Les statistiques des agressions subies par les médecins français continuent de grimper. Pour la première fois, la barre symbolique des 1 000 incidents déclarés à l’Ordre a été dépassée en 2017, selon les chiffres de l’Observatoire de la sécurité des médecins. Les insultes et menaces verbales sont les plus courantes, avec 62 % des signalements. 7 % des agressions ont été physiques.
Au total, le Conseil national de l’Ordre des médecins (CNOM) a enregistré 1 035 déclarations, soit une augmentation de près de 7 % par rapport à 2016. Et encore, selon le Dr Hervé Boissin, coordonnateur de l’observatoire, ces chiffres restent sous-évalués : « Environ 20 % des cas sont déclarés. » Encouragés par l’Ordre, les médecins osent pourtant de plus en plus signaler les agressions dont ils sont victimes, ce qui explique en partie l'augmentation des chiffres.
En revanche, dans plus de la moitié des cas, les praticiens ne le font qu'auprès du CNOM, et non de la police ou de la gendarmerie.
Les généralistes cibles n°1
Une nouvelle fois, les omnipraticiens ont été les premières victimes d’agressions en 2017. Ils sont à l’origine de 61 % des déclarations alors qu’ils ne représentent que 44 % des médecins en exercice. Néanmoins, la proportion de généralistes impliqués a diminué par rapport à 2016, où elle était de 65 %.
Le plus souvent, les agressions interviennent en milieu urbain, que ce soit en centre-ville (53 %) ou en banlieue (21 %). Le motif d’agression le plus cité (29 % des déclarations) est un reproche relatif à une prise en charge. Suivent le vol (22 %), le refus de prescription (14 %) et un temps d'attente jugé excessif (10 %).
Les régions où on compte le plus d'actes violents sont la Provence-Alpes-Côte d'Azur, les Hauts-de-France (avec 108 cas sur 135 recensés pour le seul département du Nord) et l'Île-de-France.
Dans 50 % des cas, l'agresseur est le patient lui-même.
Les femmes aussi
Les chiffres de 2017 préoccupent le Dr Boisson, qui déplore un manque d’intérêt du ministère de l’Intérieur pour la question de la sécurité des médecins. « On va avoir beaucoup de soucis pour obliger ou inciter nos confrères à s’installer dans des zones désertiques qui correspondent souvent à des zones de non droit », estime le coordonnateur de l’observatoire.
Le praticien s’inquiète pour ses consœurs de plus en plus visées. En 2017, la part de femmes parmi les victimes a augmenté et les agressions de la gent féminine sont désormais majoritaires, passant de 46 % des déclarations en 2016 à 51 % en 2017. « Cela devient préoccupant », reconnaît le Dr Hervé Boissin. « On ne peut pas exiger des médecins qu’ils aillent dans des zones qui sont difficiles. Dans certains quartiers, les policiers viennent à trois ou quatre. Quand le médecin s’y déplace, il est seul », souligne-t-il. « Nos consœurs auront de plus en plus de difficultés », conclut-il, fataliste.
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