Intégrer l’IA en médecine ? Un dilemme « faustien », jugent les cadres du SML lors de leurs journées d’été

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Publié le 13/09/2024
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Réunis ce 13 septembre pour trois jours à l’occasion de leurs journées de rentrée, les troupes du SML ont écouté avec attention les conséquences déjà présentes de l’irruption de l’intelligence artificielle (IA) dans leur pratique.

L’IA, alliée ou concurrente des médecins, était le thème central des journées de rentrée du SML

L’IA, alliée ou concurrente des médecins, était le thème central des journées de rentrée du SML

Neuf heures pile dans la salle plénière du Westotel du Pouliguen (Loire-Atlantique). Une centaine d’adhérents du Syndicat des médecins libéraux (SML) ont fait le déplacement ce vendredi 13 septembre dans cette station balnéaire qui jouxte La Baule, pour participer à ce séminaire de trois jours consacré à un thème qui, s’il ne les concerne déjà, fera sans doute demain partie intégrante de leur pratique : « Intelligence artificielle : alliée ou concurrente des médecins ? »

La première table ronde (« L’IA au service du médecin ») peut commencer. Elle se focalise sur le versant « allié » des algorithmes apprenants. Quatre intervenants spécialistes du sujet prennent la parole à tour de rôle pour exposer l’état d’avancée de leurs travaux. Stéphanie Allassonnière, professeure de mathématiques appliquées à Paris santé campus, le docteur en santé publique et cofondateur d’echOpen Mehdi Benchoufi, Stanley Durrleman, CEO de Docteur Memo, et Arnaud Féret, responsable à Doctolib des relations avec les institutions de santé.

Lancement de l’assistant de consultation

Ce dernier était venu présenter le tout nouvel outil que s’apprête à commercialiser à partir de la mi-octobre la plateforme : l’assistant de consultation. Partant du constat que près d’un tiers du temps de consultation des praticiens est consacré à entrer des informations en tapant sur le clavier de leur ordinateur, la licorne française a conçu une synthétisation de codification de la donnée. En clair, « l’ordinateur retranscrit directement dans le dossier patient les informations pertinentes qui ont trait, par exemple, à la HTA ou au diabète », explique Arnaud Féret. Plus d’un an de travaux menés auprès de 400 médecins bêta testeurs, généralistes et spécialistes, a été nécessaire pour développer cet outil.

Orientation diagnostique simplifiée

Les travaux du Dr Benchoufi portent quant à eux sur la conception d’une sonde ultraportable dédiée à l’orientation diagnostique destinée à répondre aux questions de la médecine clinique. Et permet aux médecins de dégager un premier arbre décisionnel en fonction des symptômes détectés par l’échographe téléchargeable sur leur smartphone. Pour résumer, l’outil permet, face par exemple à un patient qui se plaint de douleurs thoraciques, pulmonaires ou cardiaques de dire « est-ce grave ou pas grave et quels sont les organes touchés », développe le Dr Benchoufi, qui travaille avec l’AP-HP.

Stéphanie Allassonnière a quant à elle développé ses recherches sur la gynécologie obstétrique, notamment en collaboration avec l’hôpital Necker-Enfants malades. La mathématicienne développe l’intérêt, concret, de l’IA pour les praticiens de cette spécialité, sachant que 400 pathologies fœtales et 9 000 signes phénotypiques sont recensés. « L’intelligence artificielle est là pour aider les médecins à penser à des associations auxquelles ils n’auraient pas forcément pensé spontanément », estime-t-elle.

Face à Faust

Les participants ont-ils été convaincus par les différents exposés ? Le Dr André Corbin s’interroge. « L’intelligence artificielle sera-t-elle une alliée pour nous dans ce contexte de pénurie médicale ? Je ne le sais pas, mais ce que je constate, c’est que dans le temps d’avant, nous devions lire des examens, désormais nous devrons relire ce que nous restituent les algorithmes », s’amuse le cardiologue breton. « L’IA peut certainement apporter un plus, aussi pour les médecins généralistes et nous psychiatres », diagnostique, pour sa part le Dr Maurice Bensoussan, psychiatre et représentant des spécialistes au bureau du SML. « Vous ne nous avez présenté que les apports bénéfiques potentiels pour la médecine de ces algorithmes quasi pensants. Je ne peux cependant m’empêcher de penser que nous nous retrouvons face à un pacte quasi faustien », intervient spontanément un médecin dans la salle.

S’il faudra attendre les sessions suivantes du séminaire pour en savoir plus sur les risques et les dangers de l’IA, une chose est certaine : le sujet a suffisamment passionné les médecins pour reléguer au second plan la politique nationale et la quête d’un nouveau ministre de la Santé, toujours inachevée.


Source : lequotidiendumedecin.fr