• Abdoulatifou Aly, (MODEM-Mayotte)
« En métropole, ce projet de loi pose question, mais à Mayotte, il est le bienvenu, car il va nous faire entrer de plain-pied dans le droit commun. Mayotte a longtemps été vu comme un territoire lointain. Les indicateurs de santé y sont mauvais, et l’offre de soins, insuffisante - un hôpital et quatre dispensaires pour près de 200 000 habitants. Notre maternité est la première de France. Les évacuations sanitaires vers la Réunion posent problème, cela coûte cher. Demain, avec la loi HPST, et d’autant plus si Mayotte devient un département, nous espérons avoir un vrai hôpital, avec toutes les spécialités - aujourd’hui, il y a très peu de spécialistes sur notre territoire, nous manquons de médecins. Nous espérons avoir enfin accès à des soins de qualité, et à une couverture universelle, qui n’existe pas aujourd’hui à Mayotte. Cette loi, c’est l’espoir de voir tirer vers le haut l’état de santé des Mahorais».
• Jean-Paul Bacquet, (PS, Puy de Dome)
« La préoccupation numéro un, sur mon secteur qui est à la fois périurbain et très rural, c’est la désertification médicale et l’accès aux soins. Je n’ai rien noté de très précis en la matière dans le projet de loi. Il y a des intentions, mais pas de mesure coercitive. Cela fait trente ans que ce problème n’est pas réglé. Les jeunes médecins ne veulent pas venir dans l’Allier, dans le Cantal. Je suis moi-même médecin, et favorable au retour de la planification. Les hommes politiques doivent faire des choix qu’il faut assumer. Le deuxième problème, c’est l’hôpital, et le tout pouvoir donné au directeur, peut-être bon du point de vue financier, mais sûrement mauvais du point de vue médical. Les communautés hospitalières de territoire m’inquiètent aussi. Ici, il y a trois hôpitaux : ce serait aberrant que le directeur d’ARS force les hôpitaux d’Issoire, de Saint-Flour et de Brioude à se réunir. Cela ne marchera pas, les gens iront directement au CHU de Clermont-Ferrand ».
• Martine Billard (Les Verts, Paris) :
« Avec les ARS, nous assistons à une étatisation de la santé. C’est le pouvoir personnel, le culte du chef, alors que nous sommes pour la collaboration des acteurs. Dans ce projet de loi, la vision du gouvernement est uniquement gestionnaire, économique. On ne s’occupe pas des raisons de l’augmentation des ALD, dont une partie des causes est environnementale (pesticides, ondes des relais téléphoniques…). Nous allons déposer plusieurs amendements sur ces thématiques. L’UMP a préparé des amendements acceptés par le gouvernement sur l’alcoolisme, l’interdiction des cigarettes bonbons, l’obésité. Or la publicité à destination des enfants n’a pas été interdite dans la dernière loi sur l’audiovisuel. On fait de la politique spectacle. La santé environnementale est absente des textes et ne sera pas prise en compte dans les ARS. Enfin, ce texte ne règle pas la question des dépassements d’honoraires, de l’installation des médecins dans les milieux ruraux ou les quartiers difficiles, ni le problème de la permanence des soins… donc les patients vont continuer d’affluer vers les hôpitaux publics ».
• André Flajolet (UMP, Pas-de-Calais)
« En tant que rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques et de l’aménagement durable de l’Assemblée nationale, j’ai rendu un rapport dans lequel j’indique qu’en matière de permanence des soins,tous les médecins, et ce, quel que soit leur statut et leur mode d’exercice, doivent pouvoir participer de manière volontaire aux gardes. Quant aux ARS,elles doivent intégrer la totalité de la chaîne de soins, y compris la santé scolaire et la santé au travail. A ce sujet, estimant qu’il est indispensable de renforcer la prévention et l’éducation thérapeutique, j’ai déposé un amendement sur la fongibilité des enveloppes budgétaires. Il prévoit que l’argent destiné à la prévention ne doit pas glisser vers les soins. En revanche, s’il reste des excédents dans certaines enveloppes destinées aux soins, cet argent peut être redirigé vers la prévention. L’amendement a été adopté en commission des affaires économiques ».
