Le gouvernement et la médecine de proximité

La profession salue le changement de cap mais reste vigilante

Publié le 12/01/2011
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Crédit photo : S Toubon

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Crédit photo : S. toubon/« le quotidien »

EN LANÇANT la concertation sur la médecine de proximité (« le Quotidien » du 10 janvier), et en y mettant les formes (un petit-déjeuner avec des médecins en banlieue, un « Grenelle » sur le programme de travail, puis une réunion à « Ségur » avant les premières annonces), Xavier Bertrand avait un objectif principal : montrer à une profession en proie au doute que ce gouvernement était conscient du malaise médical et avait la volonté d’y remédier. De ce point de vue, le ministre de la Santé, et sa secrétaire d’État Nora Berra, ont plutôt convaincu leur auditoire. « J’ai constaté une prise de conscience politique que la médecine libérale a été mise au ban ces dernières années et qu’il fallait ouvrir une autre voie » , salue le Dr Michel Combier, président de l’UNOF (branche généraliste de la Confédération des syndicats médicaux français – CSMF). Le Dr Claude Leicher, patron de MG-France, insiste sur la séquence positive des dernières semaines, fruit de la mobilisation généraliste de 2010 : « Il y a eu le rapport Hubert, les déclarations du président de la République, le CS, décision très symbolique, et maintenant cette concertation prometteuse. » « Quand un ministre de la Santé fixe comme objectif la valorisation financière du médecin traitant, on ne va pas bouder », ajoute-t-il. « On ne va pas chipoter, la dynamique et bonne », relève aussi le Dr Jean-Claude Régi, président de la Fédération des médecins de France (FMF). Même son de cloches au Syndicat des médecins libéraux (SML). « Le ton a changé, l’attitude et la méthode aussi, se félicite le Dr Roger Rua, secrétaire général. Mais il y avait beaucoup de monde... Plus qu’une réunion de travail c’était une séance de calinothérapie. » Dans la même veine, le Dr Stéphane Munck, président de l’ISNAR-IMG (internes de médecine générale), se félicite que le ministre se soit inspiré du rapport d’Élisabeth Hubert « qui avait pris en compte nos préoccupations en matière de formation initiale et d’exercice ».

L’épée de l’ONDAM.

Sur le fond, les syndicats reconnaissent que les principaux dossiers de la médecine libérale, parfois laissés en jachère, ont été abordés, ouvrant autant de perspectives : la crise de la RCP ; la formation initiale (stages de médecine générale et doublement des maîtres de stage d’ici à la fin de 2012) ; les difficultés d’installation ; la gouvernance du DPC ; la simplification administrative ; la diversification de la rémunération en complément du paiement à l’acte ; un nouveau statut juridique pour faciliter les regroupements ; ou encore la suppression de mesures de la loi Hôpital, patients, santé et territoires (HPST) qui avaient braqué la profession. Une longue liste qui a néanmoins oublié la protection sociale des femmes médecins.

Reste que les syndicats émettent deux réserves : le calendrier, parfois trop distendu aux yeux de certains, et surtout les moyens financiers. Ainsi la CSMF estime-t-elle que « la volonté politique affichée ne rejoint pas les faits ». Pour la Confédération, « l’absence d’affichage des moyens investis dans la médecine libérale, le report au printemps de l’ouverture des négociations conventionnelles » ou encore la « très incomplète » proposition de loi Fourcade (texte qui doit rendre la loi Bachelot plus digeste) jettent une ombre sur tout le chantier.Le Dr Régi (FMF) note que Xavier Bertrand « n’a pas cessé de répéter qu’il y avait un ONDAM [objectif national de dépenses d’assurance-maladie ] à respecter strictement ». Or, avec un objectif en hausse de 2,9 % en 2011, « comment financera-t-on les nouveaux forfaits », interroge ce responsable. « On nous a fait comprendre que l’enveloppe était fermée », soupire un autre leader. Autant de commentaires qui nuancent la bonne impression générale.

Le gouvernement devra faire des choix. Sur ce point, le Dr Claude Leicher souligne qu’en 2010 les dépenses de médecine générale auront baissé d’environ 2 %. Un argument supplémentaire à ses yeux pour ne pas se tromper de priorités . « Nous serons vigilants sur la déclinaison financière des mesures. Ce ne sera jouable que si on privilégie l’investissement sur la médecine générale. J’espère qu’on ne va pas nous raconter des histoires… » Après trois ans de relations compliquées avec les médecins, une nouvelle période semble se profiler. Mais la prudence est de mise. Chats échaudés…

 CYRILLE DUPUIS

Source : Le Quotidien du Médecin: 8883