Des montants financiers en progression mais des résultats cliniques hétérogènes. Plus de dix ans après sa création (et un an avant sa disparition sous cette forme), la rémunération sur objectifs de santé publique (Rosp médecin traitant de l’adulte) s’affiche en hausse de 3,4 % au titre de 2024 pour atteindre une prime moyenne de 5 361 euros par généraliste concerné, mais sans cocher toutes les bonnes cases de santé publique, loin s’en faut.
Le bilan financier en hausse s’explique par des résultats de santé publique correctement positionnés. Selon la Cnam, pour 2024, la majorité des indicateurs cliniques de la Rosp, au titre de la patientèle adulte, sont orientés « positivement ». Toutefois, à y regarder de plus près, l’évolution des objectifs demeure « contrastée », avec des résultats médiocres sur plusieurs indicateurs clés en matière de dépistages organisés des cancers et de prévention.
Pathologies chroniques : bons résultats sur le diabète
L’incitation des généralistes à bien suivre les patients chroniques (diabète, HTA et risque cardiovasculaire) a porté ses fruits en 2024. Ainsi, la progression des trois indicateurs pour le diabète illustre une solide implication des médecins avec + 1,6 point pour le fond d’œil (soit 72,2 % des patients concernés et « 41 % des médecins qui ont dépassé l’objectif cible »), + 0,4 point pour les dosages d’HbA1C et + 1,5 point pour le dépistage de la maladie rénale chronique chez le diabétique.
La même tendance haussière s’observe pour le dépistage de la maladie rénale chronique chez les patients hypertendus : + 1,7 point, soit plus de 430 000 patients supplémentaires dépistés sur un an.
Et s’agissant du suivi des patients à risque cardiovasculaire, les indicateurs sont stables pour la prévention secondaire (+ 0,4 point) mais en recul (- 1,5 point) pour la surveillance d’un traitement par antivitamine K.
Efficience : bond de la prescription des statines dans le répertoire
Autre bilan encourageant : l’efficience des prescriptions, volet clé pour la maîtrise des dépenses et la bonne allocation des ressources de l’Assurance-maladie. « Les indicateurs sont majoritairement bien orientés sur l’année », salue la Cnam. De fait, les médecins prescrivent davantage de statines dans le répertoire des génériques : + 7,4 points, l’indicateur retrouvant le niveau de 2020, avec un seuil très élevé (> 95 %) et les trois quarts des médecins libéraux se situant au-dessus de l’objectif cible. Les prescriptions dans le répertoire progressent également pour les anti-hypertenseurs et autres traitements (respectivement + 1,2 point et + 0,6 point), soit 2,1 millions et 20,8 millions de boîtes prescrites en plus dans le répertoire.
Enfin, la prescription de biosimilaires de l’insuline glargine poursuit sa croissance avec 4,3 points sur la seule année 2024. Sur cinq ans, la prescription de biosimilaires est passée de 19,7 % à 48,5 %.
L’indicateur sur les hormonémies thyroïdiennes (dosage TSH dans l’année) est lui aussi bien orienté (+ 1,7 point), alors que ceux relatifs aux prescriptions d’IPP, de traitements par antiagrégants plaquettaires ou de traitements par metformine sont « stables », relève la Cnam.
Vaccination en berne
Mais comme les années précédentes, les résultats en matière de prévention restent mitigés, voire décevants, avec des indicateurs qui stagnent ou reculent. Cela illustre « la complexité à faire évoluer positivement ces comportements sur le long terme, malgré la mobilisation des pouvoirs publics et des professionnels de santé », admet la Cnam.
Ainsi, concernant la vaccination antigrippale, les deux indicateurs (+ 65 ans et sujets à risque) poursuivent leur baisse, après une forte hausse constatée en 2020 pendant la pandémie. Le critère portant sur les plus de 65 ans se situe même à un niveau inférieur à celui d’avant la crise sanitaire (54,3 % versus 56,4 %), tandis que la vaccination du sujet à risque chute à 25,2 % (- 3,7 points sur 2024). « L’intégration de nouvelles pathologies dans les publics cibles de la campagne de vaccination a pu impacter ce résultat à la baisse, ces nouvelles populations n’ayant jamais reçu d’invitation à se vacciner contre la grippe auparavant », explique la Cnam.
En matière de dépistage des cancers, le bilan est aussi moyen. Les indicateurs sont stables pour le cancer du sein (+ 0,2 point) et colorectal (+ 0,8 point) tandis que le dépistage du cancer du col est en recul (- 2,7 points).
Ces résultats en demi-teinte s’observent aussi pour la prévention de la iatrogénie médicamenteuse. De fait, « 4,2 % des patients âgés ont reçu un traitement par psychotropes (objectif décroissant) et 45 % des médecins généralistes sont au-dessus de l’objectif cible », souligne la Cnam.
L’Assurance-maladie déplore aussi une légère dégradation sur l’indicateur de traitement par antibiothérapie sur les 16-65 ans (+ 1 point alors qu’il s’agit d’un objectif décroissant). Résultat positif : la lutte contre l’antibiorésistance semble porter ses fruits car l’objectif là aussi décroissant s’affiche bien en baisse de 0,6 point, soit 200 000 patients traités en moins sur l’année.

Encore en vigueur en 2025, la Rosp, critiquée par la profession et dont la Cnam reconnaît certaines limites, a vocation a être remplacée dès 2026 par un forfait unique médecin traitant (FMT, qui intégrera les majorations prévention) tandis qu’une nouvelle dotation numérique se substituera au forfait structure. Ce forfait médecin traitant unique s’appuiera sur une logique individualisée, avec des majorations versées par patient suivi selon le niveau d’atteinte d’indicateurs de santé publique resserrés (15 au lieu de 27 aujourd’hui).
Cardios, gastros, endocrinos : résultats satisfaisants
Dans son bilan annuel, la Cnam publie les résultats cliniques des autres spécialités qui bénéficient de la Rosp.
Chez les cardiologues, une large majorité d’indicateurs cliniques vont dans le bon sens (prescription de statines dans le répertoire, suivi de l’insuffisance cardiaque, surveillance biologique sous trithérapie anti-HTA, traitement par antiagrégant plaquettaire). L’indicateur sur le traitement post-infarctus du myocarde est cependant en repli (- 0,6 point).
Chez les gastro-entérologues, les tendances sont stables (patients en post-chirurgie du cancer colorectal, imagerie), voire en légère baisse en matière de prévention.
Enfin, le bilan des endocrinologues est bien orienté (soins de podologie chez le diabétique, efficience des prescriptions dans le diabète), à l’exception de l’indicateur relatif aux dosages de la thyroglobuline et des anticorps anti-thyroglobuline (- 1,3 point).
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