• Jacqueline Fraysse, (PCF-Hauts-de-Seine)
« C’est un texte vraiment très mauvais que j’aurais souhaité voir retirer. Il est très insuffisant sur beaucoup de sujets et très préoccupant sur des sujets essentiels comme l’hôpital. Ce ne sera pas facile de l’améliorer par amendements. Nous défendrons une motion de procédure pour un renvoi du projet de loi en commission. On s’attend à un autoritarisme des ARS avec des directeurs dotés des pleins pouvoirs. Les pouvoirs du directeur d’hôpital sont renforcés de manière excessive. Les présidents de CME sont insatisfaits : même sur le projet médical, ils n’auront qu’un avis consultatif. Ce texte dangereux va en outre continuer à étrangler les hôpitaux publics sur le plan financier, d’où la fermeture probable de lits et d’établissements. En parallèle, on fait entrer le privé en lui confiant des missions de service public ! La PDS, la pénurie de médecins, la question du maillage territorial ne sont pas abordés de manière efficace. Nous présenterons un amendement pour limiter les dépassements d’honoraires à deux fois le tarif opposable. Enfin, les députés ont fait un superbe rapport sur l’obésité. Et quand on lit le chapitre Prévention du texte, on est ahuri ! »
• Jean Lassalle, (MODEM, Pyrénées-Atlantiques)
« Je ne vais pas soutenir le projet de loi. Une fois de plus, on engage un grand débat qui va se dérouler entre initiés, sur un texte très technique, déshumanisé, car il y manque la vision des patients, des soignants et des médecins. Les Agences régionales de santé vont technocratiser le pilotage du système, plutôt que de l’humaniser. Avec les communautés hospitalières de territoire, on va avoir des hôpitaux très équipés mais très éloignés. Je crains que les hôpitaux de proximité deviennent des annexes campagnardes des centres hospitaliers. Or ces structures sont importantes pour l’accès aux soins. Sur mon secteur, on vient de se battre pour sauver une maternité privée. Les petites cliniques privées vont y perdre avec ce projet de loi : seules celles adossées à un groupe financier puissant pourront faire face ».
• Dominique Orliac (PRG, Lot) :
« Avec la mise en place des ARS, le changement de gouvernance à l’hôpital et la lutte contre les déserts médicaux, cette réforme va modifier fondamentalement notre société. Je ne suis pas sûre que l’on en ait mesuré tous les effets. Considérer l’hôpital comme une entreprise privée me paraît risqué. La rentabilité ne doit pas être une priorité. Nous sommes dans une société ultralibéraliste dangereuse pour la société de demain. Je vais présenter plusieurs amendements dont le but est de créer des vocations de médecins, surtout en médecine générale. On entend dire que les mesures incitatives ne servent à rien. Or, ces mesures sont trop récentes et pas assez connues. Il est important de maintenir l’hôpital rural pour que les médecins généralistes continuent de s’installer, de mettre en place le stage de médecine générale pendant le 2e cycle des études dans toutes les facultés et de reconnaître l’enseignement de la médecine générale par des généralistes ».
• Christian Paul (PS, Nièvre)
« Il y a une chose qui me frappe dans cette loi, c’est le nombre d’amendements issus de la majorité. C’est le signe d’une réelle inquiétude. Sur l’hôpital, cette loi va caporaliser la gouvernance en mettant en place un patron tout-puissant, sans apporter de réponses aux questions budgétaires, aux rapports public-privé ou à l’engorgement des urgences. Sur l’offre de soins, on a le sentiment, à lire le texte, que si le gouvernement a pris la mesure des risques de développement de déserts médicaux, il n’a pas choisi les bonnes réponses. Le gouvernement a un bon diagnostic mais rend une ordonnance presque vide. Un certain nombre d’amendements proposent des mesures de régulation, et non de contrainte, comme l’idée de plafonner l’installation dans les régions sur denses. Nous allons bien sûr les voter, tout comme l’amendement sur le numerus clausus piloté régionalement. Mais sur ce sujet de l’offre de soins, il manque des mesures fortes d’attractivité de la médecine générale car c’est seulement dans cadre qu’il est envisageable de prendre des mesures de régulation. Globalement, les réponses du projet de loi ne sont pas à la hauteur des enjeux ».
