C’est un record, enregistré cette année, dont on aurait aimé se passer. En 2013, en effet, 925 agressions ont été enregistrées par l’Observatoire pour la sécurité des médecins (ONSM), dont les deniers chiffres ont été présentés mardi. Après deux années consécutives de relative accalmie - on en relevait 798 en 2012 et 822 en 2011 - la violence à l’encontre des professionnels de santé est repartie à la hausse. Bernard Le Douarin, qui coordonne l’ONSM, parle d’une « montée de l’incivilité » et d’une « perte des repères citoyens ».
Parmi les professionnels de santé, ce sont toujours les généralistes qui restent les plus touchés par le phénomène avec 531 déclarations recensées par l’Ordre des médecins, soit 58 % de la totalité, alors qu’ils ne représentent que 46 % du corps médical. Tandis que parmi les spécialistes, les plus touchés par la violence sont, comme par le passé, les ophtalmologues, les psychiatres et les dermatologues.
Trois agressions sur quatre en ville
La médecine de ville semble de plus en plus victime de la violence : 692 déclarations (contre 619 en 2012) ont été enregistrées dans ce cadre qui représente désormais trois agressions sur quatre. La proportion d’agressions à caractère verbal dont, notamment, les injures et les menaces, est en hausse de trois points à 69 %. En revanche, les incidents potentiellement plus graves, comme les agressions physiques (mais aussi les vols ou les tentatives de vol et les actes de vandalisme) sont en légère baisse respectivement à 11 %, 21 % et 11 %.
Quelles sont les causes à l’origine de ces agressions? Si dans un acte de violence sur quatre il s’agit, selon le Dr Le Douarin, d’actes de pure incivilité, dans les trois quarts des cas l’agression est en rapport avec l’acte médical. «Il y a trois principales raisons expliquant ces agressions: le retard (du patient ou du médecin), le refus (d’un arrêt de travail, d’un certificat médical, d’une ordonnance) et le reproche (concernant la prise en charge)» explique le généraliste qui est également président du CDOM du Val-de-Marne. D’ailleurs, le reproche d’une mauvaise prise en charge arrive en tête des raisons d’agressions avec 304 cas en tout. Une proportion en significative augmentation : alors qu’en 2012, elle était à l’origine d’un quart des agressions, en 2013 elle représente une agression sur trois. Parmi les autres motifs sont souvent cités le vol (17 % des déclarations), le refus de prescription d’un médicament ou d’un AT (16 %) et un temps passé dans la salle d’attente jugé excessif (11 %).
Le Nord passe devant la Seine-Saint-Denis
Surprise. La Seine-Saint-Denis n’est plus le département le plus touché par les agressions. Cette année c’est en effet le Nord qui passe en tête en remportant la première place du triste palmarès des départements où les déclarations recensées ont été les plus nombreuses (48).
Le "9-3" enregistre néanmoins, pour sa part, 45 agressions, un chiffre stable par rapport à l’année précédente (46) mais avec une tendance à la baisse par rapport à 2011 quand 67 déclarations avaient été enregistrées. Une bonne nouvelle certes mais à relativiser vu que cette baisse pourrait être due, tout simplement, à un phénomène de désertification des banlieues… Quant à Paris, il reste le troisième département le plus touché par la violence avec un nombre d’agressions qui tend même à augmenter sur les trois dernières années (33 en 2011, 41 en 2012, 40 en 2013).
Enfin, alors que seulement 31 % des médecins victimes de violences recensées par l’ONSM ont déposé plainte en 2013 et à peine 14 % une main courante, on peut se demander combien de victimes sont restées silencieuses. Sous ce jour donc, le record de violence enregistré cette année paraît alors encore plus inquiétant. Les 925 déclarations recensées ne seraient que la pointe de l’iceberg. Même si de plus en plus de médecins se decident à briser la loi du silence, l’instantanée prise par l’Observatoire de l’Ordre reste, encore, malheureusement, bien en déça de la réalité.
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