Coordination ville-hôpital

Des pistes pour casser enfin les murs

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Publié le 04/02/2022
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À l'ouvrage depuis début décembre, la commission d'enquête sénatoriale sur l'hôpital a poursuivi, la semaine dernière, ses auditions auprès des représentants de la médecine de ville, impliqués dans les différentes formes d'exercice regroupés.

Crédit photo : PHANIE

« Quelle est votre articulation avec l'hôpital ? Rencontrez-vous des difficultés et quelles sont les solutions d'amélioration ? », a lancé Catherine Deroche, sénatrice LR du Maine-et-Loire et rapporteure de la commission d'enquête sur l'hôpital. Cette question de la coopération ville-hôpital qui taraude les élus est pourtant ancienne. Pour faire face aux nombreux défis (vieillissement, maladies chroniques..), l'hôpital a dû développer un panel de prises en charge : hospitalisation de jour, hospitalisation à domicile, chirurgie ambulatoire… Or, cette évolution nécessite une coopération renforcée avec la ville. D'autre part, depuis la loi Bachelot de 2009, les pouvoirs publics ont structuré les soins primaires en développant les maisons et centres de santé et plus récemment les communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS) pour accroître la collaboration. 

Un lien qui existe

« Depuis plusieurs années, les coopérations existent et se sont améliorées », a affirmé le Dr Pascal Gendry, président d'Avenir des équipes coordonnées (AVECsanté) qui fédère les MSP. Des consultations avancées avec des hospitaliers ont ainsi été mises en place dans ces structures collectives. Pendant l'épidémie de Covid, « des pharmacies hospitalières nous ont rendu service pour attribuer et délivrer les vaccins », a-t-il illustré. De son côté, la Dr Hélène Colombani, présidente de la Fédération nationale des centres de santé (FNCS), a aussi rappelé que l'arrivée d'assistants partagés, généraliste ou spécialiste, a permis « la création de staffs communs et l'élaboration de protocoles d'accès aux plateaux techniques spécialisés avec l'hôpital ». Président de la Fédération nationale des CPTS, le Dr Claude Leicher a, quant à lui, expliqué que les collectifs libéraux participent pleinement à ce décloisonnement. Exemple : une cellule de coordination ville-hôpital a été créée par sa structure dans la Drôme. « Elle s'occupe de voir comment faire entrer un patient dans l’hôpital, comment gérer le séjour, l'information des professionnels et surtout organiser les sorties » a-t-il décrit.

Mais ces avancées ne suffisent toujours pas à cacher les tensions. Outre les problèmes récurrents de communication pour réceptionner les courriers de liaison, le manque de personnel contraint les hôpitaux à fermer des lits ce qui rend encore plus difficile l'adressage des patients. Puis, « chaque hôpital a son propre parcours. Pour qu'un généraliste puisse avoir un avis de spécialiste, c'est la galère, a déploré le Dr Gendry. L'hôpital raisonne encore en termes de médecin traitant et non d'équipe de soins primaires. Un patient qui rentre à domicile a besoin d'une équipe organisée et structurée. Cette capacité-là existe dans les maisons et centres de santé ou encore les CPTS. »

Cellule de coordination interne 

Les difficultés ne sont pas pour autant insurmontables. Et des solutions existent, toujours selon ces acteurs. AVECSanté a plaidé pour la création de cellules de coordination internes à l'hôpital, « réactives et bien identifiées » permettant aux professionnels de ville d'adresser les patients. Parallèlement, les MSP ou les CPTS devraient aussi se doter d'un « espace de coordination », qui a vocation à devenir l'interlocuteur de l'hôpital. « Pour cela, il faut des équipes structurées et organisées avec un nombre de professionnels conséquents donc des investissements », a revendiqué le Dr Gendry. Les représentants des structures coordonnées ont aussi réclamé un « système d'information solide et interopérable » entre la ville et hôpital. « Certes, on utilise des messageries sécurisées en santé mais il y a encore des professionnels de services hospitaliers qui ne le font pas, a déclaré la Dr Colombani. C'est très aléatoire. » Dernière piste avancée de façon unanime : repenser la formation des soignants. « Elle ne doit pas être seulement hospitalière, a suggéré en conclusion le Dr Gendry. Peut-être qu'il serait bon que des hospitaliers viennent se former en ville pour éviter ce cloisonnement. »

Loan Tranthimy

Source : Le Quotidien du médecin