LE QUOTIDIEN DU MEDECIN : Comment la HAS travaille-t-elle sur la pertinence médicale ?
ANNE-MARIE ARMANTERAS-DE SAXCE : La pertinence est dans les gènes de la Haute autorité de santé. Elle ne se décrète pas mais résulte d'une démarche d'autorégulation des médecins. L'enjeu est de les aider à se situer dans leur pratique. Nous sommes là pour les outiller à partir des données de la science et de l'expérience des patients, avec qui nous travaillons étroitement.
Nous avons déjà planché sur les actes chirurgicaux et sur la biologie. Désormais, nous élaborons des indicateurs sur la pertinence à l'échelle des parcours de santé. Prenons par exemple l'hémi-arthroplastie de l'épaule, sur laquelle nous travaillons. Il existe pour cette opération deux techniques chirurgicales. Il faut se poser la question de la pertinence de l'acte en fonction de l'environnement, notamment médical, et de l'objectif de vie du patient. L'existence d'un établissement de réadaptation proche est à prendre en considération. Il ne faut plus s'arrêter à la pertinence de l'acte en soi.
Nous travaillons aussi à l'élaboration de fiches sur l'allergo-immunologie, la chirurgie pédiatrique, l'hématologie et la médecine vasculaire. Les médecins hospitaliers et libéraux de toutes spécialités seront informés par des messages courts qui leur seront adressés par leur logiciel d'aide à la décision. Il s'agira de vignettes concises qu'ils verront apparaître sur leur ordinateur s'ils en ont le besoin.
Nous étudions également la cataracte, la tendinopathie de l'épaule et la prothèse de genou. Concernant la pertinence des séjours, la BPCO et l'AVC sont au cœur de nos travaux.
Comment convaincre les médecins libéraux de se saisir de vos outils quand le collège de la HAS est composé uniquement d'hospitaliers ?
En travaillant avec eux pour choisir les thèmes médicaux qui les préoccupent ! Un membre de la HAS ne travaille jamais seul. Il va sur le terrain et s'entoure de représentants de professionnels propres à l'épauler dans sa mission. Les médecins libéraux sont présents dans tous les groupes de travail, ils sont nos partenaires.
Nous travaillons par exemple de longue date avec la Société française de radiologie sur la pertinence des actes en imagerie. N'oublions pas que la HAS s'adresse à tous les médecins. Notre réflexion et notre action sur la pertinence vont au-delà des modes d'exercice.
La médecine de ville est très largement financée par le paiement à l'acte. Ce mode de rémunération est-il compatible avec la pertinence des soins ?
Vraisemblablement, le paiement à l'acte seul ne rend pas justice à la pratique des professionnels de santé. La HAS ne peut pas juger de la meilleure qualité d'une rémunération plutôt qu'une autre. La rémunération sur objectifs de santé publique (ROSP) ou les nouvelles consultations complexes sont de premières avancées.
Nous sommes prêts à travailler à l'élaboration d'indicateurs qualité de pratiques cliniques et d'expériences patients dans le cadre d'une rémunération qui dépasse l'acte, c'est-à-dire à l'épisode ou au parcours. C'est nouveau et intéressant pour les professionnels et les régulateurs ! La médecine de ville est concernée au premier chef. C'est elle qui oriente le patient vers l'établissement puis le récupère à la sortie. Nous avons en magasin une batterie d'indicateurs de résultats cliniques en établissement, qu'on peut étendre à la ville. D'autres seront à créer de toutes pièces avec les professionnels libéraux.
Jusqu’à quatre fois plus d’antibiotiques prescrits quand le patient est demandeur
Face au casse-tête des déplacements, les médecins franciliens s’adaptent
« Des endroits où on n’intervient plus » : l’alerte de SOS Médecins à la veille de la mobilisation contre les violences
Renoncement aux soins : une femme sur deux sacrifie son suivi gynécologique