La Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES, ministère de la Santé) a de la suite dans les idées : après avoir analysé le vécu des généralistes libéraux pendant le confinement, les experts les ont de nouveau interrogés au moment du déconfinement. Menée auprès d'un panel de 3 300 généralistes libéraux, ayant au moins 200 patients en tant que médecins traitants, cette double enquête (activité et opinions) a été réalisée du 18 mai au 21 juin (près de 1 200 généralistes ont répondu).
Reprise progressive de l'activité
Premier enseignement : au sortir du confinement, la reprise de l’activité a été progressive, restant plus faible qu'en temps normal. Pendant la semaine du 11 mai, moins de 4 généralistes sur 10 déclarent avoir un volume horaire de travail « similaire » à une semaine ordinaire, tandis que « plus de la moitié » des sondés constatent un volume inférieur à leur activité habituelle.
Cette baisse d'activité est naturellement moindre que pendant le confinement, estimée en moyenne, entre « 3 % et 7,5 % » – contre 13 % à 24 % pendant la première quinzaine d’avril. Concrètement, 32 % des médecins du panel ont déclaré moins de 20 consultations par jour la semaine du 11 mai, 41 % entre 20 et 29 consultations et 27 % plus de 30 consultations.
Santé mentale : besoins en hausse
Toujours à la sortie du confinement, pour la quasi-totalité des médecins (9 sur 10), le coronavirus représente moins de 25 % des consultations. Près d'un médecin sur dix déclare même n'en avoir aucune. Mais parallèlement, l'enquête traduit la « forte augmentation » des demandes de soins liés à la santé mentale (stress, troubles anxieux ou dépressifs), constatée par deux tiers des généralistes, et un « rattrapage » observé pour les consultations liées à des maladies chroniques (pour suivi ou complications).
Près de la moitié des médecins estiment que les suivis pédiatriques sont moins fréquents qu'à l'habitude, accréditant la thèse de certains retards de prise en charge.
Contact Covid, oui mais...
Si la reprise d'activité a été progressive, comment les généralistes, chevilles ouvrières du circuit de contact tracing, ont-ils vécu leur rôle et les outils à leur disposition à la sortie du confinement ?
Le protocole d'identification et de notification des personnes contacts via Amelipro (Contact Covid) est considéré comme « approprié » par deux tiers des sondés alors qu'un tiers d'entre eux affichent des réticences, jugeant cette procédure « complexe », faisant porter une responsabilité excessive et/ou ne faisant pas partie de leurs missions. Le caractère chronophage est souligné puisque presque la moitié des généralistes estiment que ce système de tracing des cas contacts n'est pas compatible avec leur charge de travail. Les réticences sont significativement plus fréquentes chez les médecins de plus de 60 ans et dans des zones d'intensité épidémique faible.

Favorables à la généralisation du port du masque
Au moment de l'enquête, la très grande majorité des médecins (9 sur 10) s’estimaient armés et bien informés pour conseiller leurs patients (recommandation de confinement, respect des modalités de protection). Et près de 9 médecins sur dix jugent ce rôle approprié. Seul un médecin sur dix juge cette responsabilité excessive.
Très significatif, la très grande majorité des généralistes (9 sur dix) se montraient favorables à la généralisation du port du masque dès le début du déconfinement, à une période où la décision de rendre obligatoire ce port dans les lieux publics clos n'avait pas encore été imposée. Et près de 7 praticiens sur 10 estiment même que cette mesure de généralisation du port du masque aurait dû être prise « bien avant », ce qui replace certaines polémiques à leur juste proportion. Moins d’un médecin sur 10 seulement se dit défavorable à cette mesure – estimant qu'elle donnerait une fausse impression de sécurité ou serait mal comprise.

Concernant spécifiquement les gestes barrières, 8 médecins sur dix estiment être un relais efficace pour les faire respecter. Cette opinion est plus élevée chez les médecins les plus expérimentés (âgés de 60 ans ou plus ayant un volume de consultation élevé).
Au moment de l'enquête (mai/juin), l'accès aux tests PCR-Covid-19 restait limité en ville pour un médecin sur quatre. Et à cette période, seul un médecin sur quatre (25 %) s'était fait tester (contre 17 % en avril). 4 % des généralistes pensaient alors avoir été infectés par le coronavirus.
Confiance relative dans le ministère
Par rapport à la première enquête d'avril (en plein confinement), la part des médecins ayant une perception très élevée de la gravité de l'épidémie (score de gravité entre 8 et 10 sur une échelle de 0 à 10) a fortement baissé, passant de 41 % en avril à 27 % en mai-juin. Pour la DREES, cette baisse semble refléter « l'évolution favorable du nombre de nouvelles contaminations et d'hospitalisations lors du déconfinement ».
Seuls 56 % des généralistes déclarent faire « plutôt » ou « tout à fait » confiance au ministère de la Santé pour les informer pendant l'épidémie, taux comparable à celui d'avril. Cette confiance toute relative concerne la réorganisation des services sanitaires (50 %) et la gestion globale de l'épidémie (53 %). A cette période, deux tiers des généralistes déclaraient faire confiance au comité scientifique qui conseille le gouvernement depuis le début de la crise...
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