C’était l’une des dispositions fortes contenues dans la loi de décembre 2023 « visant à améliorer l’accès aux soins par l’engagement territorial des professionnels », portée par Frédéric Valletoux : la généralisation de l’expérimentation menée dans six régions pilotes (Auvergne Rhône-Alpes, Centre-Val de-Loire, Île-de-France, Hauts-de-France, Occitanie et Réunion), autorisant la rédaction, dans certains cas, de certificats de décès par des infirmiers volontaires, formés et inscrits à l’Ordre, exerçant en libéral ou salariés en Ehpad.
L’objectif poursuivi vise à réduire les délais d’attente des familles endeuillées pour obtenir ce certificat quand un médecin n’est pas disponible. Un arrêté a déjà défini les modalités de rémunération. Schématiquement, l'infirmier perçoit 42 euros en journée et 54 euros durant les plages horaires de permanence des soins. « Le texte a d’ores et déjà été soumis à l’examen du Haut Conseil des professions paramédicales le 5 mars 2024 », se réjouit l’Ordre des infirmiers, qui salue un signal positif envoyé aux professionnels et aux Français. L’institution précise que cette réforme doit encore faire l’objet d’un décret « à paraître sous quinzaine », pour entrer en vigueur. La généralisation de la rédaction des certificats de décès par les infirmiers est donc imminente.
Un pool de médecins volontaires pour répondre à la détresse des familles
Mais en attendant ces renforts infirmiers, des médecins se sont organisés de longue date, localement, pour épauler les familles d’un proche défunt à domicile et leur permettre la prise en charge de la dépouille par les opérateurs funéraires, sans attendre de longs délais.
C’est le cas dans l’Aude, où la vice-présidente du conseil départemental de l’Ordre des médecins, la Dr Martine Peyrot, est parvenue à constituer une liste d’une vingtaine de médecins volontaires, qui ont accepté des astreintes pour répondre à la détresse des foyers. Ces praticiens « mobilisables », composés de généralistes et de spécialistes libéraux, sont soit à la retraite, soit en cumul emploi retraite, soit en activité.
Ils n’interviennent qu’en cas de carence médicale avérée en période de permanence des soins. À savoir, les week-ends, les jours fériés de 8 heures à 20 heures et en semaine de 20 heures à minuit. « Nous arrivons ainsi à couvrir une bonne partie du département, même s’il y a encore quelques trous dans certains secteurs, comme les zones rurales et de montagne », analyse la Dr Peyrot.
Pas taillables et corvéables à merci
La procédure est bien rodée. Lors d’un appel au Centre 15 pour signaler un décès en période de PDS, le régulateur contacte, comme à l’accoutumée, le médecin de permanence qui essaye de trouver un confrère disponible pour rédiger le constat. Si aucun n’est libre, le régulateur se tourne alors vers le cadre d’astreinte de l’agence régionale de santé (ARS). Et c’est uniquement ce dernier qui contacte le médecin volontaire éventuellement libre dans le secteur géographique concerné. « Seule l’ARS, avec qui on a monté ce modus operandi, dispose de la liste des volontaires, le Centre 15 ne l’a pas », détaille la vice-présidente de l’Ordre occitan. Une manière d’éviter d’éventuelles dérives où « ces praticiens de bonne volonté, qui ne sont pas taillables et corvéables à merci » pourraient être appelés au débotté pour d’autres urgences que l’établissement d’un certificat de décès.
Cette organisation a fait ses preuves depuis deux ans, attirant l’attention de la procureure du tribunal de Carcassonne et des services de gendarmerie et de police. Une convention a même été signée début février, dans laquelle les forces de sécurité et les services de la Justice peuvent désormais s’appuyer sur la force supplémentaire de ces médecins « réservistes », par exemple face à un cadavre découvert la nuit ou le week-end. Mais là aussi, la liste des volontaires ne leur a pas été communiquée directement pour éviter les abus.
Quant aux médecins concernés, même s’ils entrent dans le cadre d’une réquisition, ils gardent toute latitude pour se récuser. En revanche, l’indemnité forfaitaire, dans le cadre de cette procédure médico-légale, chute de moitié par rapport au forfait réglementaire de 100 euros versés par les caisses primaires pour un constat de décès à domicile. « Ils ne font pas ça pour l’argent. Ce sont des gens engagés, s’ils peuvent y aller ils y vont », se réjouit la Dr Peyrot, pas fâchée au demeurant d’avoir conclu cette convention sans dévoiler à ses nouveaux partenaires les noms des médecins volontaires.
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