Un séisme ressenti par les professionnels

Publié le 23/09/2010
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Crédit photo : S TOUBON

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Crédit photo : S TOUBON

DANS LES CABINETS médicaux et dentaires ou dans les hôpitaux, mesure-t-on le phénomène du renoncement aux soins ? Le point avec des professionnels.

• Dr Claude Leicher, généraliste, président de MG-France :

« En médecine générale, nous ne constatons pas encore de renoncement aux soins mais nous enregistrons en revanche un phénomène nouveau et lié : celui de la concentration des demandes de nos patients. Les gens viennent nous voir avec une liste de dizaines de problèmes à régler. C’est lié aux franchises et aux dépassements tarifaires ; c’est aussi très certainement une façon de ne pas nous reconsulter trop souvent. Nous comprenons bien cette démarche mais y répondre n’est mécaniquement plus possible, sauf à faire des consultations de trois quarts d’heure ! Il y a une réorganisation de la demande de soins, la médecine générale est probablement encore un lieu où l’on peut rattraper un certain nombre de choses, mais ça va exploser ! Nous sommes dans une situation de risque sanitaire, en particulier pour les enfants qui, parfois, ne sont pas examinés. »

• Dr Jacques Niney, radiologue libéral, président de la FNMR :

« L’activité des radiologues suit, dans l’année, des espèces de courbes qui se font en fonction des rentrées scolaires, des fêtes de Noël… : les gens qui ont des fortes dépenses reculent les examens. Notre situation a ceci de particulier que nous intervenons à la demande de nos correspondants. Ceux-ci s’aperçoivent que les courbes que j’évoquais ont des hauts et des bas plus prononcés qu’avant, qu’elles sont de plus en plus en dents de scie. Quelle en est la cause ? Est-ce le problème financier de l’accès aux soins ? Pour nous, ce n’est pas évident, les radiologues sont en très grande majorité en secteur I, les examens sont remboursés… Beaucoup de radios se font en tiers payant, les patients ont des frais pendant trois ou quatre jours. Ce qui est sûr, c’est que les gens – et ils ont raison – demandent de plus en plus le prix d’un examen avant de prendre rendez-vous. »

• Dr François Aubart, chirurgien hospitalier, président de la CMH :

« Il est évident qu’il y a des retards dans la prise en charge, en chirurgie comme ailleurs – et cela vaut également pour l’achat de médicaments. Il y a aussi un raccourcissement des prises en charge : les patients qui réduisent leur rééducation, leur convalescence. Ceux qui disent le contraire ne connaissent pas la misère et la pauvreté ordinaire. « Ordinaire » parce qu’il existe un filet de sécurité pour les plus démunis mais pas pour les gens qui jouent avec les fins de mois, qui sont plus que ric-rac. Les patients viennent nous voir en nous demandant : " Au bout du bout, qu’est-ce que j’aurai à payer ? " C’est quelque chose qui n’existait pas jusqu’à maintenant. Il y a une insuffisance de témoignages sur cette pauvreté nouvelle. »

• Catherine Mojaïsky, chirurgien-dentiste, secrétaire générale de la CNSD :

« Au niveau des prothèses dentaires (pas à celui des soins, dispensés entièrement en tarifs opposables), nous constatons sans aucun doute qu’il y a de plus en plus de renoncements. Ceci quand les gens n’ont pas de bonne complémentaire et qu’ils voient grimper leur reste à charge. Alors qu’en 2009, on avait plutôt l’impression que les gens qui étaient bien couverts voulaient en profiter, il y a en 2010 une baisse ressentie par les confrères. Les patients hésitent, ils retardent, ils cherchent à faire du bricolage… Même ceux qui ont une complémentaire craignent pour le futur. »

 PROPOS RECUEILLIS PAR K. P.

Source : Le Quotidien du Médecin: 8821