Depuis six ans CMV Médiforce prend le pouls de l’humeur des généralistes dans son observatoire des professions libérales de santé. Et une fois encore, ce n'est pas la forme pour les médecins de famille. Sur une échelle de 1 à 10 ils attribuent une note de 4,5 à la situation générale actuelle de la profession. C’est encore moins que l’an passé (4,6) et c’est surtout une des moyennes les plus basses par rapport aux autres professions. Seuls les chirurgiens-dentistes (4,4) et les pharmaciens (4,4) font moins bien, loin derrière les kinés (5,7), les vétérinaires (5,6) ou les infirmiers (5,4).
Au-delà de la situation présente, leur vision de l’avenir est encore plus noire, les généralistes sont les plus pessimistes (3,8) avec les chirurgiens-dentistes (3,6) là où la moyenne de toutes les professions se situe à 4,1 et remonte un peu depuis deux ans (3,9 en 2014). Ainsi un généraliste de 55 ans du Bas-Rhin juge que « l’avenir de la médecine libérale est derrière nous ».
Quelles sont pour les généralistes les sources d’insatisfaction dans leur métier ? Les horaires à 55%, les conditions de travail à 54% où les perspectives d’évolution dans le métier à 51% sont jugées négativement par les praticiens. Le niveau de revenus (49%) est moins un problème que pour les kinés par exemple (58%) mais plus que les infirmiers (34%) ou les biologistes (33%).
Mais, si l'on se fie aux témoiganges récoltés, ce qui pèse le plus sur les généralistes ce sont les contraintes administratives et le contexte politique. « Contraintes croissantes », « flicage insupportable des caisses », « charges et fiscalité en hausse croissante », « sur-pouvoir des mutuelles », « mépris des autorités » ou encore « conditions de travail en dévalorisation » sont certains des arguments mis en avant par les médecins pour expliquer leur ras-le-bol.
« L’évolution va vers la mise en place d’un contrôle administratif étouffant, ce qui génère de nombreuses incidences négatives. Non seulement cela n’assure pas une meilleure prise en charge, mais c’est le temps passé auprès des patients qui en pâtit. Cela altère l’aspect humaniste du métier » estime un généraliste de 59 ans du Morbihan. Ceci explique sûrement que 72% des professionnels de santé libéraux sont d’accord avec l’affirmation : « J’ai l’impression de ne plus faire vraiment mon métier ».
Ce coup de fatigue des généralistes se révèle aussi à travers un attrait marqué pour des modes d’exercice différents. D’après l’Observatoire, 63% des sondés exercent aujourd’hui seuls en libéral mais ils ne seraient plus que 48% dans ce cas dans cinq ans si l’on se fie à leurs souhaits. Les généralistes du panel sont ainsi les plus tentés (par rapport aux autres professions) par le salariat (28%) alors qu’ils ne sont que 3% à être salariés aujourd’hui.
Malgré tout fiers de leur métier
Malgré tout, le généraliste ne voit pas tout en noir. Cela peut paraitre paradoxal, mais 57% d’entre vous conseilleraient d’exercer la médecine générale en libéral aujourd’hui à un jeune : c’est plus que la moyenne de toutes les professions (53%) et c’est surtout mieux qu’il y a deux ans avec un regain de 21 points et un retour au même niveau qu’il y a cinq ans.
Les généralistes sont aussi 63% à se dire globalement satisfait de leur travail actuel, c’est certes le chiffre le plus bas de toutes les professions et globalement très inférieur à la moyenne générale (78%) mais cela reste majoritairement positif, d’autant plus que les jeunes généralistes sont plus enthousiastes que leurs aînés. Les médecins de famille restent très largement fiers de leur métier (79%), en soulignent l’intérêt (75%) et considèrent qu’il suppose une vraie vocation (86%). « Cela reste un métier de vocation avec les avantages supérieurs aux inconvénients » juge une généraliste de 59 ans du Bas-Rhin. « Un merveilleux métier, mais à exercer comme un art et non pas comme un technicien… », considère quant à lui un généraliste de 47 ans d’Ille-et-Vilaine.
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