzyn avait nommé en avril le Pr Frank Bellivier, délégué ministériel à la santé mentale et à la psychiatrie mais les députées souhaitent un « pilotage interministériel ». Le projet de budget de la Sécurité sociale pour 2020, dont la présentation est prévue fin septembre, devrait par ailleurs amorcer la « refonte » du financement de la psychiatrie.
(Avec AFP)
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