Faut-il s’attendre à un coup d’éclat de la part des syndicats médicaux ce jeudi matin, à l’occasion de la reprise des négociations conventionnelles ? Un round multilatéral déterminant est programmé de 9 h 30 à 12 h 30 dans les locaux de l’Assurance-maladie. Mais les discussions pourraient être écourtées de manière inopinée sous la pression des centrales de spécialistes libéraux, vent debout contre les arbitrages budgétaires autour des tarifs hospitaliers.
Ce mercredi, réunie en comité exécutif exceptionnel, la Fédération de l’hospitalisation privée (FHP) a décidé parallèlement – en lien avec les syndicats de médecins libéraux, dit-elle – de réagir au « choc » provoqué par l’annonce des tarifs hospitaliers 2024, en programmant « une grève totale à compter du 3 juin (sauf les activités vitales comme la dialyse) ». Elle dénonce les choix « gravissimes » de l’exécutif, qui « mettent en péril » les établissements privés – dont 60 % seraient en déficit en 2024. Or, quelque 40 000 praticiens libéraux exercent dans les cliniques…
Ainsi, la campagne tarifaire 2024 s’est invitée brutalement à la table des discussions conventionnelles, ravivant les tensions entre les secteurs. Dans la foulée des groupes de cliniques, plusieurs syndicats de médecins libéraux se sont insurgés contre l’évolution très différenciée des tarifs hospitaliers annoncés la semaine dernière par le ministère de la Santé : + 4,3 % pour le MCO dans le secteur public mais + 0,3 % pour le secteur privé lucratif, soit « près de 15 fois plus pour les hôpitaux publics », se désole un leader, à l’unisson de ses collègues joints par Le Quotidien. « En agissant ainsi, le ministère va pousser les établissements privés à choisir leurs activités, contraindre les spécialistes libéraux et, in fine, pénaliser les Français qui n'en peuvent plus des difficultés d'accès aux soins », analyse le Dr Franck Devulder, président de la CSMF. Un autre responsable syndical, qui souhaite rester anonyme, dénonce une « attaque historique » contre la médecine spécialisée libérale, dans la dernière ligne droite des négos.
Une action forte pour faire bouger les lignes
Ce mercredi, plusieurs syndicats – de l’UFML-S à Avenir Spé-Le Bloc en passant par le SML – s’interrogeaient sur la marche à suivre pour peser efficacement. Une action concertée qui les pousserait à quitter (provisoirement) la séance de négociations ? Rien n’est exclu. Joint par Le Quotidien, le Dr Philippe Cuq, coprésident d’Avenir Spé-Le Bloc, confirme que des réunions informelles devaient se tenir jusque tard dans la soirée. Son homologue, le Dr Patrick Gasser, enfonce le clou. « Je ne sais pas encore quelle sera l’importance de la mobilisation mais nous sommes plusieurs à avoir échangé avec la FHP [lobby des cliniques] et il est essentiel de faire comprendre au gouvernement, à travers une action forte, qu’il doit revoir sa copie financière pour les spécialités libérales », affirme le gastroentérologue de Nantes.
De son côté, le président de la branche spés de la CSMF, le Dr Bruno Perrouty, temporise. « Qu’il y ait une action, un coup d’éclat pour mettre la pression, je le comprends. Mais on ne peut pas saborder les négociations conventionnelles tout d’un coup pour faire plaisir aux directions des cliniques », indique le neurologue de Carpentras.
Côté MG France, on ne cachait pas « la crainte d’un clash » lors des négociations, sur fond de grève programmée des cliniques. « Si Avenir Spé-Le Bloc, qui sont des négociateurs sérieux, s’en vont, on va devoir faire comme eux…, confie le Dr Jean-Christophe Nogrette, secrétaire général adjoint du syndicat de généralistes, un brin fataliste. On ne peut pas rester seul à la table ».
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