La permanence des soins ambulatoires (PDSA) est un des sujets de prédilection du ministre de la Santé. Si elle reste sur la base du volontariat aujourd’hui, la menace d’un retour à l’obligation se fait de plus en plus pressante. Ce sera d’ailleurs le cas pour les internes en médecine générale dans le cadre de la future quatrième année, comme cela a été annoncé récemment.
Mais comme le montre, le rapport du conseil national de l’Ordre des médecins (Cnom) publié ce mardi 11 juillet, la PDSA regroupe des réalités très différentes selon les territoires.
Après une baisse de la participation l’année dernière, le taux de volontariat national se stabilise en 2022 (-0,02 %), il s’établit à 38,48 %. L’Ordre comptabilise ainsi 24 504 médecins volontaires sur 63 681 susceptibles de prendre une garde.
« Entre 2021 et 2022, le taux de participation à la PDSA a augmenté pour 41 % des départements, a diminué pour 38 % et est resté stable pour 17 % d’entre eux », souligne le rapport. Les écarts départementaux sont aussi très marqués avec un minimum de 7 % pour Paris (où la PDSA est quasiment intégralement professionnalisée) et un maximum de 81 % pour les Vosges et les Ardennes.
« Un taux de participation élevé ne garantit pas non plus un fonctionnement optimal de la PDSA : à l’exception de la Creuse, tous les départements bénéficiant d’un taux de participation de plus de 75 % déclarent rencontrer des difficultés de fonctionnement dans certaines zones. Parmi eux, les Vosges, l’Eure-et-Loir et le Lot qui sont soumis à des réquisitions préfectorales de manière récurrente », ajoute également le Cnom.
Un rajeunissement qui se poursuit
Concernant le profil des participants à la PDSA, ce sont majoritairement des hommes à 63 % pour la régulation et à 53 % pour l’effection. Mais la part des femmes assurant des gardes augmente continuellement ces dernières années, ce qui correspond à la féminisation de la profession. En quatre ans, elle a augmenté de 9 % en effection et 7 % en régulation. L’âge moyen des effecteurs poursuit aussi sa baisse et s’établit en 2022 à 45,8 ans. La moyenne d’âge des médecins régulateurs est quant à elle de 54,5 ans au niveau national.
Du côté des modes d’exercice, 88 % des participants à la PDSA sont des généralistes libéraux exerçant en cabinet. Les remplaçants exclusifs représentent 2 % des participants à la PDSA et ceux exerçant exclusivement en centres de santé 6 %. Près d’un quart des médecins effecteurs (24,2 %) se fait remplacer au moins une fois en 2022 sur ses gardes. La participation des médecins retraités reste minoritaire et représente une part de 2 % des médecins effecteurs remplaçants.
Toujours moins de secteurs
La tendance de réduction du nombre de secteurs se poursuit en 2022. On observe ainsi entre 2021 et 2022 une diminution de 5 % du nombre de territoires en soirées, de 1,2 % les week-ends et jours fériés, et de 0,3 % en nuit profonde.
En soirées de semaine, 5 % des territoires ne sont pas couverts par une offre ambulatoire. « Cette part de « zones blanches » est identique à l’an dernier, mais 75 % des CDOM déclarent craindre un désengagement à venir des médecins volontaires en soirées sur un ou plusieurs territoires de PDSA. Pour certains départements, c’est déjà une réalité puisque plus aucun territoire de PDSA n’est couvert sur ce créneau en Polynésie, en Guyane, dans l’Orne et le Gers », souligne le rapport.
L’enquête de l’Ordre montre aussi qu’un tiers des secteurs de PDSA étaient couverts par dix médecins volontaires ou moins en 2022, 18 % des secteurs par cinq volontaires ou moins. Une légère amélioration mais qui « peut s’expliquer par la diminution du nombre de territoires de PDSA par resectorisations, et donc de la mutualisation des médecins volontaires sur ces secteurs redécoupés », note le Cnom.
Augmentation des réquisitions
En 2022, davantage de réquisitions préfectorales ont également eu lieu. Il y en a eu dans 44 départements. Elles ont été ponctuelles dans 32 départements et récurrents dans 12 autres. « Ce bond du nombre de réquisitions par rapport aux années précédentes s’explique surtout par les grèves des médecins libéraux de décembre 2022 », note le rapport.
Par ailleurs, les maisons médicales de garde continuent de gagner du terrain puisqu’en 2022, 91 départements disposaient de ce type de structure. Au 31 décembre 2022, on dénombrait 535 sites dédiés à la PDSA sur l’ensemble du territoire, soit 34 de plus qu’en 2021, ce qui correspond à un taux de croissance 6,8 % entre 2021 et 2022. La création de sites dédiés a concerné 12 départements en 2022. « Notons que les prises en charge plus traditionnelles au cabinet du médecin traitant étaient toujours effectives pour 83 % des départements, y compris les départements non-couverts par des sites dédiés », précise le rapport. Au total, 43 % des territoires de PDSA les week-ends et jours fériés étaient couverts par un site dédié en 2022.
L’extension des horaires de la PDSA au samedi matin fait partie des revendications des médecins libéraux depuis longtemps. Sur le terrain, l’élargissement de la PDSA au samedi matin poursuit doucement son développement. En 2022, 38 départements ont déclaré que la PDSA avait été élargie au samedi pour la régulation et 15 départements pour l’effection.
Davantage de régulateurs
Côté régulation, en 2022, les médecins libéraux ont participé à la régulation médicale de la PDSA sur la quasi-totalité du territoire, à l’exception de six départements : les Ardennes, le Territoire de Belfort, la Guyane, Mayotte, la Nouvelle-Calédonie et la Polynésie Française.
Au total, ce sont 3 355 médecins généralistes qui ont assuré le rôle de médecin régulateur en 2022, soit une hausse de 2,7 % en par rapport à 2021. Et ce sont les médecins régulateurs salariés, retraités ou remplaçants qui permettent cette hausse.
En effet la participation des médecins libéraux installés (2 547 médecins) a baissé de 2,8 % par rapport à 2021. Sur l’ensemble des médecins généralistes libéraux exclusifs ayant une activité régulière (46 701 en 2022), 5,4 % d’entre eux ont ainsi participé à la régulation de la PDSA en 2022. Il faut donc y ajouter 808 médecins retraités, salariés ou remplaçants, un chiffre en hausse de 24,9 %.
Le nombre total de médecins régulateurs augmente pour 39 % des départements et baisse pour 31 %.
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