Depuis 2004, les Français doivent déclarer un médecin traitant auprès des autorités sanitaires. Celui-ci a pour mission la prise en charge globale, la coordination des soins, la continuité des soins, le premier recours, le dépistage, la prévention… Les médecins français devraient - eux aussi comme leurs concitoyens - déclarer un médecin de premier recours. En 2010, selon une étude de la DREES, ils étaient 84 % à s’être choisis eux-mêmes comme médecin traitant.
C’est cet état des lieux qui a interpellé le Dr Dal Soglio au moment de la fin de ses études. Elle a choisi dans le cadre de sa thèse d’interroger des confrères sur les avantages, les freins et les compétences attendues pour choisir un autre médecin que soi-même comme médecin traitant.
Ma prise en charge : je la note 6,3/10
Son travail observationnel a été mené auprès de 440 médecins, soit rencontrés au Congrès National de Médecin Générale en 2017, soit contactés par le biais de la Société de Formation Thérapeutique du Généraliste (SFTG). Il s’agissait de 268 femmes et 170 hommes, âgés en moyenne de 47,1 ans. 77,6 % d’entre eux étaient installés ; 9,7 % travaillaient comme remplaçants et 3,5 % étaient déjà retraités. La grande majorité d’entre eux ne présentaient pas d’affection chronique (78 %) et 10,6 % étaient en ALD.
À la question « sur une échelle de 1 à 10 comment estimez-vous votre prise en charge actuelle ? », les médecins mettaient en moyenne une note de 6,3 sur 10.
58,1 % d’auto médecin traitant
L’analyse des réponses montre que 88,8 % des médecins interrogés avaient déclaré un médecin traitant : pour 58,1 %, il s’agissait d’eux-mêmes (généralistes pour 98,7 % d’entre eux), 11,9 % avaient choisi un proche et 30 % un médecin indépendant. C’est chez les plus jeunes que le recours au médecin traitant indépendant était le plus habituel, signe que les jeunes générations ont entendu le message de prévention lancé depuis quelques années à la fois par les précurseurs tels que le Dr Max André Doppia (campagne « dis doc, t’as ton doc ? ») et l’Ordre des Médecins. Ainsi, la moyenne d’âge des médecins ayant un médecin traitant indépendant est de 41,6 ans contre 50,2 ans pour ceux qui sont leur propre référent.
Les médecins souffrant d’une maladie chronique étaient 30 % à être suivis par un proche, contre 12,9 % par un confrère indépendant.
Au total, 58,8 % des médecins avaient consulté entre une et trois fois au cours de l’année précédente et il s’agissait majoritairement d’un spécialiste d’organe (68,6 %). Les praticiens qui sont leur propre médecin traitant ont très rarement recours à un généraliste (9,3 % des consultations). Le motif de recours à un spécialiste était principalement une pathologie aiguë.
Objectivité mais besoin d’échanger
Interrogés sur les avantages d’avoir un médecin traitant autre que soi-même, les praticiens mettent en avant la prise en charge objective (62 %), une prise en charge globale (46,7 %), un partage de décisions concernant la santé (43,1 %), puis viennent la synthèse du dossier médical, la coordination des soins, l’amélioration du suivi médical, l’amélioration du dépistage.
Le principal frein au choix d’un médecin traitant autre que soi-même est le manque de temps, jugé important ou très important par 60 % des personnes interrogées. Chez les médecins ne souffrant pas d’affection chronique, le manque de besoin actuel et la peur de déranger étaient aussi mis en avant.
D’autres arguments ont été cités : crainte du non respect du secret médical, peur de prendre la main, peur d’être malade, gêne de l’examen physique, gêne dans la salle d’attente.
Enfin, interrogés sur les compétences qu’ils attendent d’un médecin traitant, les praticiens mettent en avant le bon respect des recommandations, l’empathie, l’intégrité, l’indépendance vis-à-vis de l’industrie pharmaceutique, le respect du secret médical, et la compétence diagnostique. Les praticiens souffrant de pathologies chroniques mettent aussi en avant la disponibilité et la capacité d’autocritique et de réflexivité.
Le Dr Dal Soglio conclut de son travail qu’être médecin traitant d’un confrère est un exercice particulier qui nécessite non seulement une formation spécifique mais aussi des capacités d’écoute et d’empathie particulières.
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