Alors que les premières réunions de concertation pour refonder le système de santé ont commencé, les représentants des médecins libéraux restent sur leurs gardes, craignant un énième plan hôpital. Face à ces inquiétudes, le gouvernement a multiplié les signaux positifs.
La présence de la médecine de ville est confirmée dans les trois piliers/groupes de travail de la concertation nationale — en dehors de celui sur la rémunération et les carrières à l'hôpital : investissements/financement, simplification des organisations et territoires. Par ailleurs, le ministre de la Santé a nommé pilote de ce dernier groupe de grande importance pour les libéraux Jocelyne Wittevrongel, pharmacienne d’officine et surtout présidente de l’Union nationale des professionnels de santé (UNPS).
Sentiment mitigé
Selon les documents que « Le Quotidien » a pu consulter, les négociations en séance plénière du groupe « territoires » sont prévues tous les jeudis du mois de juin, en présence de 70 participants. Il s’agit de définir ce qu’est l’exercice coordonné, les structures (communautés professionnelles territoriales et maisons de santé), le positionnement avec les agences régionales de santé et les collectivités territoriales, le financement, les outils (logiciels, télésanté, plateforme d’appel, DMP) et les besoins d’une bonne coordination. Comme dans les autres groupes de travail, chaque organisation participante est appelée à envoyer sa contribution à Jocelyne Wittevrongel en préparation de chaque nouvelle réunion.
Ségur de la Santé : quelles priorités pour la médecine libérale ?
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Hier, à l’issue des premiers échanges, le sentiment était mitigé du côté des médecins libéraux. « C'était compliqué pour intervenir. Certains étaient dans la salle, d’autres en visioconférence. En tout cas pour cette première séance, chacun a surtout exprimé ses besoins », raconte le Dr William Joubert, du SML. Même critique du côté de MG France. « Parler de l’exercice coordonné avec des acteurs aussi divers qui ont donné des positions attendues, cela ne fait pas avancer le débat. Je suis très dubitatif sur cette séquence. Je ne vois d’objectifs précis pour la ville à part de répondre à des questions très générales », déplore le Dr Jacques Battistoni. De son côté, la CSMF s’est montrée plus ouverte.
« Il y a un processus qui est engagé avec des réunions où chacun exprime son point de vue. C’est trop tôt pour dire que cela ne sert à rien », tempère le Dr Jean-Paul Ortiz, président de la CSMF. La FMF elle aussi joue le jeu. « La présentation était au début très hospitalo centrée. Mais plusieurs syndicats de médecins libéraux ont pu donner leur avis », reconnaît le Dr Jean-Paul Hamon, président de la FMF.
Priorité à la valorisation des CPTS
Sur le fond, les organisations syndicales ont défendu plusieurs propositions concrètes pour favoriser l’exercice coordonné, développer les organisations territoriales ou encore améliorer le lien ville-hôpital. « Pour se coordonner dans chaque territoire, il faut déjà définir les missions de chaque acteur, la ville, l’hôpital. Cela nécessite un diagnostic partagé sur les besoins des patients identifiés par les soignants comme les soins non programmés, les pathologies chroniques, l’obésité chez l’adolescent », avance le Dr Ortiz.
Sous quelles formes doit prendre cet exercice coordonné ? Là encore, les libéraux refusent de se voir imposer le modèle unique de la CPTS. « Nous préférons plutôt des équipes cliniques de proximité composée de médecins, pharmaciens, infirmiers, kinés qui permettent aux patients de conserver leur libre choix du professionnel. Ce n’est pas le cas pour une CPTS », suggère le Dr Joubert. Pour MG France, la CPTS a fait clairement ses preuves pendant la crise sanitaire.
« Les professionnels organisés en communautés ont pu prendre en charge rapidement des patients via des centres Covid ou créer des filières », rappelle le Dr Battistoni. Mais le syndicat estime que ces collectifs de libéraux ne sont pas financés « à la hauteur de leurs besoins pour mener à bien le suivi du projet et indemniser les professionnels qui ont participé aux actions des CPTS ». « Le premier axe du Ségur de la santé doit être la valorisation des actions des CPTS », tranche le Dr Battistoni.
La FMF, elle, a mis en avant le chantier déjà engagé sur la prise en charge des soins non programmés. « Si on n'obtient pas la mise en place d'une régulation libérale et le numéro unique 116-117 à l'issue du Ségur, c'est que le gouvernement n'a pas de volonté pour réorganiser le système de santé. Un hôpital qui ne s'appuierait pas sur la ville continuerait à creuser le déficit », prévient le Dr Hamon. Une chose est certaine : les syndicats de médecins libéraux entendent peser de tout leur poids dans la concertation, que ce soit en plénière via leurs contributions ou dans les réunions bilatérales qui se tiennent en parallèle avec le ministère de la Santé.
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