Harcelé et agressé par des jeunes, un généraliste de Dunkerque réclame que « la justice passe »

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Publié le 03/05/2017
Cabinet Dunkerque

Cabinet Dunkerque
Crédit photo : Capture d'écran Google

Le Dr Pierre Goidin, 55 ans, médecin généraliste à Dunkerque, a été harcelé pendant plusieurs jours et violemment agressé par des adolescents bruyants auxquels il demandait d'arrêter de troubler le calme du cabinet. Il continue de travailler mais déplore le manque d'écoute de la justice et l'absence de réactions des autorités. Entretien.

LE QUOTIDIEN : Que s'est-il exactement passé ?

Dr PIERRE GOIDIN : Mardi [25 avril, Ndlr], vers 12 h 30, j'ai demandé de partir à des jeunes qui se tenaient et discutaient depuis un moment contre l'appui de fenêtre du cabinet [au rez-de-chaussée], à deux mètres de la table d'examen. Je leur ai demandé poliment une fois, deux fois, trois fois. Pendant que j'essayais d'éloigner l'un d'eux, un autre m'a frappé sur le côté latéral gauche du genou. J'ai ressenti une forte douleur et j'ai été sonné. Des passants m'ont aidé à rentrer dans le cabinet.

Quelle a été votre réaction ?

Je me suis fait soigner, un scanner a montré une fracture du plateau tibial. Je suis allé déposer plainte, comme un citoyen lambda, vers 14 heures En revenant au cabinet, j'ai vu dans un petit groupe les trois personnes qui m'ont agressé. J'ai appelé la police, qui est venue les contrôler. J'ai appris par hasard le lendemain que ces trois individus avaient aussi agressé un masseur-kinésithérapeute du quartier.

Sont-ils revenus ensuite à votre cabinet ?

Mercredi après-midi, ils se sont moqués de moi et ont mis de la musique à fond près du cabinet. Jeudi soir, ils ont donné des coups de pied sur la porte du cabinet alors que je faisais une suture à un patient ! Vendredi, la journée a été très calme mais le soir, après mes consultations, ils m'attendaient encore, puis m'ont invectivé et insulté. Des patients ont appelé la police pour les déloger. Des policiers sont venus et les ont interpellés. J'ai de nouveau déposé plainte, depuis je n'ai aucune nouvelle.

Connaissez-vous les suites de votre plainte ?

Non. La police a fait son travail. Mais j'attends toujours un contact avec le procureur de la République. J'ai envoyé un mail au tribunal de grande instance, comme on me l'a demandé car il ne pouvait pas me prendre au téléphone. J'attends toujours des nouvelles de la justice ! La France est au 27e rang européen pour le budget qu'elle consacre à  la justice… J'ai aussi alerté le secrétaire du préfet, jeudi après midi, mais je n'ai pas eu de nouvelles non plus.

Avez-vous interrompu vos consultations ?

Non. Je n'ai pas travaillé samedi, c'est tout. Mardi [2 mai, Ndlr], les jeunes sont passés mais c'était calme. Je ne me sens pas tranquille cependant. Avec une paire de béquilles, qu'est-ce que je peux faire ? Ma remplaçante ne sait pas si elle va continuer à me remplacer.

Maintenant, on va essayer de gérer les choses de la manière la plus sereine possible. Il faut que la justice passe et qu'on trouve des solutions pour sécuriser les cabinets médicaux. C'est aussi un problème de société qu'il y ait des jeunes de 13-14 ans dans la rue toute la journée, sans occupation.

* La CSMF 59/62 organise ce jeudi une conférence de presse au sujet de cette agression. Elle réclame le statut de professionnels protégés, la vidéo-surveillance aux abords des cabinets médicaux, un circuit court de dépôt de plainte et la protection par les autorités des confrères en difficulté. 

 

Propos recueillis par Géraldine Langlois

Source : lequotidiendumedecin.fr