Les médecins libéraux ont reçu deux signaux contradictoires en quelques jours. Lors de la présentation de ses vœux à la nation, François Hollande avait fustigé les « excès et les abus » de la Sécurité sociale, avant de s’engager à réduire la consommation « record » de médicaments, les actes médicaux et prescriptions inutiles.
Son ministre du Budget, la semaine dernière, a-t-il voulu arrondir un peu les angles ? Bernard Cazeneuve a en tout cas salué devant la commission des Finances de l’Assemblée nationale la faible progression des dépenses d’assurance-maladie, inférieure « de plus d’un milliard d’euros » aux objectifs de la loi de financement de la Sécurité sociale (LFSS) retenus l’an dernier. En mai déjà, la commission des comptes de la Sécurité sociale pronostiquait que le respect de l’objectif national des dépenses d’assurance-maladie (ONDAM) serait sous-exécuté de 500 millions d’euros en 2013. Les résultats ont été deux fois meilleurs que prévu, si l’on peut dire. Cette modération est en tout cas une nouvelle providentielle pour le gouvernement engagé dans une longue séquence de réduction drastique des dépenses publiques (50 milliards d’euros entre 2015 et 2017).
Maîtrise délétère, volumes en baisse
Bon élève de la maîtrise des dépenses depuis des mois, le secteur libéral a modérément apprécié ce discours un brin triomphaliste, dénonçant une pression désormais « anormale » sur les volumes d’actes et les tarifs, et réclamant surtout des contreparties à ses efforts. Loin de l’euphorie, ce serait plutôt la douche froide.
La Confédération des syndicats médicaux français (CSMF) estime ainsi qu’il n’y a« pas lieu de se réjouir » de ces résultats. « Il ne s’agit pas d’une maîtrise exemplaire mais d’une maîtrise délétère », résume son président, le Dr Michel Chassang, qui évoque les reports de soins des patients (voire leur renoncement).
Entre octobre 2012 et octobre 2013, les honoraires des généralistes ont chuté de 3,1 % avec notamment une baisse inédite du nombre de consultations (1,6 %), souligne le syndicaliste. Les consultations des spécialistes libéraux ont également reculé de 1,5 %. Pour faire face à ce « repli très net de la consommation médicale », la Confédération appelle les pouvoirs publics à ne pas « confondre économies et restrictions des soins » et à mobiliser des marges de manœuvre pour la ville à la faveur de la stratégie nationale de santé.
Les cliniques exigent un rattrapage et refusent les tarifs dégressifs
À l’heure où le secteur hospitalier public bénéficie de rallonges budgétaires ou d’aides ciblées (20 millions d’euros pour le petit matériel à l’AP-HP par exemple), les économies dégagées par les soins de ville apportent de l’eau au moulin de ceux qui réclament un virage ambulatoire très marqué, en particulier dans l’allocation des ressources. Les généralistes de MG France attendent désormais que le gouvernement « mette le paquet » sur les soins de premier recours « et pas seulement avec les 20 millions d’euros prévus dans le PLFSS pour la rémunération des équipes ». « Il faut recentrer le système de santé sur les soins ambulatoires et mieux utiliser les moyens hospitaliers », argumente son président le Dr Claude Leicher.
Pour le think tank « Soins Coordonnés », même analyse : « ce milliard retrouvé » doit être alloué aux professionnels de première ligne pour réformer le système de santé et limiter le basculement vers l’hôpital.
Pas en reste, les cliniques privées ont vu dans ces économies une opportunité providentielle pour réclamer des arbitrages favorables du gouvernement lors de la prochaine campagne tarifaire. La Fédération de l’hospitalisation privée (FHP) affirme que le secteur, particulièrement efficient, « fait mieux que tenir ses objectifs » etelleexclut tout dispositif de dégressivité tarifaire qualifié de « non sens ». Sa branche médecine, chirurgie, obstétrique (FHP-MCO) réclame de son côté un « rattrapage tarifaire conséquent » de 2,75 % en 2014. Une mesure « d’équité salutaire pour un secteur asphyxié »...
En se réjouissant un peu fort, Bernard Cazeneuve a ouvert le cahier de doléances...
Verbatim
" Nous avons pris de façon responsable notre part des efforts. Nous ne comprendrions pas que le secteur privé soit pénalisé une nouvelle fois cette année.
Lamine Gharbi
Président de la FHP-MCO
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