• Jean-Luc Préel, ( Nouveau centre, Vendée)
«Le parti centriste est à l’origine de près de 200 amendements sur les 1 100 qui ont déjà été déposés. Le texte défendu par Roselyne Bachelot va dans le sens de ce que je réclame depuis des années : la régionalisation de la santé avec la création des agences régionales de santé (ARS), responsable unique au niveau régional. Toutefois, tel qu’il est conçu, le projet d’ARS est centralisateur, jacobin, déresponsabilisant et sans vrai contre-pouvoir. Nous réclamons une coordination nationale efficace de ces ARS au sein d’une agence nationale de santé. Un vrai patron à l’hôpital, pourquoi pas ? Sauf que le directeur d’ARS pourra nommer le directeur d’établissement et le renvoyer s’il ne respecte pas les contrats d’objectifs et de moyens. Ne va-t-on pas créer des AP régionales ? Cela ne me paraît pas souhaitable. Je plaide pour que les projets médicaux soient préparés et votés par la CME, sur la base des besoins de santé et pas par le directeur. Le projet de loi ne résout pas les problèmes de dépassements et de démographie médicale. Plutôt que de mettre des mesures crcitives à l’installation, nous proposons de différencier les modes de rémunération entre les médecins qui exercent entre les zones sous dotées (elles seraient majorées) et ceux qui ont une activité dans les zones surdotées (revues à la baisse)».
• Michel Raison ( UMP, Haute-Saône)
« Mon sujet de préoccupation, c’est la démographie médicale. Ma suppléante est médecin généraliste. Ma circonscription est une zone reculée au climat difficile. Nous ne manquons pas de gendarmeries mais en matière de santé, c’est un vrai calvaire. Dans deux ou trois ans, les médecins généralistes seront partis. Déjà, un canton complet n’a plus aucun médecin. Dans le canton voisin, les médecins sont âgés de 55 ans en moyenne et déjà surbookés. En Franche-Comté, les maisons de santé pluridisciplinaires marchent plutôt bien, mais parfois les médecins n’arrivent pas à s’accorder entre eux pour s’y installer.
Pour les amendements au projet de loi, je travaille sur deux axes. On pourrait fixer un plafond du nombre de médecins pour un certain nombre d’habitants : là où le plafond est déjà atteint, il ne serait plus possible de s’installer. C’est une solution intermédiaire entre une simple incitation et l’obligation de venir exercer pendant cinq ans en zone sous-dotée (qui ne fonctionnerait vraisemblablement pas). Les stages représentent un autre levier : il y aurait moyen d’imposer aux internes des stages en médecine ambulatoire en zone sous-médicalisée. Ils pourraient découvrir une région et décider d’y rester. Dans nos régions, on y pleure deux fois : quand on y va et quand on doit en partir ! ».
• Simon Renucci (apparenté socialiste-Corse)
« Ce qui me préoccupe le plus, c’est le peu de place accordée par la loi à la santé publique et à l’éducation sanitaire. Il aurait fallu davantage insister sur la prévention. Il y a néanmoins des mesures positives. Si le projet de loi, en favorisant les regroupements hospitaliers, amène à construire un nouvel hôpital en Corse, cela peut être une bonne formule. De même, s’il oblige tous les médecins à prendre des gardes, tant mieux : en tant que médecin, je signerai des deux mains. La question de la répartition est délicate. En Corse comme ailleurs, il y a des zones sans médecins. Aujourd’hui, je ne sais pas si ce texte peut changer la donne. Ce sujet, je pense, sera extrêmement débattu, car il existe des positions diverses au sein de chaque parti. Les ARS peuvent être une bonne chose, car il faut mieux coordonner le public et le privé. Est-ce que cela peut marcher en Corse ? Oui, à condition que le directeur d’ARS connaisse la Corse, et qu’il soit capable de mesurer les difficultés d’une île ».
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