« Dans une période épidémique, on supprime un service de soins. Ce n'est pas entendable pour la population ! », fulmine François Rage, interrogé ce vendredi par « Le Quotidien ». Le maire de Cournon-d'Auvergne (Puy-de-Dôme) a en effet été informé de la fermeture de la maison médicale de garde (MMG) qui assurait la permanence des soins ambulatoires, et ce à compter de ce 1er avril. Une bien mauvaise blague : ouverte de 19h à 23 h, les week-ends et jours fériés, cette structure gérée par le groupement des omnipraticiens de l'agglomération de Cournon (Goac) assurait les gardes sur le secteur et pour de nombreuses communes proches depuis 20 ans.
L'ARS Auvergne-Rhône-Alpes, agacée, affirme que « la décision de fermeture a été prise unilatéralement par l'association gestionnaire ». L'ARS assure qu'elle n'a « en aucun cas retiré des moyens financiers ou l'autorisation de fonctionner » de cette maison médicale de garde et « qu'elle maintiendra son appui, y compris financier », dans le cas où des médecins volontaires voudraient s'y engager. De son côté, le conseil de l'Ordre des médecins du Puy-de-Dôme a pris contact avec tous les médecins du secteur « pour établir un nouveau tableau de gardes », ajoute l'ARS.
Intenable
Que s'est-il passé ? Joint ce vendredi par « Le Quotidien », le Dr Fabien Ruaud, président démissionnaire du Goac, ne cache pas sa colère et sa lassitude. « Pour remplir un tableau de garde, il faut trouver des volontaires ! souffle le généraliste. Or la situation est devenue intenable. Nous sommes moins d'un tiers de médecins à faire l'effort. » En effet, sur la quarantaine de généralistes du secteur, une grosse dizaine est volontaire…
Dans un territoire déjà déficitaire en médecins et où l'âge moyen des généralistes est de 57 ans, la situation serait ingérable. « Pourquoi est-ce que l'on ne nous répond pas quand on avertit de tout ce qui ne va pas ? », lance le généraliste à l'adresse des tutelles. Le médecin, qui fut président de l'Isnar-IMG (1998-2000) et membre du bureau de MG France, décrit la lente détérioration du système de permanence des soins dans son secteur, et le risque d'épuisement pour les derniers qui s'engagent. « En 2012, nous pouvions encore compter sur 75 % de médecins volontaires pour participer au tableau des gardes. Puis, le nombre de secteurs a été divisé par quatre avec pour résultat des patients à 40 km, avec des médecins qui partent sans être remplacés ! ».
Réquisitions ?
Dans ce contexte local compliqué, il a donc annoncé début mars sa démission de l'association gestionnaire (Goac) à l'ARS, à l'Ordre, au préfet du Puy-de-Dôme, ainsi qu'au maire de Cournon. Dès le lendemain, sa décision était suivie par la démission du bureau, aboutissant à la fermeture de la MMG… « Ce qui pourrait me faire changer d'avis est que tous les médecins retournent à la garde », confie le généraliste, qui s'estime « abandonné par les institutions », et sans doute aussi par certains de ses confrères. « Chacun doit prendre sa responsabilité, dit-il. Je ne suis pas favorable à la coercition mais notre mission est d'assurer l'accès aux soins. Je suis convaincu qu'il faut rendre les gardes attractives et obligatoires. »
Pour l'heure, le maire de Cournon-d'Auvergne veut actionner tous les leviers, « pour que ce service puisse refonctionner ». À la demande du préfet, une réunion a été convoquée par l'Ordre, la semaine prochaine, en présence des acteurs concernés. « Si on est devant un constat de carence absolue, je demanderai au préfet de faire des réquisitions, prévient François Rage. J'espère ne pas en arriver là ».
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