Crise de la médecine scolaire

Des parents d’élèves du 93 en appellent à l’ONU

Publié le 21/09/2011
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« CE N’EST PAS un coup de communication, c’est une déclaration de guerre ! » Michel Hervieu, président de la FCPE de Seine-Saint-Denis et vice-président du bureau national, se veut combatif en ce mois de rentrée. Pour protester contre la pénurie de médecins scolaires, sa Fédération a envoyé des courriers aux ministères de l’Éducation nationale et de la Santé, au conseil régional et général, à des ONG comme Médecins sans frontières et à l’OMS. Cette démarche s’inscrit délibérément dans le sillage de l’appel, provocateur, du maire de Sevran, Stéphane Gatignon, à des casques bleus pour pacifier les conflits liés à la drogue dans sa commune, il y a trois mois. « Nous voulons tirer la sonnette d’alarme car c’est un vieux problème que l’Éducation nationale ne veut pas régler », affirme Michel Hervieu.

La situation ne cesse de s’aggraver, estime la FCPE : « Chaque année, de moins en moins de médecins scolaires viennent dans les écoles. Aujourd’hui, il n’y a en moyenne qu’un médecin scolaire pour 10 000 enfants (9 600 précisément). Parfois, 1 pour 15 000 ou 18 000 ! » Or, la Seine-Saint-Denis a plus que jamais besoin de professionnels de santé. Michel Hervieu en veut pour preuve la persistance de la tuberculose dans ce département, qui affiche le taux de déclaration le plus élevé selon les données de l’Institut de veille sanitaire (InVS) publiée en mars : 30,3 pour 100 000 en 2009 (devant Paris, avec 23,4). « Beaucoup de familles n’ont pas les moyens d’emmener leur enfant chez un médecin, l’école doit assurer ce service et faire de la prévention », alerte Michel Hervieu.

L’exigence de revalorisations

« Ce cri d’alarme correspond à une crise réelle sur le terrain », confirme Corinne Vaillant, la secrétaire générale du Syndicat national des médecins scolaires et universitaires (SNMSU-UNSA), qui tente également de mobiliser de son côté les pouvoirs publics. Car la pénurie n’est pas l’apanage de la Seine-Saint-Denis. En Mayenne, le taux d’encadrement est d’1 médecin pour 25 900 élèves, alors que la taille acceptable d’un bassin est de 5 000 enfants. Et l’Indre compte, pour l’ensemble de son territoire, un unique professionnel. « En milieu rural, le médecin scolaire est parfois le seul interlocuteur de santé pour l’enfant. Cette carence est donc dramatique, et pose un véritable problème pour la qualité d’exercice et ce que nous proposons comme soins », s’alarme Corinne Vaillant. Seulement 20 % de la population d’une même tranche d’âge accède à un examen médical, pourtant obligatoire. La priorité donnée aux urgences médicales engendre des délais dans la mise en place de protocoles plus long. « Certains élèves, en affection longue durée, devraient être examinés dès les premiers jours de septembre pour adapter leur scolarité. Or; ils ne seront vus qu’autour de la Toussaint », déplore la secrétaire générale du SNMSU-UNSA.

Pour enrayer l’hémorragie démographique des médecins scolaires, une seule solution, selon le syndicat. « Que le ministère de l’Éducation nationale refonde une grille tarifaire obsolète et que les rectorats appliquent une politique de recrutement avec des contrats décents qu’ils renouvellent », avance Corinne Vaillant. Après une formation en médecine générale, pédiatrie ou santé publique, un concours de l’Éducation nationale et une année de stage avec formation à l’École des hautes études de santé publique, un médecin scolaire gagne en début de carrière 1 754 euros. « Il faut revoir notre secteur et les possibilités de carrière, sinon, c’est la pérennité de notre métier qui est en jeu et la santé des enfants », conclut Corinne Vaillant.

 COLINE GARRÉ

Source : Le Quotidien du Médecin: 9008