Au 1er janvier 2024, le nombre de médecins en activité totale, régulière ou intermittente est de 237 300, soit une hausse « modeste » mais « significative » de + 1,4 % en un an. Cela représente un effectif de 3 272 médecins supplémentaires.
Selon le Dr Jean-Marcel Mourgues, vice-président du conseil national de l’Ordre des médecins qui s’exprime en préambule du dernier Atlas de la démographie médicale de l’instance, publié en ligne mercredi 2 octobre, cette croissance se confirme également pour les médecins en activité régulière* : + 0,8 %, soit 1 672 praticiens en plus pour un total de 199 089.
Cette ascension, qui devrait rester « modérée avant de s'accélérer dans les années à venir », reste néanmoins « moins rapide » que celles des retraités actifs (+ 6,6 % ) et intermittents (+ 1,6 %) au cours de l’année 2023.
L’effectif de généralistes en baisse de 2 %
Par ailleurs, la répartition entre les médecins généralistes et les autres spécialistes continue à se dégrader au profit des seconds qui représentent désormais 57,2 % des médecins en activité (44,9 % de spécialistes médicaux et 12,3 % de chirurgiens) contre 42,7 % pour les généralistes (versus 48 % en 2010). Au cours de ces 14 dernières années, l’effectif de généralistes en activité a diminué de – 2 %, due en grande partie aux départs à la retraite et au faible renouvellement générationnel. Cette perte perturbe largement l'accès de la population aux médecins traitants.
Le salariat de plus en plus attractif
Le salariat (médecins hospitaliers, scolaires, en centres de santé, etc.) continue de progresser. Nous sommes passés de 41,9 % en 2010 contre 48,7 % en 2024, détrônant ainsi l’activité libérale.
Néanmoins, l’activité libérale exclusive reste toutefois le mode d’exercice privilégié des généralistes (56,5 %) et des spécialistes chirurgicaux (44,6 %) en 2024. Selon l’Atlas, la proportion de salariés parmi les médecins en activité est supérieure à 50 % dans 21 départements, pour toutes les spécialités confondues. En revanche, pour les généralistes, le salariat est le mode d’exercice majoritaire dans… cinq départements et « ce ne sont que des territoires ultramarins », peut-on lire dans l’Atlas.
Autre évolution déjà identifiée depuis plusieurs années, la féminisation de la profession. Selon le Cnom, cette progression est variable selon les départements, dépassant par exemple 55 % dans les Hauts-de-Seine, l’Isère, la Loire Atlantique, où ces derniers dépassent les 55 %. À l’inverse, dans d’autres départements, comme la Nièvre, l’Aisne ou encore certains territoires ultramarins (Wallis et Futuna et Saint-Pierre et Miquelon), les taux de féminisation sont les plus faibles.
Une installation des jeunes caractérisée
Enfin comme observé l’an passé, la profession continue également à rajeunir. L’âge moyen des médecins en activité régulière est de 48,1 ans contre 50,2 ans en 2010. La proportion des moins de 40 ans passe de 16,4 % en 2010 à 29,6 % en 2024, soit une augmentation de 13,2 points en 14 ans. La proportion des 60 ans et plus est aussi en hausse et reste plus nombreuse que les moins de 40 ans.
En observant l’âge moyen des médecins en activité par département au 1er janvier 2024, l’Ordre confirme que les départements les plus âgés sont l’Indre, le Cher ou encore l’Yonne. À l’inverse, les départements les plus jeunes se situent principalement au nord-ouest de la métropole, à proximité de la façade Atlantique (Finistère, Loire Atlantique, Maine et Loire… ). « Une diagonale s’étendant du nord-est au sud-ouest de la métropole, suivant ainsi la fameuse “diagonale du vide” », note l’ordre.
Les disparités régionales s’aggravent
Si la densité médicale augmente très légèrement, à 296,4 médecins en activité régulière pour 100 000 habitants (contre 294,7 en 2023), le Cnom observe « un contraste » qui se dessine entre les régions du sud de la métropole et l’Île-de-France et les régions du Nord du territoire. Trois régions sont particulièrement dotées en médecins : Provence-Alpes-Côte d’Azur ( 422,7), île-de-France (387 )et la Réunion (381,8). À l’inverse, la Guyane (255,7), le Centre-Val de Loire (260,2) ainsi que la Normandie (308,4) présentent les densités les plus faibles. Mais ces données cachent aussi d’autres disparités. Par exemple, l’Île-de-France est la mieux dotée chez les spécialistes médicaux et chirurgicaux mais compte parmi les plus faibles densités chez les généralistes.
Autre point inquiétant relevé par le Dr Jean-Marcel Mourgues, « les départements hospitalo-universitaires voient leurs effectifs de médecins augmenter et rajeunir (à quelques exceptions près), tandis que les régions périphériques, où la population est plus âgée, subissent une diminution des effectifs médicaux et un vieillissement de leurs praticiens ».
En observant les densités uniquement sur la population de 65 ans et plus, c’est-à-dire celle qui est la plus consommatrice de soins, le Cnom identifie des inégalités territoriales saillantes par rapport à l’offre de soins.
Ainsi, les départements présentant les densités médicales les plus faibles en termes de nombre de médecins en activité pour 100 000 habitants de 65 ans et plus sont la Creuse (688,1), l’Indre (698,7) et la Nièvre (731,3). Là aussi, une « diagonale » s’étendant du nord-est au sud-ouest de la métropole se dessine dans les départements les moins dotés en médecins en activité. À l’inverse, les départements les plus densément peuplés présentent les densités les plus fortes : Paris (5 151,8), Rhône (2 805) ou encore le Val-de-Marne (2 603,8). « Le constat reste le même pour chacun des trois groupes de spécialités », observe l’Ordre.
* Par convention, le CNOM utilise la notion d’activité régulière en référence à l’activité qualifiée de pleine par les médecins (hors activité intermittente, sans condition de cumul emploi-retraite).
Les médecins à diplôme étranger, une solution aux déserts médicaux ?
Au 1er janvier 2024, l’Ordre a enregistré 27 894 médecins en activité régulière à diplôme étranger, soit une variation de + 95,4 % par rapport à 2010 (14 274). Parmi les médecins en activité, 21 % sont des spécialistes chirurgicaux, 17,4 % des spécialistes médicaux et 6,1 % des généralistes. Quel est le pays d’origine du diplôme ? Au sein de l’Union européenne (UE), ce sont la Roumanie, la Belgique et l’Italie et en dehors de l’UE, l’Algérie, la Tunisie et la Syrie. Par ailleurs, ces médecins en activité à diplôme étranger s’installent davantage dans les départements qui présentent les plus faibles densités médicales de médecins en activité.
Alors face aux difficultés d’accès aux soins, l’appel à des nouveaux flux d’entrées constitués par les médecins diplômés à l’étranger pourrait-il être une nouvelle réponse, encore peu mobilisée en France par rapport à d’autres pays ? Pour le savoir, le Cnom a dévoilé une enquête menée avec l'Irdes sur « l’efficacité des recrutements de médecins à diplôme étrangers dans la réduction des disparités d’offre de soins ». Résultat : leur présence permet de combler la raréfaction de l’offre en médecine générale libérale dans les zones sous-dotées. « La probabilité d’installation et de maintien dans les zones les plus défavorisées est plus importante chez les médecins généralistes libéraux diplômés à l’étranger que chez ceux diplômés en France », écrit l’Ordre.
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