Il en faut 400 et tout de suite ! C’est le nombre de centres de santé que le géographe de la santé, Emmanuel Vigneron (photo), propose de créer sur le territoire français pour répondre à l’offre de soins de premier recours défaillante dans certaines zones. Pour la première fois, son ouvrage, intitulé « Les centres de santé : une géographie rétro prospective », recense la totalité du nombre de centres de santé en France ainsi que leur répartition. On apprend, par exemple, que ce calcul n’a pas été simple à réaliser car aucune étude jusqu’alors n’avait permis de précisément définir leur nombre. En 2013, les auteurs du rapport de l’IGAS sur les centres de santé, eux-mêmes, le soulignaient, évoquant que la mission de « comptage des centres de santé (...) s’est cependant heurtée à d’importantes difficultés… », aucune des bases de données « ne donnant les mêmes chiffres ».
[[asset:image:3641 {"mode":"small","align":"left","field_asset_image_copyright":["Marc Mesplie"],"field_asset_image_description":[]}]]1 842 centres à ce jour
Cette première difficulté franchie, le Pr Vigneron, de l’université de Montpellier, a recensé 1 842 centres de santé en France. Pas suffisant à ses yeux. Il suggère d’en concevoir au moins 400 de « toute urgence » et par la suite d’en créer « beaucoup plus ». « Comme l’avait fait en 2008 l’ancienne ministre de la Santé, Roselyne Bachelot, en lançant un plan pour 400 maisons de santé, on pourrait annoncer la même chose pour les centres de santé ». Et, dans son esprit, il s’agirait de créer – car il n’en existe actuellement que 483 – des centres de santé polyvalents avec des services dentaire, médical et, si possible, infirmier.
L’ouvrage va même plus loin, en précisant sur quels territoires il faudrait les implanter. À commencer par les centres de soins infirmiers – principalement dans les campagnes pour des raisons historiques – qui pourraient servir d’appui à la création de ces nouveaux centres de santé polyvalents. Au-delà, le géographe a également conçu une carte de France (voir ci-contre) avec l’emplacement des 398 cantons où l’installation d’un centre de santé serait à créer en priorité. Ces derniers se situent principalement dans le nord et l’ouest de la France. « 398 cantons, cela représente 10 % de la totalité des cantons, ce n’est pas rien. Les territoires périurbains qu’on appelle la France des cités ainsi que les zones rurales, mais aussi de plus en plus les petites et moyennes villes, sont des territoires où l’offre médicale en soins de premiers recours manque de plus en plus, et singulièrement à certains endroits », explique Emmanuel Vigneron.
1 000 médecins généralistes à embaucher
Ce rapport intervient après d’autres favorables au modèle des centres de santé, comme celui de l’IGAS en 2013. Suscité par la Fehap, fédération d’établissements privés à but non lucratif, il montre que les partisans d’alternatives à la médecine libérale se mobilisent. Cela pourrait inquiéter les syndicats de médecins libéraux. D’autant que le secteur commence déjà à s’étoffer. À l’instar de l’initiative prise il y a trois ans par le maire (UMP) de La Ferté-Bernard, dans la Sarthe, pour répondre à un problème de désertification médicale, plusieurs maires souhaitaient s’en inspirer pour pouvoir enfin recruter des médecins.
Les centres de santé ont-ils pour autant le vent en poupe ? Le Pr Vigneron en doute : « Le cas de La Ferté-Bernard reste un cas isolé car les freins pour créer des centres de santé sont nombreux et continuent d’exister ». Selon lui, la médiatisation a toutefois permis de faire connaître ces structures « peu connues » du grand public et des professionnels de santé. « Je crois que la crise a contribué à ce que l’on parvienne à la conclusion que finalement les centres de santé, ce n’est pas si mal ».
Plus concrètement, la création de ces 400 centres de santé nécessiterait l’embauche de 1 000 médecins généralistes, estime l’auteur. Il propose pour ce faire d’augmenter le numerus clausus et de soumettre l’obtention de ces postes supplémentaires à un engagement de l’étudiant en centres de santé. « Il y a beaucoup de gens qui échouent au concours et qui feraient d’excellents médecins », rappelle-t-il.
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