Parfois confrontées à des médecins discriminants, les personnes LGBTI (lesbiennes, gays, bis, trans et intersexes), ont créé leurs propres réseaux pour trouver des professionnels de santé bienveillants. Plus de la moitié des personnes LGBTI se sont déjà senties discriminées par un professionnel de santé, selon une étude parue en janvier 2018 qui s'est focalisée sur la cancérologie, la santé des mineurs et la bariatrie. Des annuaires informels de médecins sensibilisés ont fleuri sur Internet ces dernières années, certains praticiens sont recommandés par les associations, le bouche-à-oreille étant également très efficace pour obtenir le nom de médecins "gay-friendly" ou "transfriendly".
« C'est important pour nous de savoir qu'il y a des médecins qui nous respectent dans notre identité et ne vont pas forcément nous voir comme une bête de foire », témoigne Fleur Dupuy, jeune femme trans et lesbienne de 22 ans qui a pu trouver un endocrinologue grâce à la Base de données trans : BDDTrans.
« Du point de vue d'une personne trans, un médecin +safe+ (sûr, ndlr) va respecter mon genre, mon identité. Il va m'informer des différents traitements mais ne va pas m'en imposer », ajoute l'étudiante en sociologie qui a commencé sa transition médicale il y a un an.
« Quand on va voir son médecin il faut qu'on puisse tout lui dire. On ne peut pas être bien soigné si on lui cache des choses », estime Stéphane Cola, coordinateur du site medecins-gay-friendly qui recense 450 médecins « sensibilisés aux questions de genre et d'orientation sexuelle ».
Lui-même victime d'un médecin qui a dévoilé son homosexualité à ses parents il y a plusieurs années, il raconte qu'il « ne se passe pas un jour sans qu'on ne soit conforté dans l'idée que ce réseau est légitime et indispensable ». Pour lui, le principal risque est que les personnes LGBTI arrêtent de se soigner.
« Le médecin le plus demandé est le généraliste, arrive en deuxième position le psy », précise Stéphane Cola.
Liste blanche
Être face à un médecin "bienveillant" et "sensibilisé" peut aussi changer une vie. Barbara Rickenmann et son épouse ont choisi de faire une PMA à l'étranger grâce à un gynécologue qui leur a dit qu'il accepterait de les suivre et leur a conseillé une clinique à Barcelone.
Rassurée par ce gynécologue, elle a créé une "fiche" sur Gynandco afin de le recommander à d'autres lesbiennes. Ce site répertorie des professionnels de santé « féministes », mais également « lesbian-friendly », « gay-friendly » ou encore « transfriendly » (sensibilisés aux thématiques liées aux lesbiennes, aux gays et aux trans, ndlr), alimenté par les commentaires de patients.
« Possibilité d'aborder la question de la transition sans tabou, pas de questions déplacées sur mon état civil ni sur les opérations génitales désirées ou non, effectuées ou non. Très à l'écoute et compréhensif sur mon souhait de garder mon utérus et mes ovaires », témoigne par exemple un patient sous la "fiche" d'un gynécologue.
Les associations de défense des personnes LGBTI jouent également un rôle essentiel dans la mise en relation avec des praticiens de santé.
Stop Homophobie est partenaire de médecins-gay-friendly, SOS Homophobie renvoie régulièrement vers l'association Psygay, alors que l'association Ouest Trans, le Centre LGBTI de Rennes et le Planning Familial d'Ille-et-Villaine font partie du réseau santé trans qui met en lien professionnels de santé et personnes trans.
« On est en train de dresser une liste blanche » qui pour l'heure est « relativement maigre », indique de son côté le Collectif Intersexes et Allié.e.s qui reproche une méconnaissance et une pathologisation de l'intersexuation, soit le fait de posséder, à la naissance, des caractéristiques sexuelles aussi bien féminines que masculines.
Pour beaucoup de personnes LGBTI, le « bouche-à-oreille » reste la manière la plus sûre de trouver un médecin. « C'est le premier réseau safe », estime Fleur, qui a pu trouver un psychologue grâce aux recommandations d'amis.
Avec AFP
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