C'est loin d'être une surprise ! Chargé de s’assurer du respect de l'objectif national de dépenses d'assurance-maladie (ONDAM), le comité d’alerte sonne le tocsin en raison d’un risque de « dépassement très significatif » du budget de la Sécurité sociale pour 2020, adopté avant le déclenchement de la crise sanitaire.
La loi de financement de la Sécurité sociale (LFSS) 2020 a fixé fin 2019 ce budget à 205,6 milliards d'euros. Mais en raison de l’épidémie et de l’état d’urgence sanitaire déclaré le 16 mars, des mesures exceptionnelles ont été prises, affectant massivement les dépenses. D’ores et déjà, le comité estime que le coût brut de ces mesures nouvelles exceptionnelles pourrait dépasser les 8 milliards d'euros annoncés par le gouvernement.
Dans le détail, l’impact du Covid-19 est « contrasté » selon les secteurs concernés. Pour les soins de ville, les mesures de confinement ont entraîné une chute globale des remboursements de 2,1 % en comparant les quatre premiers mois de l’année 2019 à ceux de 2020. Le comité a noté des baisses d’activité affectant de façon variable les professionnels de santé. Ces baisses ont été très marquées chez les dentistes (activité « quasi nulle » de la mi-mars à fin avril), les masseurs-kinésithérapeutes (-70 %), les médecins spécialistes (- 50 %), les généralistes (30 % grâce à une compensation par la montée en charge des téléconsultations) et les laboratoires de biologie médicale (30 %) et les transports sanitaires (30 %). Les remboursements des actes infirmiers sont restés stables, alors que ceux des médicaments délivrés en ville et ceux de la liste des produits et prestations remboursables ont baissé de 10 %.
Or, selon le comité, l’effet des baisses d’activité est bien « supérieur » à celui de l’élargissement à titre dérogatoire des conditions d’accès aux indemnités journalières mises en place par l’assurance-maladie. Dans ce contexte, une sous-exécution des dépenses de soins de ville sur l’ensemble de l’année apparaît « plausible », même s'il note que « sa réalisation et son ampleur dépendent principalement de la durée de la baisse des remboursements en date de soins, du rythme de reprise d’activité des professions de santé et de l’éventualité d’un rattrapage en tout ou partie des soins non réalisés pendant la période de confinement ».
Rectification dans le prochain PLFSS
Concernant les établissements de santé publics, privés et médico-sociaux, qui bénéficient de garantie de financement permettant de compenser les perturbations d’activité, le comité estime que les dépenses devraient être atteintes. Mais à ces dépenses, il faudra aussi ajouter les mesures exceptionnelles en matière de rémunérations des personnels (primes, majoration des heures supplémentaires) et de prise en charge des surcoûts liés à l’organisation des établissements dans la lutte contre l’épidémie.
« Dans un contexte d’incertitude sur l’évolution de la crise sanitaire, son ampleur dépend principalement d’une possible sous-exécution des dépenses de soins de ville et du plein effet des mesures exceptionnelles », prévient le comité.
Face à un risque sérieux de dépassement au-delà du seuil de 0,5 % fixé par la loi, l'alerte notifiée par le comité au Parlement, au gouvernement, à l'assurance-maladie et aux organismes complémentaires devra susciter des propositions de mesures de redressement. Selon l'instance, le gouvernement a déjà pris acte de cette situation exceptionnelle et proposera dans le prochain projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS), débattu cet automne au Parlement, une rectification à la hausse de l’ONDAM pour 2020.
Missions, consultation et diagnostic, prescription : le projet Valletoux sur la profession infirmière inquiète (déjà) les médecins
Désert médical : une commune de l’Orne passe une annonce sur Leboncoin pour trouver un généraliste
Pratique libérale : la chirurgie en cabinet, sillon à creuser
Le déconventionnement tombe à l’eau ? Les médecins corses se tournent vers les députés pour se faire entendre