L'ambiance était aux retrouvailles toniques au Palais des congrès de Bordeaux. Médecins, pharmaciens, sages-femmes, infirmières libérales … ont fait le déplacement, ce lundi et jusqu'à demain, pour ce rendez-vous attendu des équipes libérales de soins coordonnés, organisé par AVECsanté (anciennement Fédération française des maisons et pôles de santé). Après le report d'un an en raison du Covid, les 1 200 congressistes semblaient ravis de se retrouver sous le signe très porteur de l'exercice « pluripro ».
Pallier les départs
C'est le cas du Dr Aurore Nguen, médecin spécialiste en médecine physique et réadaptation. Installée en Ardèche dans la maison de santé de Meyras, la spécialiste est accompagnée d'Agnès Daubrel, coordinatrice et infirmière Asalée. « Nous voulons glaner toutes les informations nécessaires pour monter une communauté professionnelle territoriale de santé et échanger sur nos exercices, confie la médecin. 40 professionnels travaillent dans notre structure dont 9 généralistes. Mais trois d'entre eux vont partir à la retraite. Nous devons réfléchir à mieux nous organiser sur le territoire et à évoluer ».
Un peu plus loin dans les allées bondées, Fabienne Colin, coordinatrice dans la maison de santé de Châteaudun est venue avec la sage-femme. « Je veux savoir comment mon métier va évoluer, témoigne la première. Puis, je suis très intéressée par les ateliers sur le service d'accès aux soins que les maisons de santé vont assurer au titre de leurs nouvelles missions ». Plus de dix ans après la création des premières maisons de santé pluriprofessionnelles (MSP), la dynamique de ce modèle n'est plus à démontrer.
Défis de santé publique
Le dernier bilan en témoigne : 1 889 structures labellisées fonctionnent aujourd'hui et 366 projets sont en cours. « Les MSP ont prouvé leur efficacité, a lancé le Dr Didier Ménard, président de la FemasIF (Fédération des maisons et pôles de santé Île-de-France), l'un des pionniers de ce mode d'organisation des soins primaires. Aujourd'hui, nous revendiquons de devenir le modèle de référence de l'organisation des soins primaires pour faire face aux défis de santé publique comme les maladies chroniques ».
Mais pour pouvoir répondre aux enjeux de santé publique et aux besoins de la population, les équipes coordonnées ont besoin de « signaux forts » de la part de l'État, afin de continuer à innover.
Dans son discours d'ouverture, le patron d'AVECsanté, le Dr Pascal Gendry, offensif, a déploré le retard pris par les négociations conventionnelles en vue d'un nouvel accord interprofessionnel (ACI) MSP, qui n'a pas été revu depuis 2017. Face à la montée en force des communauté professionnelle territoriale de santé (CPTS), les équipes pluripro attendent des évolutions tangibles de ce contrat via notamment la valorisation de « la participation des patients ou encore des démarches qualité qui vont permettre aux équipes de progresser et d’innover ».
La fin du corporatisme médical
L'autre revendication concerne les nouveaux modèles de financement d'équipes tels que ceux qui sont expérimentés actuellement depuis l'article 51 du budget de la Sécu 2018 qui permet de déroger au droit actuel. « Il faut capitaliser et généraliser dans l'ACI ce qui se fait dans le cadre expérimental », a martelé le président d'AVECsante, généraliste dans la Mayenne, à l'adresse de Marguerite Cazeneuve, directrice déléguée à la gestion et à l’organisation des soins à la CNAM.
Invitée à une table ronde du congrès, cette dernière a dit comprendre les besoins mais estime que les partenaires conventionnels devaient d'abord s'entendre sur une revalorisation des indicateurs socles (notamment sur le service d'accès aux soins ou la prévention). « On peut ensuite inventer un modèle de financement ad hoc qui passe par un conventionnement d'une MSP avec l'ARS et ou la CPAM qui permettra de sortir de l'expérimentation », a-t-elle suggéré. Le député LREM de la Charente, Thomas Mesnier a affirmé que la volonté de l'État est de promouvoir l'exercice coordonné depuis 2017. « Souvent, il fallait lutter contre le corporatisme essentiellement médical », a glissé le député, rapporteur général du budget de la Sécu, médecin urgentiste de formation. Une époque révolue ?
Jusqu’à quatre fois plus d’antibiotiques prescrits quand le patient est demandeur
Face au casse-tête des déplacements, les médecins franciliens s’adaptent
« Des endroits où on n’intervient plus » : l’alerte de SOS Médecins à la veille de la mobilisation contre les violences
Renoncement aux soins : une femme sur deux sacrifie son suivi gynécologique