Un nouveau cap vient d’être franchi par l’association Soins aux professionnels de la santé (SPS). Sa plateforme d’écoute anonyme et gratuite* a reçu 7 005 appels en un an (+ 16 %). En 2024, 479 appels proviennent de médecins contre 338 en 2023, soit une augmentation de 42 %.
Cette hausse globale est « plurifactorielle », explique Catherine Cornibert, directrice générale de SPS. « Les violences vécues au travail et dans la vie personnelle ont des conséquences sur la santé et sur les équipes. Notre numéro vert est également plus connu grâce aux partenaires comme les CPTS », ajoute-t-elle.
Au global, près de 70 % des appelants sont des femmes, salariées et étudiantes et 80 % sont salariés (7 % libéraux). Un peu plus de la moitié des appels (57 %) est issue du secteur paramédical, 17 % du médical et 7 % du médico-social. Les trois professions les plus représentées sont les infirmiers (25 %), les aides-soignants (17 %) et les médecins (14 %).
Le nombre d’appels, tout public confondu, a progressé dans toutes les régions. Les plus fortes hausses sont enregistrées en Bourgogne-Franche-Comté (+ 59 %), en Normandie (+47 %) et dans le Grand Est (+ 34 %), avec des taux qui explosent en Martinique (+ 200 %). A contrario, ils sont en baisse en Nouvelle Aquitaine (-16 %) et en Corse (-31 %). L’Île-de-France concentre néanmoins le plus d’appelants (une demande sur trois au total).
Des motifs personnels en premier
Autre tendance marquante : pour la première fois, dans toutes les régions, les motifs de demande d’aide concernant des problèmes relatifs à des situations personnelles (raisons familiales, problèmes de santé, etc.) ont dépassé les raisons professionnelles (épuisement, conflit avec les collègues et démotivation, etc.). En 2024, 67 % des appels sont passés pour motifs personnels (+ 10 points en un an) contre 18 % de raisons professionnelles (- 3 points).
Comment expliquer ce phénomène ? « Cela reflète peut-être une amélioration des conditions de travail, de la qualité au travail grâce aux efforts entrepris par les employeurs, les DRH et les CPTS qui encadrent les libéraux sur un terrain, estime Catherine Cornibert. Par contre, le problème environnemental, la politique, la menace de la guerre ont un impact sur la santé individuelle. Les soignants ne parviennent pas à se ressourcer lorsqu’ils arrivent chez eux. » Concernant les étudiants, l’ancienne pharmacienne a aussi une explication : « Les étudiants sont peut-être moins malmenés pendant leurs stages, mais par leur isolement, leurs mauvaises activités physiques, des problèmes alimentaires, leur santé est fortement touchée. »
Des appels plus longs et nocturnes
Autre évolution importante du bilan : la durée des appels, de 29 minutes en moyenne, s’est prolongée par rapport à 2023. 8 % se sont prolongés au-delà de 60 minutes. Un appel sur trois a lieu la nuit. Six appels ont relevé d’une situation d’urgence (risque de passage à l’acte imminent) dont la moitié a émané des professionnels de santé et l’autre d’étudiants.
Près de 70 % des appels ont fait l’objet d’une réorientation, vers un psychologue en face-à-face pour environ un tiers d’entre eux, vers les services ou structures en lien avec le travail (ressources humaines, manager, médecin du travail, instances représentatives du personnel, 9 %), vers le médecin traitant (8 %) et vers le psychiatre (7 %).
Forte de ce bilan, l’association SPS prévoit de lancer une nouvelle campagne de sensibilisation sur la santé des soignants ainsi que des ateliers de management et de sensibilisation personnelle avec des questionnaires d’autoévaluation. « Une mauvaise organisation, l’insécurité, la violence des patients peuvent être sources de souffrance pour le médecin ou l’infirmier. Chacun doit pouvoir évaluer sa propre santé pour ne pas sombrer », conclut Catherine Cornibert.
Depuis la création du numéro vert SPS en novembre 2016, la plateforme a enregistré 35 000 appels.
* 0 805 23 23 36, numéro vert 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7
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